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Equipe de France - Bleus - Entretien d'Ibrahima Konaté : "La finale de la Coupe du monde ? Ça ne passe pas…"

Martin Mosnier

Mis à jour 23/03/2023 à 10:24 GMT+1

QUALIFICATIONS EURO 2024 – Mardi à Clairefontaine, Ibrahima Konaté s'est confié à Eurosport. Révélation des Bleus lors du dernier Mondial, le défenseur central pourrait prendre une place plus importante après la retraite de Raphaël Varane. Il nous explique sa détermination, son immense ambition et revient, non sans amertume, sur l'aventure au Qatar et sa cruelle issue.

Konaté : "Quand je revois l'action de Kolo Muani, j'ai le coeur qui palpite"

Il ne faut jamais se fier aux apparences. Surtout avec Ibrahima Konaté. Loin du terrain, le joueur des Bleus et de Liverpool n'a plus rien de l'effrayant défenseur qui dévore les plus grands attaquants du monde chaque week-end. Solaire, la montagne de muscles ne se départit jamais de son sourire et de sa bonne humeur. Pendant 25 minutes, l'une des révélations bleues du dernier Mondial est revenue pour Eurosport sur son année incroyable et sur les finales perdues en Ligue des champions et en Coupe du monde. Deux revers très durs à digérer. Mais il en faudra beaucoup plus pour effriter la confiance folle que le jeune homme de 23 ans a en lui.
Ibrahima Konaté, une grande partie de la France vous a découvert à la Coupe du monde au Qatar. Alors même que vous n'aviez que deux sélections avant le Mondial, vous avez livré un très bon tournoi. Comment expliquez-vous cette grande confiance en vous ?
I.K. : Je ne sais pas. Peut-être que c'est naturel avec l'expérience accumulée à Liverpool dans les grosses compétitions que j'ai jouées. Ça m'a donné de la confiance tout comme ce groupe avec des individualités très fortes, ça rassure aussi.
Quand vous apprenez que vous serez titulaire face à l'Australie pour votre premier match en Coupe du monde, vous ressentez une forme de panique ou est-ce juste une journée de travail comme une autre ?
I.K. : (Rires) La panique, non, je ne dirais pas ça. La panique totale, je ne l'ai ressentie qu'une fois : lors de mon premier match professionnel avec Sochaux contre Monaco. Au Qatar, il y avait une pression mais une pression que j'aime. Je me dis : "Ok, Coupe du monde, premier match, c'est un rêve qui devient réalité : allez, let's go." Ça ne m'inhibe pas.
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L'intensité d'Ibrahima Konaté lors de Tunisie - France, lors de la Coupe du monde au Qatar, le 30 novembre 2022

Crédit: Getty Images

On a l'impression que c'est la force de cette génération : ne jamais douter, être sûr de sa force et foncer.
I.K. C'est clair. C'est notre détermination, l'envie dans les entraînements et les matches. Ça nous donne cette confiance qu'on a et c'est magnifique. Notre génération a joué dans de grands clubs, très tôt. A notre âge, on est déjà un peu habitués. On a cette mentalité : rien ne nous impressionne. On veut tout rafler. C'est ce qui nous anime.
Ceux qui ont douté de Dayot et moi n'ont jamais joué au foot
Hugo Lloris, Raphaël Varane, Steve Mandanda et Karim Benzema sont partis. Il n'y a plus que quatre champions du monde dans la liste. On a l'impression que votre génération a pris le pouvoir en ce mois de mars.
I.K : Ça fait plaisir, j'espère que ça va continuer. On n'est pas là par hasard. On a la chance de jouer dans les meilleurs clubs du monde, d'y être performants et donc d'être sélectionnés. Je ne parlerais pas de prise de pouvoir. Disons qu'on commence à s'installer petit à petit. Mais c'est toujours comme ça. La génération Pogba, celle de Lloris ou Mandanda, ça s'est fait naturellement aussi.
Pour revenir sur la Coupe du monde, il y avait tout de même de quoi se poser des questions sur votre association avec Dayot Upamecano. Avant le Mondial, vous ne cumuliez que 9 sélections à vous deux et…
I.K. : (Il coupe) Ceux qui doutaient de nous n'avaient jamais joué au foot. Les gens peuvent douter, nous, on est sur le terrain et on sait. On peut lire les messages sur le manque d'expérience… Mais c'est quoi l'expérience dans le foot ? Accumuler les matches à haute pression, on a fait déjà. Ajoutez-y notre détermination générationnelle si je puis dire… Les doutes des autres, ça nous rend plus fort aussi. Donc merci à ceux qui doutent et aujourd'hui, on a eu plaisir à leur donner tort. Ce n'est que le début, j'espère.
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Konaté : "Ceux qui ont douté de Dayot et moi n'ont jamais joué au foot"

D'où vous vient cette confiance en vous ? A-t-elle grandi au fil de votre carrière ou fait-elle partie de vous depuis toujours ?
I.K : Je savais que j'arriverais là où je suis aujourd'hui mais, aussi vite, je ne pensais pas, honnêtement. Au centre de formation, je m'imaginais encore à Sochaux ou en Ligue 1 à 23 ans, pas à Liverpool. J'imaginais arriver en équipe de France vers 26 ou 27 ans. Mais je me donne de grands objectifs. Immenses même. Je ne peux pas les énumérer, ils sont trop grands…
Devenir le meilleur du monde à mon poste
Essayez quand même…
I.K. : Tout gagner, bien sûr. Mais aussi devenir l'un des meilleurs centraux du monde. Voire le meilleur à mon poste. Je les mets tellement haut que si je ne les atteins pas, j'aurai quand même atteint un très grand niveau.
Un de vos objectifs est sans doute de devenir titulaire indiscutable en sélection. La retraite de Raphaël Varane libère une place en défense centrale. Au Qatar, quand Varane était indisponible, vous étiez le premier recours. Est-ce que vous abordez ce rendez-vous de mars dans la peau d'un titulaire ?
I.K. : J'arrive avec cet objectif-là mais comme tous les défenseurs. Ils doivent l'avoir. Ce n'est pas parce que Varane a pris sa retraite que je suis dans le "mood" : "Ah, il y a une place à prendre, peut-être que ça va être moi.." Pas du tout. Regardez le vivier à mon poste, c'est exceptionnel. En club, mes coéquipiers me disent tout le temps : "Ce joueur est français lui aussi ? Mais c'est beaucoup trop pour votre équipe !" Et ça, ça me fait plaisir parce qu'on est dans une concurrence permanente. Aucun défenseur ne peut considérer sa place comme acquise.
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MADRID, SPAIN - MARCH 15: Virgil van Dijk of Liverpool FC discusses with team mate Ibrahima Konate during the UEFA Champions League round of 16 leg two match between Real Madrid and Liverpool FC at Estadio Santiago Bernabeu on March 15, 2023 in Madrid, Sp

Crédit: Getty Images

Vos performances en Coupe du monde vous donnent tout de même une légitimité en plus sur certains.
I.K. : Non. Cette légitimité, je suis allé la chercher avec mes performances. Mais ça ne veut rien dire. Je me remets en question à chaque fois.
Avec Dayot Upamecano, votre charnière a rayonné à Doha. Pourquoi ça a l'air si simple ?
I.K. : C'est le vécu commun. Quand on a joué avec quelqu'un pendant quatre ans (ndlr : à Leipzig), côte à côte, il y a des automatismes. On n'a plus besoin de parler, on sait directement ce que l'autre va faire ou ne pas faire. C'est ce qui a construit notre complicité.
Après Blanc - Desailly, Varane - Umtiti, c'est l'heure de la charnière Upamecano - Konaté ?
I.K. : (Rires) C'est le coach qui va décider. C'est à nous de faire ce qu'on doit faire. Mais il y a tellement d'autres défenseurs, je les aime tous. Ça va être une concurrence loyale. Bien sûr que je serais déçu si c'était un autre joueur mais, vraiment, je serais heureux pour lui.
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Konaté : "Mbappé arrogant ? Vous êtes des fous ou quoi, il est trop gentil"

Quand je revois l'action de Kolo Muani, j'ai le cœur qui palpite
On ne veut pas remuer le couteau dans la plaie mais vous êtes le seul à avoir perdu la dernière finale de Ligue des champions et celle de la Coupe du monde. Vous dormez bien la nuit ?
I.K. (Rires) Franchement, après ces deux matches-là, j'ai eu du mal à dormir les jours qui suivaient. Ça fait mal quand j'y repense. Mais je me dis, aujourd'hui, que je vais tout faire pour les gagner un jour. Et quand je les aurai gagnés, l'histoire sera très belle à raconter à la fin que ce soit à vous, les journalistes, ou à mes futurs enfants. Je leur dirai que, oui, j'ai perdu deux matches importants mais je suis parvenu à les gagner par la suite. L'histoire sera encore plus belle.
En toute honnêteté, est-ce que ça se digère une défaite en finale…
I.K. : (Il coupe) Non. Non. Ligue des champions, ça va, on peut digérer. Mais Coupe du monde, ça ne passe pas. En vrai de vrai, ça ne passe pas.
Est-ce qu'il vous arrive de vous réveiller en sueur en repensant à la frappe de Kolo Muani et à votre passe qui aurait pu être décisive ?
I.K. : Quand je la revois sur les réseaux, j'ai le cœur qui palpite comme si j'étais en plein match et qu'il avait encore la possibilité de marquer. C'est dur, c'est dur.
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Randal Kolo Muani

Crédit: Getty Images

Vous vous refaites régulièrement le film de ces deux matches ?
I.K. : La chance que j'ai, c'est que j'ai zéro regret. Quand je refais le scénario du match contre le Real Madrid, je me dis : "Qu'est-ce que j'aurais pu faire de plus ?" Bah, rien du tout. La finale de la Coupe du monde, j'ai quelques minutes précieuses et je me dis aussi : "Qu'est-ce que j'aurais pu faire de plus ?" Et je ne vois pas. Je n'ai pas de regret. J'ai des regrets pour l'équipe mais pas de regrets personnels.
Vous qui les côtoyez, il va falloir vous mouiller. C'est qui le plus fort : Upamecano ou van Dijk ?
I.K. : (Eclats de rires) C'est quoi cette question ? On ne peut pas comparer les deux. Avec Upamecano, on est dans la même catégorie même si c'est un concurrent très élevé. Mais van Dijk, je le mets sur une autre planète. On est encore loin d'avoir atteint ce qu'il a fait. Même si on y arrivera un jour, je n'en doute pas.
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Konaté : "Van Dijk, je le mets sur une autre planète"

Van Dijk a une telle facilité à défendre…
Qu'est-ce que vous avez appris aux côtés de van Dijk ?
I.K. : Le leadership, il a une telle facilité à défendre sur certains joueurs. Il a sa technique propre à lui, elle est incroyable. Sa détermination, sa hargne… Il a une aura sur le terrain, on la ressent toujours. C'est une chance exceptionnelle de jouer avec lui. Mais je dois aussi voir ma carrière et ne pas tout le temps le regarder en tant que fan.
Quels sont vos objectifs à long terme avec Liverpool, vous aimeriez vous inscrire dans la durée avec les Reds ?
I.K. : Bien sûr. Quand on joue à Liverpool, la question honnêtement c'est : "Où est-ce que je peux aller après ?" Et pour durer dans ce club, il faut performer. Mon objectif : faire partie des cadres à court et long terme, et gagner bien sûr tous les titres.
Vous avez vécu trois matches historiques en moins d'un an : les deux finales perdues mais aussi ce 7-0 incroyable face à Manchester United…
I.K. : J'avoue que c'est un score exceptionnel. Mais 24 heures après la victoire, je l'avais complètement oubliée. J'étais focus sur le match de Madrid (ndlr : le 8e de finale retour de Ligue des champions). Je n'avais que ça en tête. C'est pourtant un succès historique, dingue mais je suis vite passé à autre chose.
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Liverpool - Manchester United s'est conclu sur un score improbable de 7-0

Crédit: Getty Images

Malgré cette victoire, Liverpool vit une saison plus compliquée. Comment l'expliquez-vous ?
I.K. : On va l'avouer : cette saison est plus compliquée pour nous tous, pour l'ensemble du club. Les raisons, personne n'est mieux placé pour en parler que le coach. On a eu la malchance d'avoir beaucoup de blessés comme moi en début de saison, peut-être qu'on manquait d'effectif, que la charge de travail était intense et c'est devenu compliqué. Mais la saison n'est pas finie.
Quand on regarde votre carrière, on a justement l'impression que seules les blessures ont empêché votre éclosion encore plus précoce.
I.K. : Bien sûr. C'est la seule chose qui m'a un peu retardé. Honnêtement, je me dis souvent : "Ah si je n'avais pas eu ce pépin-là…" Ça fait partie du foot, on apprend. Toujours.
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