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Les Mavericks du Pays de Galles

Philippe Auclair

Mis à jour 06/07/2016 à 18:23 GMT+2

EURO 2016 – Beaucoup de joueurs du Pays de Galles ont une histoire liée à l'Angleterre. Leur ferveur autour du drapeau gallois n'en est que plus frappante.

La joie des joueurs gallois face à la Belgique

Crédit: Panoramic

A les entendre beugler Hen Wlad Fy Nhadau (‘La Terre Ancienne de mes Ancêtres’) avant chaque match, on croirait que tous ont vu le jour dans les vallées, nourris au sein d’une mère leur chantant des berceuses en gallois, descendants en ligne directe de Saint David, le sang bouillant de la fièvre des patriotes. Mais neuf d’entre eux, de cette “bande de frangins” sont en fait nés de l’autre côté de la digue d’Offa, une tranchée creusée au huitième siècle de notre ère pour protéger la future Angleterre des incursions des guerriers gallois, dont le tracé correspond presque exactement avec celui de la frontière entre les deux pays, treize cents ans plus tard.
Certains des joueurs de Chris Coleman (Sam Vokes, troisième buteur contre la Belgique, par exemple) ignoraient d’ailleurs tout de leurs racines avant que le rabatteur en chef de la principauté, Brian Flynn, ne s’intéresse à leurs cas, parfois seulement guidé par la consonance d’un nom de famille.
C’est ainsi qu’Ashley Williams, le capitaine des Dragons, reçut la visite de Flynn il y a neuf ans de cela, par hasard, pourrait-on dire, car ce n’était pas Williams que le scout était venu superviser à Stockport County, mais un de ses coéquipiers d’alors et de maintenant, le gardien Wayne Hennessey, originaire de Bangor. Un pur Gallois, celui-là, d’ailleurs cousin d’un ancien international de la Principauté des années 1970, Terry Hennessey. Mais la curiosité de Flynn avait été éveillée par ce nom: Williams. Williams….Williams, comme JPR, Gareth, Shane, Rhys, Martyn, et probablement une vingtaine d’autres à avoir porté le maillot du XV gallois...se pourrait-il que..?
Renseignements pris, ce Williams-là venait des Midlands, un Black Country boy par excellence, né dans la banlieue de Wolverhampton, qui avait même servi de ball-boy dans un match de l’équipe d’Angleterre quand il était petit garçon, contre la Moldavie, et à Wembley de surcroît. Heureusement, la maman d’Ashley, Lyn, était issue d’une famille bien galloise celle-là, les Rowlands. Un grand-parent? That’ll do nicely. “Tu sais que tu pourrais avoir une cape avec nous si tu voulais?”, glissa Flynn au défenseur central, qui en a désormais soixante-quatre, autant que Ryan Giggs, et seulement deux de moins que Flynn en personne, avant d’affronter le Portugal. Comme quoi la voix du coeur peut parler plus haut, et plus juste, que celle du sang.
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Ashley Williams (Pays de Galles)

Crédit: Panoramic

Hal Robson-Kanu, l’homme qui ‘cruyffa’ (c’est le verbe qu’il utilisa lui-même) les Belges de si belle façon la semaine dernière est quant à lui né à Acton, dans l’ouest de Londres, et passa une grande partie de son enfance dans le presbytère de l’église de St Mary Abbots, l’une des paroisses les plus chic de la capitale, à cent mètres de Kensington High Street; son grand-père Ian Leonard Robson, aujourd’hui retraité, en était le pasteur. Je me souviens y croiser la princesse de Galles. Mick Jagger y fit baptiser ses enfants – par le révérend Robson, évidemment. Là aussi, un grand-parent aura suffi – mais seulement après que Hal avait joué pour les U19 et U20 anglais. Mieux vaut très tard…
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Robson-Kanu (pays de Galles)

Crédit: AFP

Pour Neil Taylor, par contre, la question de qui il représenterait si l’opportunité s’en présentait un jour ne s’était jamais posée. C’est qu’elle ne peut pas se poser quand on est né à St Asaph, au nord de la principauté, l’une des plus petites cities du Royaume-Uni, où la langue parlée dans les foyers reste le gallois. Pourtant, si le nom, Taylor, sent bon le Pays de Galles, Neil, lui, a des origines plus complexes – mais en tous points typiques de l’extraordinaire capacité de ce pays à se métisser et à y puiser une part de son identité. C’est le cas depuis des siècles: Cardiff accueillit une communauté afro-antillaise dès le XVIIème siècle.
La mère de Neil Taylor, Shibani Chakraborty, est une Bengalie qui a vu le jour à Calcutta, ce qui fait de son fils le seul footballeur d’origine ‘asiatique’ (un terme qui, au Royaume-Uni, désigne spécifiquement les personnes originaires du sous-continent indien, à savoir Inde, Pakistan, Bangladesh et Sri Lanka) à exercer son métier en Premier League. De fait, seuls deux autres ‘Asiatiques’ – Danny Batth des Wolves et Malvind Benning, de Mansfield Town – sont titulaires dans l’un des quatre-vingt-douze clubs professionnels anglais, alors que cette communauté représente 5,3% de la population de l’Angleterre et du Pays de Galles. En d’autres mots, Taylor est un héros, et pas seulement pour les supporters des Dragons.
Aussi, quand vous verrez et entendrez cette équipe arc-en-ciel beugler son hymne mercredi soir, songez à ce que cette communion représente: l’attachement à un drapeau vaut tout autant, et pour moi, encore plus, lorsqu’il est le résultat d’un choix assumé jusqu’au bout. Le Pays de Galles a gagné son Euro depuis longtemps.
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Ashley Williams célèbre son but face à la Belgique

Crédit: AFP

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