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Il y a vingt ans, jour de C1, le 11 septembre 2001 : "Je me réveille et je vois un avion qui fonce dans une tour"

Maxime Dupuis

Mis à jour 11/09/2021 à 09:42 GMT+2

11 SEPTEMBRE 2001 - Il y a vingt ans, jour pour jour, les attentats terroristes du 11 septembre frappaient l’Amérique et sidéraient le monde entier. Le soir-même, Nantes faisait son entrée en lice en Ligue des champions face au PSV Eindhoven. Récit d’une journée pas comme les autres et que personne n’a pu oublier dans les rangs des Canaris.

Le 11 septembre 2001, une minute de silence avant Nantes - PSV

Crédit: Getty Images

Le XXIe siècle a vu le jour un 11 septembre. En 2001, pour être tout à fait précis. Ce 11 septembre-là, dont on commémore aujourd’hui les vingt ans, fait partie de ces tranches de vie dont on se souvient à jamais. Chacun sait ce qu’il faisait, où il se trouvait, à l’heure précise où le fracas s’est abattu sur le monde et que la réalité a dépassé la fiction. Quand le World Trade Center a été éventré par deux avions de ligne détournés par des terroristes, qui avaient pour ambition (accomplie) d’engendrer le chaos.
En 2001, l’époque n’était pas encore celle de la prolifération incontrôlée de l’information. Les réseaux sociaux n’avaient pas encore vu le jour mais la télévision vivait la fin de son âge d’or et possédait encore le quasi-monopole de l’image. Et c’est par la petite lucarne que le monde avait vu la planète arrêter de tourner ce mardi-là. Impossible de passer à côté. Aucune bulle n’était assez imperméable pour se tenir à l’écart des événements de ce 11 septembre-là. Les footballeurs du FC Nantes - alors Atlantique - peuvent en témoigner.
Ce jour-là, les frais champions de France devaient débuter leur campagne de Ligue des champions face au PSV Eindhoven. C’est dans le calme et la volupté de leur mise au vert qu’ils ont pris connaissance du drame qui se nouait de l’autre côté de l’Atlantique, à New York, à Washington et puis dans un champ de Pennsylvanie.
Décalage horaire et vie de footballeur oblige, les Nantais étaient à la sieste quand le vol 11 d’American Airlines, parti de Boston, s’est encastré dans la tour nord du World Trade Center. 8h46 à New York. 14h46 à Nantes.
Un mauvais film catastrophe sous les yeux
“Je me réveille de la sieste et j’allume machinalement la télévision. Comme j’ai l’habitude de faire, se souvient Olivier Quint, arrivé cet été-là en provenance de Sedan pour renforcer les champions de France. Et là, je vois un avion qui fonce dans une tour. Je me dis ‘dis donc, ils font de sacrés effets spéciaux maintenant sur les films du mardi après-midi’. Je ne sais plus quelle chaîne c’était. Je me rends compte assez rapidement quand même que ce n’est pas un film parce que je monte le son et j’apprends ce qu’il se passe avec stupeur”.
Autre chambre, celle du néo-international et vainqueur de la Coupe des Confédérations, Nicolas Gillet. Même réaction abasourdie : “Après déjeuner, on part à la sieste avant la causerie et la collation de 16h30. On se réveille et on allume la télévision machinalement. PPDA était à l’antenne. En arrière-plan, il y a les tours en feu. On met le son et on écoute ce qu’il se passe. Le truc est un peu surréaliste. Patrick Poivre d'Arvor est en train de raconter ce qu’il savait, il parle du premier avion qui a foncé sur la première tour et là, on voit le deuxième avion propulsé dans l’autre tour. C’est un mauvais film catastrophe que l’on a sous les yeux. Je crois qu’on a du mal à se rendre compte de ce qu’il se passe et de la portée de l’événement. Et puis, on voit la première tour qui s’effondre…”
Commence alors un après-midi aux atours surréalistes. Parce que le sujet occupe toutes les conversations, hormis celle de Raynald Denoueix, lors de la traditionnelle causerie. Tant bien que mal, l'entraîneur tente de faire abstraction. Mais les joueurs, eux, en parlent, ici et là. “On ne parle que de ça jusqu’au match. Pendant la causerie du coach, on était tous préoccupés. Honnêtement, à un moment, je me disais qu’on n’allait pas jouer. Que ce n’était pas possible, se souvient encore Gillet. On a les retours au fur et à mesure et on voit que c’est terrifiant. Il savait qu’on était tous préoccupés, on est retourné dans notre chambre pour prendre des informations”.
L’incertitude plane sur la tenue de la rencontre et des autres matches de la soirée. En 2021, avec l’émotion qui se serait répandue avec encore de plus de force et d’écho via les réseaux sociaux, Olivier Quint est à peu près certain que Nantes et le PSV auraient remis leur duel à plus tard : “Le match aurait été remis directement. Ce que j’aurais compris…” Là, il n’en sera rien. L’UEFA est, comme le reste du monde, confronté à un événement qui dépasse l’entendement et dont la portée, immense, ne peut être complètement saisie à l’instant T.
Je pense que le match n’aurait pas dû être joué
Gerhard Aigner, alors directeur général de l’institution continentale, annonce dans un communiqué que les matches du lendemain sont remis. Ceux du soir seront disputés, avec une minute de silence pour honorer les victimes, dont on apprendra bien des mois plus tard qu’elles sont au nombre de 2977. Seule la soirée du mercredi, avec Barcelone - Lyon, est reportée au mois suivant. “Je pense que le match n’aurait pas dû être joué, si l’on est factuel, pense Gillet. Mais il y a d’autres paramètres qui ont poussé l’UEFA à maintenir les matches du soir.”
Puisqu’il faudra jouer, les Nantais le feront. Ils essayent, tant bien que mal, de se concentrer sur cette drôle d’entrée en lice, alors que FCNA a démarré la saison on ne peut plus mal : après cinq journées, les champions sont derniers. Les festivités du titre, George Eo qui chante “Allumer le feu” au cœur de la Beaujoire, tout cela semble bien loin. Surtout un jour comme celui-là. “On en parle entre nous, c’est un truc de dingue. J’ai encore vu des images cette semaine, c’est hallucinant, martèle Quint. On reste quand même dans notre bulle, on se concentre sur le match que l’on doit jouer, même si on n' est pas encore complètement sûr. C’était un peu égoïste de notre part mais on avait envie de jouer. C’était mon premier match en C1, on était pas bien en championnat et il nous fallait un match référence. C’était la Ligue des champions. On a appris après coup que le PSV ne voulait pas jouer.”
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Olivier Quint lors du match face au PSV

Crédit: Getty Images

Si elle en avait envie, l’équipe de Gerets, menée 3-0 à la pause, puis battue 4-1 au final, n’en a montré aucun signe patent et le soulignera devant les micros, par la voix de son entraîneur belge. “Peut-être que le PSV a fait un non-match parce qu’il n’était pas à la hauteur, simplement”, s’interroge Olivier Quint. Les Nantais l’ont été. Et bien au-delà. “On savait que les Néerlandais ne voulaient pas jouer. Nous, on était là, entre deux. S’il fallait jouer, on jouerait… On ne pouvait pas décider. Plus ça approchait, plus on en savait sur les événements qui s’étaient déroulés à New York, même si on ne savait pas tout. On avait compris qu’il y avait une possibilité pour que le match ne se joue pas mais on devait quand même se préparer si jamais… Pas le choix. C’était notre boulot, explique Gillet. Je me souviens qu’on s’est réuni durant l’échauffement, on avait tous ça en tête. C’était surréaliste ce qu'on avait vu l'après-midi. On se disait : ‘ce n’est pas réel, c’est un mauvais film’.”
La Beaujoire est pleine à craquer. Nantes, privé de C1 depuis la formidable aventure de 1996 (demi-finale), réussit son entrée en lice et en montre plus en 90 minutes de C1 qu’en un mois de L1. La victoire, oui. La fête, non. Juste une parenthèse. “Ce n’était pas une soirée normale, appuie Olivier Quint. A la fin du match, la première chose qui venait à la bouche des gens étaient pour les événements qui s'étaient déroulés aux Etats-Unis. Amis, proches, spectateurs… La première chose que j’ai faite en rentrant, c’est allumer la radio pour avoir des informations. On a essayé de faire en sorte que ça se passe normalement. Mais ça ne pouvait pas être le cas.”
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