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Tube de l’été, zappé en fin d’année : faut-il s’inquiéter pour Imbula ?

Nicolas Vilas

Mis à jour 30/12/2015 à 22:54 GMT+1

Au terme d’une première partie de saison aussi contrariante que contrariée, Giannelli Imbula est devenu sujet à discussion à Porto. Faut-il donc s’inquiéter pour la recrue la plus chère de l’histoire du foot portugais ?

Giannelli Imbula connaît une adaptation difficile avec le FC Porto

Crédit: AFP

Mardi soir, Giannelli Imbula a rejoué. Enfin. Pour la dernière sortie du FC Porto de l’année 2015, le milieu de terrain de 23 ans a été lancé à la pause pour tenter de faire basculer la seconde période de la rencontre de Coupe de la Ligue face au Maritimo. Résultat : une défaite (1-3). La première à domicile contre la formation de Madère. Imbula n’a pas de quoi sourire. La titularisation le fuit depuis le 9 décembre et cette autre déroute, en Ligue des champions face à Chelsea (0-2) ; ce coup de Blues pour les "Azuis e brancos" reversés en Ligue Europa.
Bien que leader de son championnat à la trêve, son entraîneur, Julen Lopetegui, a les oreilles qui sifflent. L’international Espoirs français incarne ce malaise. Deux passes décisives (Maritimo, 1-1, en Liga ; Varzim, 2-0, Coupe du Portugal), aucun but en 17 matches (1085 minutes). Il n’a plus marqué depuis le 28 septembre 2014 (2-1 contre Saint-Etienne). Mais est-il là pour faire gonfler ces (ses) stats ?
Ecarté de cinq des huit derniers matches par le technicien espagnol, il peine à s'intégrer. A 23 piges, le franco-belgo-congolais doit jongler avec la concurrence, le turn-over, le poids et les circonstances de son transfert.

Une étiquette lourde à porter

Le 1er juillet dernier, le jeune Giannelli effectuait une arrivée enflammée stade du Dragon. Le FC Porto a aligné 20 millions d’euros pour s’offrir le milieu de Marseille. Une somme jusqu’alors jamais atteinte pour une recrue en Liga portugaise. Des chiffres presque anachroniques tant la situation économique des clubs portugais inquiète. Le passif du FCP a augmenté de plus de 40 millions d’euros en 2014-2015 et dépasse les 275 millions d’euros. Et alors que ses rivaux lisboètes semblent opter pour la retenue, Porto explose des records.
Outre cet achat, il y a les émoluments du joueur (plus d’un million d’euros par an) et surtout ceux d’Iker (5 millions). "Le FC Porto a payé 20 millions pour Imbula et un salaire incroyable à Casillas, commentait José Mourinho au Guardian, l’été dernier. Le football contrarie n’importe quelle situation." En glissant une petite "dédicace" à Casillas, le Mou a aussi plongé Imbula dans le dur… Le natif de Vivorde atterrit à coups de millions à un moment de haute frustration. Car le FCP est aussi en déficit de résultats sportifs (aucun titre depuis août 2013).

Une acclimatation difficile

De retour à Porto au cours du dernier mercato, Aly Cissokho a endossé le rôle du grand-frère auprès d’Imbula : "J’ai essayé de lui donner le plus de conseils possibles, de le calmer, parfois, quand il n’était pas dans le groupe. Ce n’est pas facile pour lui. Ça me rappelle mes débuts au Portugal, à Setubal. Il m’avait fallu trois, quatre mois pour m’adapter." Imbula s’est rapproché des francophones de son nouveau vestiaire : Brahimi mais surtout Cissokho et Aboubakar. La langue représente un obstacle certain à son intégration.
Invité sur le plateau de Canal + en octobre, il confiait : "J’ai pris des cours et j’ai arrêté, c’était trop difficile." Des mots qui n’ont pas plu aux socios. Le joueur avait pourtant lui-même effectué la démarche pour trouver une prof de portugais. Au Dragon, depuis qu’Antero Henrique, vice-président du FCP, n’a plus la main sur l’ensemble de la gestion du club, depuis qu’il est en "concurrence" en interne avec Alexandre Pinto da Costa (fils du président et proche de Doyen Sports), chaque partie gère ses propres dossiers et les détails qui vont avec. Et Imbula est une recrue de Doyen.
Son aveu aurait-il été mal interprété ? Une maladresse de communication plus qu’un signe de mépris ? Probablement. "Il est très détaché, décrit son ex-coéquipier à Guingamp Charly Charrier. Ceux qui ne le connaissent pas peuvent prendre ça pour de la prétention mais il est comme ça. Un peu perché, parfois. Je me souviens que lorsqu’il reçoit son trophée de meilleur joueur de Ligue 2 en 2013, le coach (Jocelyn Gourvennec) nous demande de venir en costume à la mairie. On enfile donc tous le costard et lui arrive en survêt. Ce n’était pas de la provoc, ni un manque de respect, c’est juste qu’il est comme ça."

Cissokho : "Au final, tout le monde est frustré"

La récente sortie du papa-agent Willy Ndangi ("Le coach n’a rien compris aux qualités de Giannelli") sur francefootball.fr en témoigne : la liaison entre le joueur et son entraîneur semble brouillée. "Giannelli ne parle pas portugais, Lopetegui donne ses consignes en espagnol et ne parle pas beaucoup aux joueurs, constate Cissokho. Il n’est pas du genre à expliquer ses décisions. En tant que joueur il faut le respecter mais quand on ne comprend pas ce qui se dit, ce n’est pas facile..."
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Le cas Imbula est au coeur des révélations de Football Leaks

Crédit: Panoramic

"Giannelli pensait poursuivre sur la belle lancée qu’il avait avec l’OM, poursuit l’international français, rappelé cet hiver par Rémi Garde à Aston Villa. Pour ça, Porto a payé le prix fort. Au final, tout le monde est un peu frustré. Giannelli doit continuer de travailler mais il a besoin de la confiance du coach."
Il est aussi question de son positionnement. Beaucoup s’inquiètent de ses stats mais "il n’est pas du tout un 10 mais un 6-8, rappelle celui qui l’a lancé à l’EAG, Victor Zvunka. Son rendement va beaucoup dépendre du système, de l’équipe. Il ne faut pas non plus oublier qu’il y a encore trois ans il évoluait en Ligue 2." Lope doit gérer le statut particulier de sa si "chère" recrue. "Parfois, son cas me fait penser à celui de Stéphane Dalmat que j’avais eu à Châteauroux, souffle Zvunka. Il avait été recruté très cher, on en faisait un numéro 10. Alors que moi j’essayais de le gérer."

En retard sur la concurrence, en avance sur son temps ?

Imbula subit le turn-over imposé par le technicien basque qui envoie : "Nous avons beaucoup de joueurs à ce poste et il va devoir attendre." Rolando, qui s’est croisé avec le Français entre Porto et Marseille, constate : "En plus d’Imbula, Porto compte des joueurs comme Danilo, Ruben Neves, André André, Herrera… Tous ces milieux de terrain sont internationaux A." Tous, sauf Imbula.
L’ancien capitaine des Dragons le sait : "Il y aura toujours la question de son prix. C’était la même avec Danilo (aujourd’hui au Real Madrid), ou Hulk. Mais il faut aussi du temps pour prouver ce pourquoi on a été recruté. Le football demande du temps pour qu’on s’adapte au style de l’équipe, à la ville, à la langue, au pays…"
Comparé aux plus grosses acquisitions de l’histoire du FCP, Imbula semble même avoir de l’avance. Mis à part l’incroyable cas du futur-ex-Olympien Lucho (titulaire sur les 40 matches de sa saison 2005-2006), aucune recrue ayant coûté plus de 10 millions d’euros au FC Porto n’avait été autant de fois titulaire au cours de ses six premiers mois ; y compris en Coupe d’Europe (4). La preuve qu’Imbula est un élément à exposer. Et ni Rolando, ni Cissokho n’ont de doutes quant à "ses qualités."
Le bilan après six mois des recrues les plus chères du FC Porto :
Matches disputésEn Coupes d'Europe
Imbula (20 millions d'euros)17 (13 titularisations)5 (4)
Hulk (19 millions)21 (9)6 (2)
Danilo (17,8 millions)8 (4)1 (1)
James (13,5 millions)6 (3)1 (0)
Adrian (11 millions)12 (7)5 (2)
Corona (12,5 millions)15 (10)4 (2)
Lucho (10,25 millions)23 (23)6 (6)

Les plans contrariés de Doyen Sports

Derrière cette transaction historique œuvre Doyen Sports. Le fond d’investissements basé à Malte a "mis un peu de sous pour que la transaction se fasse", a confié en juillet Willy Ndangi au Journal du dimanche. Football Leaks a publié un document (non signé) indiquant que si le FC Porto était propriétaire à 100% des droits économiques du joueur, une future vente entraînerait une répartition de ces droits entre le club (50%, FC Porto), "le manager" (25%, Vela Nélio Lucas, représentant de Vela ML qui est le CEO de Doyen) et "l’investisseur" (25%, identité inconnue). Imbula est ainsi lié à ce mystérieux fond et à tout ce qu’il génère comme fantasmes, pour les uns, et cauchemars, pour les autres. Et cela à l’heure où Doyen a porté aux tribunaux l’interdiction de la TPO imposée par la FIFA.
Le jeune joueur s’est d’abord retrouvé à Porto par défaut. Alors que tout était bouclé avec l’Inter Milan, Geoffrey Kondogbia est venu contrarier les plans de Doyen. Le Marseillais est placé au FCP avec un destin tout tracé : l’AC Milan. Doyen Sports avait été choisi, en mai, par Bee Taechaubol pour mener sa politique sportive. Mais le Thaïlandais n’a toujours pas officialisé le rachat du club. La possibilité d’un prêt chez les Rossoneri, adossé d’une option d’achat (une info indiquant une somme 30 millions d’euros est arrivée jusqu’à nous) serait à l’étude mais toujours suspendue à l’injection des millions de Mister Bee. Nélio Lucas, CEO de Doyen et Imbula sont tributaires de ce possible rachat et des choix de Lopetegui.
Doyen active ses réseaux. Et qu’on ne s’offusque pas qu’à peine arrivé on s’interroge sur sa destinée. La Liga portugaise a toujours assumé son statut de championnat intermédiaire. Compte-tenu de sa réalité économique (sponsors, droits télé, billetterie) sa survie est plus que liée aux ventes en transferts. Et Giannelli Imbula est encore dans les temps pour devenir un coup.
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