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Crise en Ligue 1 : de Rennes à Marseille, les clubs inégaux face à l'onde de choc

Martin Mosnier

Mis à jour 09/04/2020 à 09:58 GMT+2

LIGUE 1 - Si la crise économique touche l'ensemble de la L1, l'onde de choc ne sera pas la même à Saint-Etienne et à Nice. La fortune des propriétaires, la gestion des derniers exercices ou le business model exposent à des degrés variables les vingt clubs de l'élite. Et pour certains, la secousse s'annonce terrible.

McCourt, le propriétaire de l'OM

Crédit: Getty Images

Quels que soient la place dans l'histoire, la place au classement, l'état des finances, chaque club de Ligue 1 va subir une déflagration majeure suite à la pandémie du nouveau coronavirus qui a suspendu le championnat jusqu'à nouvel ordre. Personne ne sera épargné, c'est une première certitude. Voilà pourquoi le foot français dans son ensemble cherche des solutions à court et moyen terme. Mais les risques ne sont évidemment pas répartis à l'identique. Chaque propriétaire a les reins plus ou moins solides et chaque club a développé son propre business plan.
S'il est impossible, par définition, de connaître aujourd'hui le réel impact de cette crise sur les finances de chacun des clubs de l'élite, l'identité de leur propriétaire et la stratégie empruntée par chacun d'entre eux ces derniers mois exposent chaque club à des degrés variables. Les recettes des clubs de Ligue 1 se reposent sur deux piliers fondamentaux : les droits TV, qui représentent près de la moitié des recettes des clubs français en moyenne (et parfois beaucoup plus), et la vente de joueurs. Le mercato n'est pas seulement un moyen de boucler le budget.
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Caïazzo sur la possible annulation de la L1 : "Ça pourrait envoyer un tiers des clubs en faillite"

Bordeaux et Monaco : mêmes problèmes, pas les mêmes risques

Pour certaines formations, qui ont fait du trading la pierre angulaire de leur politique économique, il s'agit même de leur raison d'être. C'est le cas de Monaco qui a récolté 155 millions d'euros en trading lors du dernier exercice, Bordeaux, Lille et Amiens. Quatre clubs qui seront les premières victimes du mercato atone qui s'annonce. Les clubs auront moins de recettes, la demande va baisser et les prix s'effondrer. Un jeu de dominos aux effets terribles pour la L1, principale pourvoyeuse de talents des grands championnats européens.
Mais entre Monaco et Bordeaux, les conséquences ne seront certainement pas les mêmes. La fortune de Dimitri Rybolovlev pourrait être un formidable amortisseur des finances de l'ASM mais le propriétaire russe, qui a perdu beaucoup d'argent dans un divorce coûteux, a-t-il seulement l'intention de mettre la main au porte-monnaie ? Pour les Girondins, l'équation est plus complexe encore. Le fonds d'investissement auquel ils appartiennent ne s'attachera pas à ses activités non-rentables. Bordeaux a dû essuyer 47 millions de pertes entre 2018 et 2019. Sans recettes mercato cet été, le déficit se creusera irrémédiablement.
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Les recrues de l'AS Monaco présentées à Louis-II le 21 août 2019.

Crédit: Getty Images

Rennes, Nice, Paris : un avantage certain

L'OM est dans une situation semblable. Bonnet d'âne de l'élite la saison dernière avec des pertes de 91,5 millions d'euros, Marseille se devait de vendre cet été pour rentrer dans les clous du fair-play financier. Mais le FPF n'est plus le sujet le plus urgent. Voilà bien longtemps que Frank McCourt ne comble plus les trous et les questions autour de son engagement à Marseille trouvent un peu plus d'écho avec cette crise.
Du côté de Lille et de son propriétaire, Gérard Lopez, qui accusait un déficit de 92,5 millions d'euros hors mutation de joueurs lors du précédent exercice, on se veut pourtant plutôt optimiste : "A long terme, je ne crois pas à cette baisse sur le marché des transferts", témoigne-t-il dans L'Equipe. "Il faudra un marché pour s'adapter mais le truc va s'équilibrer rapidement." Comme Monaco, Rennes, Nice et, bien sûr, le PSG appartiennent à des propriétaires aux fortunes extravagantes. Si ces quatre clubs ressentiront, comme tout le monde, de grosses turbulences, les effets de la crise devraient être plus tranquillement amortis.
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Francois Pinault porte la Coupe de France 2019 avec son fils Francois-Henri, 2019

Crédit: Getty Images

Thuilot : "L'ASSE n'est pas morte mais…"

"Je ne suis pas très inquiet pour Rennes", nous renseigne Luc Arrondel, directeur de recherche au CNRS et professeur à la Paris School of Economics. "Le budget du Stade Rennais par rapport à la fortune de la famille Pinault, ce n'est pas grand-chose. Même s'il va perdre de l'argent, quand vous avez sa fortune..." L'OL s'appuie aussi sur trois actionnaires solides (Jean-Michel Aulas, le groupe Pathé et le groupe chinois IDG Europeans Sports) et son modèle économique, le plus vertueux du football français, le protège : "L'OL a cherché à diversifier ses revenus en dehors du foot et il devrait mieux s'en sortir, c'est certain", continue Luc Arrondel.
Le voisin stéphanois aura bien plus de mal à surmonter le tsunami qui s'annonce. Le duo Roland Romeyer - Bernard Caïazzo est à la recherche d'un troisième actionnaire depuis plusieurs mois désormais. Si la gestion raisonnée des finances du club a permis à Saint-Etienne de ne pas perdre d'argent sur les dix dernières années (un cas rarissime en L1), les lourds salaires de l'effectif actuel, l'emprunt contracté pour le mercato 2018, l'incapacité à trouver ce fameux troisième actionnaire et l'exercice catastrophique en cours (l'ASSE est 17e) fragilisent assez clairement le club aux dix titres de champion de France.
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Romeyer et Caïazzo, les deux dirigeants de l'AS Saint-Etienne

Crédit: Getty Images

"L’ASSE était dans une situation de changement de cycle, ce qui signifie que le cycle précédent ne correspondait plus à ce que le club pouvait supporter comme modèle économique", a confié Xavier Thuilot, le directeur de l'ASSE, au Progrès. "Dans ce contexte-là, subir une crise n’est pas facile. L’ASSE n’est pas morte, il ne faut pas délirer, mais la situation est préoccupante." "Les clubs en difficulté doivent sortir de la trésorerie et du remboursement de prêt. Ils vont avoir besoin de liquidités et la crise va les mettre encore plus en difficulté", abonde Luc Arrondel.

Les plus vertueux s’en sortiront le mieux

Parmi les vingt clubs de Ligue 1, il reste les désargentés. Ceux qui se battent avec leurs moyens, souvent dérisoires par rapport aux mastodontes parisiens, lyonnais ou marseillais. On pourrait les imaginer bien plus exposés à la crise actuelle. Mais la suspension des droits télés touchent d'abord les grosses cylindrées plus exposées et donc plus impactées. Amiens, Nîmes et Brest ont déjà touché au moins 90% des sommes auxquelles ils avaient droit cette saison (contre 40% pour le PSG et 39% pour l'OM). La gestion vertueuse depuis plusieurs années dans certaines places plus au moins fortes de la L1 pourrait aussi être une sacrée béquille pour traverser la tempête.
Depuis des années, la famille Nicollin gère Montpellier en bon père de famille. "Si j'ai dix euros, je n'en dépense pas douze", a témoigné Laurent Nicollin dans l'émission Le Club sur Eurosport. "C'est pour cela qu'on a un club qui a toujours eu des résultats positifs en fin de saison et on a un actionnaire (ndlr : le groupe Nicollin qui travaille essentiellement sur les marché public) qui est assez costaud pour nous soutenir (…). On a déjà un équilibre pour la saison prochaine. Mais on n'aura pas de transfert et on restera avec notre effectif ou avec des joueurs libres." Une gestion intelligente qui portera peut-être ses fruits en ces temps troubles. Et si cette terrible crise avait une vertu : rationaliser la gestion des clubs de L1 ?
Avec Cyril MORIN
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Nicollin dans Le Club Eurosport : "Probablement pas de transfert à Montpellier cet été"

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