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La L1 les a manqués d'un rien (ou presque) : Quand Ronaldo avait "une grosse envie de Paris" mais…

Martin Mosnier

Mis à jour 23/04/2020 à 08:04 GMT+2

Entre vraies histoires ou légendes urbaines, le charme du mercato réside aussi dans ces dossiers liant les plus grandes stars du football à notre Ligue 1. Négociations ratées, manque de clairvoyance ou simple malchance, retour sur tous ces grands noms qui auraient pu atterrir dans notre championnat. Troisième épisode ce mercredi avec le PSG, à deux doigts de s'offrir l'immense Ronaldo.

Ronaldo a bien failli s'engager avec le PSG...

Crédit: Eurosport

Le contexte

Le Ronaldo du PSV est le même que celui qui imprimera la mémoire collective, les trophées et les muscles en moins. Ronaldo Luiz de Lima, le vrai Ronaldo, c'est déjà un train de marchandise lancé à pleine vitesse combiné à la dextérité d'un danseur de ballet. Chaque accélération est un coup de poignard. Et sa conduite de balle ne laisse pas la moindre chance à ses gardes du corps déjà sur les talons. Comme à Cruzeiro, le jeune gamin et ses dents du bonheur débarqués à 17 ans à Eindhoven en 1994 font danser les défenses et enfilent les buts comme des perles. Trente en 33 matches lors de sa première saison dans le championnat néerlandais, très loin devant les 18 unités de son premier poursuivant, un certain Patrick Kluivert.
Il a déboulé aux Pays-Bas avec une Coupe du monde sous le bras mais aucune minute passée sur les terrains de la World Cup américaine. A cette époque déjà, le PSG l'a dans ses radars. "Ricardo, qui a fait toute la préparation à la Coupe du monde, et Raï, bien sûr, reviennent des Etats-Unis en me disant qu'ils ont un phénomène de 17 ans qui sait tout faire", nous renseigne Jean-Michel Moutier alors directeur sportif du PSG. Alors pourquoi Paris ne met pas la main dessus dès son départ du Brésil ? "Il y avait des accords entre Philips (ndlr : le club d'Eindhoven est détenu par la firme néerlandaise) et les clubs brésiliens. Tout cela faisait partie d'un plan de carrière comme Romario avant lui. On ne pouvait rien faire."
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Ronaldo sous les couleurs du PSV Eindhoven

Crédit: Getty Images

Ronaldo doit donc être le successeur de la méga-star du moment, Romario, incarnation d'un Brésil sur le toit du monde et tout juste parti du PSV pour le Barça (tiens, tiens…) un an plus tôt. R9 n'est pas encore Il Fenomeno mais son adaptation réussie à l'Europe en fait déjà un phénomène. Seul son corps encore fluet sous son maillot "Philips" beaucoup trop large et sa toison bouclée disparaitront des souvenirs. Sa deuxième saison aux Pays-Bas est moins étincelante. Un problème d'articulation au genou, déjà, l'éloigne des terrains. Il finira son expérience batave avec 55 buts en 57 rencontres.
Paris ne se formalise pas des soucis de santé du Brésilien. A l'été 1996, le PSG compte bien passer à l'action. Il faut dire qu'il a des arguments. Le club de la capitale, qui restait sur trois demi-finales européennes, vient de remporter la Coupe des Coupes, termine deuxième de Division 1 et s'installe, grâce à la puissance de son actionnaire Canal Plus, parmi les équipes qui comptent sur le Vieux Continent. Pas de complexe à nourrir donc vis-à-vis des meilleurs. Patrice Loko, Julio Cesar Dely Valdes et Pascal Nouma se partagent la pointe du onze de Luis Fernandez. Des avant-centres plutôt efficaces mais qui ne dépassent pas les 16 buts en une saison. Il manque un gros calibre, une tête d'affiche au secteur offensif d'autant que, cet été-là, Paris va perdre son meilleur buteur, Youri Djorkaeff (20 unités) qui file à l'Inter Milan.
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Bruno N'Gotty, héros de la victoire du PSG en finale de la Coupe des Coupes - 1996

Crédit: Panoramic

Ronaldo voulait rejoindre Raï et Ricardo
"A l'intersaison, Ricardo passe entraineur, se souvient encore Moutier. Il nous dit qu'il sait que Ronaldo a une grosse envie de jouer à Paris. D'abord parce que nous étions très compétitifs et puis, les Brésiliens sont amoureux de Paris. Et il voulait rejoindre Raï et Ricardo." Banco. Un rendez-vous est organisé dans un grand hôtel parisien pour finaliser le transfert de l'été. Michel Denisot, président du PSG, Ricardo et Jean-Michel Moutier rencontrent leur cible de l'été.
Mais très vite, ils se rendent compte que l'affaire leur échappe. Moutier encore : "On s'est rendu compte que nous ne pouvions pas lutter financièrement, se rappelle l'ancien directeur sportif du PSG. On a fait le maximum pour l'avoir mais on n'a pas pu. Il gagnait déjà beaucoup plus en net d'impôt que ce que nous pouvions lui offrir en brut. Et on ne voulait pas établir de grosses disparités au sein de l'effectif. On avait une équipe équilibrée qui vivait bien ensemble. Si on installait un mec qui gagnait beaucoup plus, ça aurait pu faire exploser l'équilibre du vestiaire."
Paris passe à côté du meilleur 9 du moment, et peut-être de l'histoire. Le FC Barcelone, lauréat de la C1 en 1992 mais en nettes difficultés sportives (4e de Liga), saisira l'occasion pour établir un nouveau record cet été-là en dépensant 18 millions d'euros. "Même si le Barça n'était pas dans sa meilleure période, ça restait une immense institution, rappelle Moutier. On a voulu faire Hristo Stoïchov en 1992, nous avions les moyens de le faire mais toute l'institution s'est mise en branle pour nous contrer. Sur ordre de la direction, tous les joueurs sont allés le voir pour lui dire de rester. Le Barça avait cet avantage sur nous."
Tout Barça qu'il est, il a fallu ruser. Dans un entretien à Goal, Joan Gaspart, alors président du Barça, raconte comment il a obtenu la signature de Ronaldo alors au Brésil : "Le PSV s'est rendu compte qu'il ne voulait finalement pas perdre le joueur et a appelé la Confédération brésilienne pour nous mettre tous les obstacles possibles. Il y avait deux gardes du corps qui ne voulaient pas me laisser passer, sous aucun prétexte. Alors j'ai fait la connaissance d'un serveur espagnol de l'hôtel et il m'a prêté son uniforme, un plateau et un Coca-Cola." Gaspart s'infiltre en douce dans la chambre de Ronaldo et lui fait signer son contrat. L'affaire est bouclée. Paris est battu.
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Ronlado sous les couleurs du FC Barcelone

Crédit: Getty Images

Ce qu'il s'est passé après

Ronaldo devient Il Fenomeno. 47 buts en 49 matches avec le FC Barcelone dans une ère qui n'est pas encore celle des super buteurs. Une petite saison seulement passée en Catalogne mais un exercice absolument exceptionnel. Comme ce slalom face à Compostelle, où il récupère le ballon dans sa moitié de terrain, élimine six joueurs avant de porter l'estocade. Le rouleau compresseur brésilien devient le meilleur joueur du monde. A 21 ans, il est le plus jeune lauréat du Ballon d'Or.
Le PSG vivra une saison très identique à la précédente. Il échouera encore à la deuxième place, à 12 points tout de même de l'AS Monaco. Mais il s'offre une nouvelle finale de Coupe des Coupes face au Barça, cette fois-ci. Les hommes de Ricardo s'inclineront sur la plus petite des marge (1-0) sur un but de… Ronaldo ! Le Brésilien met aux abois la défense parisienne en générale et Bruno N'Gotty en particulier, contraint de la faucher dans ses 16 mètres peu avant la pause. R9 s'occupe de la sentence. Homme du match, il illumine la soirée et donne un peu plus de regrets encore à Jean-Michel Moutier : "C'est un clin d'œil assez ironique de l'histoire. Un an après qu'on ait tout fait pour le signer, il nous martyrise en finale", constate-t-il 23 ans plus tard.
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Ronaldo avec le FC Barcelone

Crédit: Eurosport

Canal avait les moyens de s'offrir Ronaldo, s'il en avait eu la volonté stratégique
Mais Ronaldo estime qu'il n'est pas payé à sa juste valeur en Catalogne et compte bien faire monter les enchères. Sa clause libératoire de 29 millions d'euros ne pèse pas bien lourd face à son tout nouveau statut. Cette année-là, en Europe, il y a Ronaldo et les autres. Alors, du côté du PSG, l'idée resurgit. "On n'a pas fait d'offre au joueur, simplement discuté avec lui. Mais, là-encore, on se heurte à des exigences bien trop élevées", nous renseigne Moutier.
Pourtant, selon Michel Denisot, président du PSG d'alors, l'affaire aurait pu être conclue : "Canal avait les moyens de s'offrir Ronaldo, s'il en avait eu la volonté stratégique, témoignait Denisot en 2014 sur la chaîne L'Equipe. Il y avait une volonté de ne pas écraser les autres clubs, par respect de l'abonné de la chaîne qui vivait à Montpellier ou à Marseille... Pierre Lescure ne voulait pas qu'il y ait une espèce de position dominante du club de Canal par rapport aux autres." Deuxième rendez-vous manqué avec "un des cinq plus grands joueurs de l'histoire" (Moutier). Cette fois, Paris ne s'en relèvera pas.

Et s'il avait vraiment signé…

Moutier a du mal avec l'exercice : "Je ne peux pas imaginer ce PSG avec Ronaldo sinon je n'en dormirais pas la nuit et je ne veux pas me faire de mal. Mais c'est certain qu'il aurait changé le destin du club." Et pour cause. Ronaldo signe au PSG ce 2 juillet 1996. L'histoire bascule. Le PSG remporte sa deuxième Coupe d'Europe consécutive grâce à un festival de son Brésilien, auteur d'un triplé face au Barça en finale. Ses 32 buts en Ligue 1, loin devant les 22 unités de Stéphane Guivarc'h, permettent au PSG de remporter son troisième titre de champion. Mais des dissensions apparaissent dans l'effectif. Leonardo, Raï et Ronaldo forment le clan des Brésiliens qui accaparent la lumière et les gros salaires.
Les jalousies s'aiguisent. Le tout jeune Nicolas Anelka, qui ne parvient pas à se faire sa place depuis l'arrivée de Ronaldo, fait une sortie remarquée dans la presse avant de rejoindre Arsenal. Si tout roule sur le terrain, les tensions entre les Brésiliens et les historiques du PSG font exploser l'unité du vestiaire. Ronaldo, devenu trop grand pour l'institution, rejoint le FC Barcelone contre 30 millions d'euros. Et Paris mise sur Edmundo, buteur brésilien qui enquille but sur but à Vasco de Gama. L'un des flops les plus retentissants de son histoire.
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