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Maolida à Nice - Lancer un jeune, c’est (aussi) lui faire la place qu’il mérite

Ilyes Ramdani

Mis à jour 14/08/2018 à 20:02 GMT+2

TRANSFERTS - Marché des transferts oblige, les clubs de Ligue 1 se renforcent les uns après les autres. Dans ce va-et-vient permanent, quid des jeunes espoirs de leurs centres de formation ? Certains transferts récents, comme celui de Myziane Maolida à Nice, montrent que les clubs doivent aussi faire de la place à leurs espoirs sous peine de les voir filer. Plus simple à dire qu’à faire.

Myziane Maolida (OL)

Crédit: Getty Images

C’est un transfert passé relativement inaperçu aux yeux du grand public mais qui a ému les supporters lyonnais. En vendant Myziane Maolida à Nice, l’OL a effectivement perdu un des joueurs les plus talentueux de son centre de formation. International français U19, polyvalent, efficace, l’attaquant natif de Paris avait tout pour s’imposer sous les couleurs lyonnaises.
Finalement, le voilà parti sous d’autres cieux avant même d’avoir pu briller à Lyon, et contre dix petits millions d’euros. De prime abord, c’est un transfert qui peut étonner. Pour le joueur, d’une part, qui connaissait une progression linéaire dans un des meilleurs clubs français. Mais aussi pour l’OL, qui a perdu en un été deux des meilleurs attaquants de son académie : Maolida, donc, et Willem Geubbels, parti à Monaco.
Pourtant, à y regarder de plus près, le choix des dirigeants lyonnais se comprend. Economiquement, le club rhodanien empoche un joli chèque pour un joueur qui ne compte que deux titularisations en Ligue 1 et peut espérer que les 30% promis à la revente constituent également un joli pactole. Mais sportivement aussi, il n’était pas insensé de vendre Maolida. Pour une raison simple : il n’y avait pas à Lyon la place que le jeune attaquant méritait.
La saison dernière, l’OL pouvait se gargariser de compter dans ses rangs l’avant-centre de l’équipe de France U19 (Myziane Maolida), celui de l’équipe de France U18 (Amine Gouiri) et celui de l’équipe de France U17 (Willem Geubbels). Une situation ô combien flatteuse pour le travail des formateurs lyonnais mais problématique pour la politique sportive du club. Empiler les talents, cela reste le meilleur moyen de les faire échouer.
Avec le surclassement d’Amine Gouiri en équipe de France U19, les deux coéquipiers en club se retrouvaient en concurrence pour une place dans le groupe pro lyonnais… et pour la place d’attaquant de la sélection de Bernard Diomède. Un sacré casse-tête qui empêche de les faire grandir en toute sérénité. Quel projet sportif crédible offrir à ces trois joueurs quand on sait que l’équipe première ne joue qu’avec un attaquant de pointe et que Mariano Diaz est sous contrat jusqu’en 2020 ?
“Sortir un jeune” de son centre de formation, comme on dit, c’est réussir trois étapes incontournables :
  • Détecter le jeune et le recruter
  • Le former
  • Lui faire de la place dans son effectif professionnel
Les deux premières étapes sont maîtrisées aujourd’hui dans l’immense majorité des centres de formation français. C’est à la troisième marche que le bât blesse le plus souvent. Combien de jeunes ont-ils quitté leur club formateur parce que cette étape n’était pas assurée ? Preuve en est avec l’exode récurrent des meilleurs espoirs du Paris Saint-Germain. Si Claudio Gomes a rejoint Manchester City cet été, ce n’était ni pour l’argent ni pour la vie mancunienne. Mais bien parce qu’il se sentait plus désiré, plus à même de réussir ses débuts en pro chez les Citizens qu’au Paris Saint-Germain.

La prise de risques pas assez envisagée

Cet été, volontairement ou non, Lyon a clarifié une situation qui pouvait tendre au piège. Le club avait trois attaquants de potentiel niveau international. Deux sont partis. L’OL a donc assumé un choix, celui de miser sur Amine Gouiri, probablement le plus gros potentiel des trois. Buteur complet, l’Isérois a réalisé une année pleine, ponctuée par des performances remarquées au Mondial U17 puis à l’Euro U19. Pour faire le nombre et pour saisir une opportunité gratuite et tentante, l’OL a aussi recruté Reo Griffiths, un Anglais de 18 ans.
Mais le talent numéro 1 sur la liste, c’est bien Gouiri. Il semble avoir le talent et les épaules pour être le prochain grand attaquant de l’OL. Jean-Michel Aulas s’est peut-être souvenu qu’il y a treize ans, en 2005, un autre attaquant de dix-huit ans pointait déjà le bout de son nez. Il lui avait fait toute la place qu’il méritait. C’était un certain Karim Benzema. Sans entrer dans le jeu dangereux des comparaisons, il y a matière à mettre en parallèle les deux situations.
Pour faire émerger un jeune, il faut tout le talent d’un club et d’un entraîneur pour lui faire de la place. C’est souvent un sacrifice. Celui, parfois, de se séparer d’autres joueurs à fort potentiel, pour ne pas empiler les talents au même poste. Cela peut être un risque, aussi. Celui de ne pas recruter à ce poste, de ne pas acheter cette doublure rompue aux matches de Ligue 1 en assumant le fait que ce rôle de numéro 2 sera dévolu à un jeune du centre. Un dilemme auquel font face, ces temps-ci, nombre de clubs de Ligue 1.
C’est aussi tout le casse-tête auquel doit faire face le Paris Saint-Germain, par exemple. Malgré son statut et l’étendue de ses moyens, le champion de France en titre peine à persuader ses jeunes de rester. Comment convaincre un Colin Dagba, intéressant face à Monaco et Caen, quand Thomas Tuchel réclame publiquement l'arrivée d'un latéral droit, en plus de Dani Alves et Thomas Meunier ? L’entraîneur de l’équipe réserve du PSG, François Rodrigues, ne disait pas autre chose dans Le Parisien au moment de quitter le club fin mai.
Tant qu’on n’aura pas ouvert de manière permanente la porte à nos trois, quatre éléments talentueux, les joueurs ne croiront pas au projet Paris Saint-Germain.
Ouvrir la porte, c’est justement tout l’enjeu. Le Stade Rennais compte, par exemple, environ quarante joueurs professionnels sous contrat ! Un chiffre hallucinant qui traduit une réalité : il n’y a pas de place, ou si peu, pour les jeunes d’un centre de formation qui compte parmi les meilleurs de France. En vendant Maolida à Nice, l’OL a acté cette réalité parfois oubliée. Aussi talentueux soit-il, un jeune ne peut pas réussir s’il n’y a pas la place qu’il mérite dans l’effectif professionnel.
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Myziane Maolida (OL)

Crédit: Getty Images

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