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FOOTBALL : Passer de 20 à 18 clubs en Ligue 1, pour quels avantages ?

Glenn Ceillier

Mis à jour 10/11/2020 à 21:29 GMT+1

LIGUE 1 - En quête de solutions pour sauver le foot français, Vincent Labrune, le nouveau président de la LFP, a relancé l'idée d'un passage de la L1 de 20 à 18 clubs. Une option qui présente quelques intérêts sur le plan économique, même s'il y a aussi des freins et des choix à faire pour y parvenir avec efficacité.

PSG - OM, le 13 septembre dernier

Crédit: Getty Images

C'est un vieux serpent de mer qui, de temps à autre, remonte à la surface du football français. L'idée de passer la L1 à 18 clubs est revenue encore une fois dans les débats ces derniers jours. "Ce que nous traversons est l'occasion de repenser notre modèle", s'est justifié le nouveau président de la LFP Vincent Labrune, interrogé par le Journal du Dimanche. Ce projet revient pour relancer le football tricolore, malmené par le conflit avec Mediapro et si décevant en Coupes d'Europe. Mais si l'apport de ce genre de révolution est assez évident en termes de calendrier et de rythme pour les équipes, est-ce aussi flagrant sur le plan économique ?
L'hypothèse d'une classe élite amputée de deux membres a en tout cas de quoi séduire. Les clubs seraient moins nombreux à se partager les talents. Et surtout les revenus des droits TV, cette manne si précieuse pour les pensionnaires de l'élite. En clair, être mieux armés pour être plus compétitifs face aux autres clubs des championnats européens. "Ça me semble extrêmement hasardeux d'estimer que l'on va garder en l'état la taille du gâteau en réduisant le nombre de clubs", prévient cependant l'économiste Pierre Rondeau, qui remarque à juste titre que le nombre de journées diminueraiet et que le "produit L1" serait alors dégradé. "Pour moi, une telle option ne pourrait s'envisager qu'à partir de 2024, au moment de la mise en vente des nouveaux droits TV. Sinon, les diffuseurs seraient en droit de renégocier le contrat à la baisse".

"Une augmentation de la qualité et de l'incertitude"

Noël Le Graët, le président de la FFF, a d'ailleurs prévenu dans L'Equipe qu'il faudrait réaliser "une étude financière et interroger les chaînes de télévision. Cela fait quand même des matches en moins". Mais d'un point de vue économique, réduire le nombre de clubs n'est pas forcément négatif et synonyme obligatoirement de baisse de recettes. Loin de là. "Il peut y avoir une augmentation de la qualité et de l'incertitude qui vont susciter de l'intérêt", estime pour l'AFP Christophe Lepetit, économiste du sport. Et ce n'est pas uniquement vrai pour les droits TV.
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Anthony Lopes s'interpose devant Denis Bouanga lors d'OL-ASSE

Crédit: Getty Images

Vincent Chaudel dresse ainsi un portrait assez intrigant de ce tableau d'une L1 à 18 clubs. En 2006, il avait analysé avec son cabinet l’effet inverse suite à une demande la Bundesliga qui s’interrogeait sur la possibilité de s’agrandir : l'impact d’un passage de 18 clubs à 20 en se basant sur l’expérience de la France au début des années 2000. Et le fait d’être 18 était ressorti comme un avantage certain. "Passer de 18 à 20, c'est organiser deux autres matches à domicile, soit 10% des rencontres en plus. Ce qui engendre un coût d'organisation. Mais ça ne fait pas 10% d'augmentation de revenus. C'est beaucoup moins, nous explique le fondateur de l'Observatoire du sport business. Quand vous passez de 18 à 20, vous rajoutez deux petits matches, pas deux chocs. Donc vous n'augmentez pas de 10% les abonnements ou les loges… Et en plus, vous divisez les droits TV en 20 au lieu de le faire en 18. Donc le passage de 18 à 20, c'est moins d'argent pour les clubs." En suivant cette logique, aller dans l'autre sens et passer à 18 clubs amènerait plus d'argent dans les caisses.

L’exemple du rugby

"Pour le PSG, Marseille ou Lyon, qui peuvent récupérer entre 500 000 et deux millions d'euros par match, c'est une perte", note cependant Pierre Rondeau. "C'est un serpent de mer, une légende, un mirage de croire qu'on puisse remporter une Coupe d'Europe grâce à un passage à 18 clubs. C'est illusoire de penser que cela arrivera en imitant les Allemands, qui ont un modèle économique différent." Ce n'est en effet sûrement pas la solution miracle pour "tirer le foot français vers le haut", comme l'espère Didier Deschamps. Mais à un moment où certains clubs français pourraient se retrouver au bord de la faillite, elle peut être bienvenue, voire salutaire.
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Vincent Labrune, nouveau président de la LFP

Crédit: Getty Images

"Il vaut mieux être en vie en Ligue 2 que mort en Ligue 1", estime de son côté Vincent Chaudel, pour qui la crise actuelle est le moment idéal pour faire bouger les lignes. "C'est en temps de crise que l'on peut prendre des décisions que l'on repousse d'habitude toujours au lendemain. Les gens sont en capacité d'écouter car là, il en va de la survie de tout le monde". Pour le fondateur de l'Observatoire du Sport Business, ce passage à 18 clubs en L1 ne peut d'ailleurs s'imaginer sans accompagnement efficace des clubs qui descendent et d'une L2 à 22 clubs. "Pour passer à 18, il faut rassurer les clubs sur le fait que demain, ce sera mieux qu'aujourd'hui à 20. Sinon, on fait peur à tout le monde", lance-t-il, bien conscient que certains clubs peuvent se sentir menacés par une élite resserrée.
"Avec le cabinet, on avait accompagné Serge Blanco dans la transformation du rugby. On l'avait aidé à passer de 21 clubs à 16 puis 14, raconte Vincent Chaudel. Quand vous avez 21 clubs, vous devez expliquer à cinq clubs qu'ils seront mieux en deuxième division qu'en première. Ce n'est pas facile. Mais avec du recul, c'est la réalité. Les clubs qui vivotaient en première division et avaient du mal à joindre les deux bouts se sont installés tranquillement en Pro D2, avec une économie qui leur a permis de se construire sur la durée. Le message n'est pas facile à faire passer". En clair, un travail de longue haleine commence si Vincent Labrune envisage vraiment d’essayer de convaincre tout le monde des bienfaits de cette option.
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"Il y a un risque de disparition pour plusieurs clubs français": la L1 face à la crise Mediapro

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