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Gérald Baticle, entraîneur Angers SCO : "Quand je parle du jeu vers l'avant à mes joueurs, je cite beaucoup Liverpool"

Clément Lemaître

Mis à jour 04/08/2021 à 18:11 GMT+2

LIGUE 1 - Après avoir passé dix ans en tant qu'entraîneur adjoint de l'Olympique Lyonnais, Gérald Baticle devient numéro un pour la première fois en Ligue 1 sur le banc d'Angers SCO. A trois jours de son premier match de la saison à Strasbourg, l'ex-attaquant auxerrois s'est longuement confié sur sa philosophie de jeu. Une philosophie notamment inspirée par Guy Roux et Jürgen Klopp.

Gerald Baticle et Said Chabane, l'entraîneur et le président du SCO Angers.

Crédit: Getty Images

Gérald Baticle, comment le joueur que vous avez été aurait décrit l'entraîneur que vous êtes devenu ?
Gérald Baticle : J'aurais décrit un coach passionné, travailleur, méticuleux, un peu obsessionnel car je vais au bout du truc. Je suis un entraîneur avec des idées fortes tout en ayant une capacité d'adaptation.
Dans votre carrière de joueur, vous avez connu des entraîneurs emblématiques comme Guy Roux, Jacky Duguépéroux, Joël Muller ou Gilbert Gress. De quel technicien vous sentez-vous le plus proche ?
G.B. : Honnêtement, je ne pense pas me rapprocher de quelqu'un. Tous les entraîneurs cités ont chacun leur personnalité et leurs caractéristiques. Après, je me nourris de chacun d'eux. A Auxerre, j'ai fait mes premières gammes chez les professionnels avec Guy Roux. Évidemment que la méthode auxerroise m'a marqué. Tous les coachs ont compté. A la base, j'étais au CREPS d'Amiens pour devenir professeur de sport. La première année m'avait éveillé et permis de développer ma capacité d'analyse. Quand j'étais joueur, j'étudiais les méthodes des coachs, leurs principes. J'ai pris des notes sur chaque entraîneur : que ce soit le positif ou ce que les joueurs n'aimaient pas subir. Avec toutes ces méthodes, je fais ma mayonnaise personnelle.
Est-ce qu'il y a un principe en particulier qui représente votre base de travail ?
G.B. : Auxerre, j'ai connu en tant que joueur et je suis revenu au club pour être éducateur, puis entraîneur des attaquants dans toutes les catégories, et coach des moins de 19 ans. Le métier de joueur professionnel, je l'ai découvert à l'AJA. Pareil pour celui d'entraîneur. Une des conditions pour que je revienne entraîner les attaquants à l'AJA était que je sois suivi par Guy Roux. J'avais eu une discussion franche avec lui. 'Si vous voulez avoir un éducateur en plus, il faudra en prendre un autre, mais si vous voulez me former et me transmettre une partie de votre savoir, ça m'intéresse', lui avais-je confié à l'époque. Il m'avait répondu : 'c'est la première fois qu'on me demande ça et oui je suis prêt à échanger avec toi mais pas à n'importe quel moment, pas quand je suis avec mon équipe.'
Avez-vous conservé précieusement certains conseils de Guy Roux ?
G.B. : Guy Roux, pour expliquer des principes de jeu, de management et humain, il prenait une enveloppe dans la poubelle, parce qu'il ne fallait pas gâcher, et écrivait au dos de celle-ci. Moi, j'en ai gardées certaines.
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Gérald Baticle lors de la préparation du SCO Angers.

Crédit: Getty Images

Gilbert Gress avait une philosophie très directive. Qu'avez-vous gardé de son passage à Metz ?
G.B. : Gilbert Gress, c'était un football précis et offensif. Très offensif même. Il avait des principes forts. J'ai en gardés certains même si je l'ai connu moins longtemps (ndlr : six mois lors de la saison 2001-02). Les joueurs devaient s'adapter à sa méthode et il n'en bougeait pas. Il était d'une précision chirurgicale. Moi, j'ai ma méthode, je sais où je veux aller, mais quelque part, je me dis qu'on peut prendre différents chemins pour y arriver.
Parmi les plus grands entraîneurs de la planète football, lequel vous inspire le plus ?
G.B. : Encore une fois, je ne souhaite pas ressembler à quelqu'un en particulier. On a joué Liverpool en amical ou Manchester City en C1 notamment quand j'étais à Lyon. J'aime beaucoup la philosophie de Jürgen Klopp, ses principes de jeu, son style et son management. Quand je parle du jeu vers l'avant à mes joueurs, je cite beaucoup Liverpool et Jürgen Klopp. J'admire également la précision de Pep Guardiola dans sa recherche du jeu. Lui aussi est un obsessionnel.
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À la fois colérique, usant, humain et porte drapeau : qui est vraiment Jürgen Klopp ?

Lors des matches amicaux d'Angers SCO, vous avez joué avec deux pistons, Jimmy Cabot à droite et Souleyman Doumbia à gauche. Êtes-vous un entraîneur attaché à un système de jeu précis ou composez-vous votre équipe avec les joueurs dont vous avez à disposition ?
G.B. : Pendant dix ans à Lyon, j'ai étudié beaucoup de systèmes de jeu, d'adversaires et de gros clubs avec des grands principes. Le système, c'est le potentiel des joueurs qui va le définir. Moi, je vais l'adapter à l'effectif que j'ai. Après, quel que soit le système, à trois, quatre ou cinq derrière, je vais avoir des principes qu'on va retrouver.
Quels sont ces principes auxquels vous faites allusion ?
G.B. : Je recherche l'équilibre défensif. Pour moi, être défensif, ce n'est pas forcément reculer. C'est avoir un bon bloc, une bonne couverture des uns par rapport aux autres, être fort dans le duel. Quand on a cet équilibre défensif, on est plus libéré pour pouvoir attaquer. On se sent plus fort. On peut attaquer avec plus de confiance, en plus grand nombre. Et j'ai des principes offensifs : des prises de risques dans les trente derniers mètres, du jeu vers l'avant quand c'est possible avec une utilisation de la largeur pour étirer le bloc adverse et créer des possibilités de passes dans les intervalles. Pour moi, le foot moderne, c'est retrouver des joueurs lancés dans le dos de la défense adverse. Voici les bases qu'on peut adapter à différents systèmes.
Mon expérience à Brest m'a enrichi, endurci et m'a amené à me poser beaucoup de questions
Vous évoquez une assise défensive forte. C'était la philosophie de Stéphane Moulin au début de l'aventure en L1 (à partir de l'été 2015) avant qu'un jeu offensif ne se développe saison après saison. Lors de votre première conférence de presse, vous avez déclaré ne pas "vouloir tout révolutionner" mais "apporter des touches d'amélioration et du renouveau dans la construction du jeu..."
G.B. : Ma touche personnelle est qu'on doit défendre bien ensemble puis à un moment donné lorsqu'on bascule, il faut le faire le plus haut possible pour être le plus près du but, tout en le faisant rapidement pour ne pas que l'adversaire puisse se rééquilibrer. S'il est équilibré, il faudra mettre notre structure d'équipe en place pour lui créer un problème tactique. Mais il n'y aura pas de révolution. Tout cela était déjà travaillé avant, mais avec d'autres positions et d'autres schémas.
Vous avez terminé la saison 2008-09 sur le banc du Stade Brestois, à l'époque en Ligue 2 (ndlr : sept mois). Sur quels points votre approche du métier d'entraîneur a-t-elle évolué ?
G.B. : Cette expérience m'a enrichi, endurci et m'a amené à me poser beaucoup de questions. Je sortais de ma carrière de joueur et de quatre ans en tant qu'éducateur à l'AJA, et l'arrivée a été difficile. Il y a les entraîneurs qui arrivent en cours d'année et qui ont une capacité d'adaptation et il y en a d'autres qui ont besoin de mettre leurs méthodes en place. Je pense faire partie de cette deuxième catégorie.
Vous avez ensuite passé dix ans à l'Olympique Lyonnais en tant qu'entraîneur adjoint. Que vous a apporté ce passage dans un très grand club ?
G.B. : Quand j'étais joueur, j'ai évolué dans des grandes équipes. Auxerre est une petite ville et l'AJA s'est toujours fait passer pour un petit club, mais c'était une grande équipe. Il y avait déjà un niveau d’exigence extrême. A Lyon, j'ai retrouvé un très grand club. On le voit à travers le stade, le président et tout ce qu'il met en place. Là encore, j'ai vécu cette exigence extrême mais dans un staff. J'ai appris la façon dont un très grand club se remet en question et amène de nouvelles solutions face à une problématique. Dans un très grand club, on est constamment en train de rechercher le progrès. Mais en parallèle, il y avait aussi beaucoup d'humain. Désormais, c'est à moi d'adapter tout ça.
Bruno Génésio, on lui cherchait tout le temps la bouteille à moitié vide à Lyon
Vous évoquez certaines problématiques que vous avez connues à l'OL. Vous étiez l'adjoint de Bruno Génésio quand il a été très fortement critiqué par les supporters. Est-ce que cela a pu vous rebuter dans votre envie de redevenir numéro un ?
G.B. : A travers cette problématique, j'ai appris comment trouver des solutions et comment travailler en conséquence. Il y a eu beaucoup de communication et de management. On a entouré Bruno pour l'aider et le soutenir. Des réunions ont été organisées avec les différents groupes de supporters pour améliorer la situation. Ça n'a pas toujours bien fonctionné malheureusement mais des choses ont été mises en place. C'était difficile à vivre car dans ces moments-là, on ressent toujours de l'injustice. Bruno est quelqu'un de passionné, bien organisé et compétent. Il avait des résultats. Quand il gagnait, on lui reprochait la qualité et quand on perdait mais qu'il y avait de la qualité, on lui reprochait le résultat. On lui cherchait tout le temps la bouteille à moitié vide. C'était difficile à vivre pour nous. Mais on s'est accroché, on l'a soutenu. On a travaillé encore plus pour l'aider, le renforcer et aller de l'avant. Quand il a pris l'équipe, elle était décrochée au classement et on a terminé 2e. On a toujours été européens. Nous étions un vrai staff lié. Après, l'idée de base de certains n'était pas d'être "anti Bruno Génésio", c'était de voir un "grand coach" arriver à Lyon.
G.B. : Bruno n'avait pas le grand nom ni la grande expérience mais il a fait du très bon boulot. Il a permis au club d'atteindre ses objectifs et aux jeunes de franchir les paliers nécessaires.
A Lyon, vous avez côtoyé Rémi Garde, Hubert Fournier, Bruno Génésio, Sylvinho et Rudi Garcia. Avec quel entraîneur avez-vous le plus appris ?
G.B. : C'est comme pour mes entraîneurs quand j'étais joueur, j'ai appris avec tous les coachs. Vraiment, ce n'est pas de la langue de bois.
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Mohamed-Ali Cho, l'un des jeunes talents du SCO Angers.

Crédit: Getty Images

Angers SCO était qualifié en Youth League la saison passée. Êtes-vous un entraîneur qui aime lancer des jeunes joueurs ?
G.B. : Quand j'ai arrêté de jouer, je me suis fait la réflexion suivante : "pour devenir entraîneur, il y a plusieurs moyens : soit tu prends un club en bas et tu montes, ou alors tu fais tes armes avec les jeunes". Moi, les jeunes, ça me plaisait. J'ai appris beaucoup de choses avec les moins de 19 ans à Auxerre. J'ai connu trois générations fantastiques avec lesquelles je me suis régalé.
Vous avez notamment joué la Coupe d'Europe avec Auxerre et Strasbourg lorsque vous étiez joueur. Est-ce que vous leur parlez de cette expérience-là ?
G.B. : Aux moins de 19 ans à Auxerre, je leur transmettais ce vécu. Je suis d'ailleurs encore en contacts avec certains d'entre eux. Aujourd'hui à mes jeunes, je ne leur en parle pas trop. C'est trop loin pour eux. Je leur parle plutôt du haut niveau actuel.
Si je dois faire progresser un jeune, évidemment que je le ferais, mais si un ancien est meilleur, c'est lui qui jouera
Est-ce que la valorisation des jeunes joueurs fait également partie de votre projet ?
G.B. : C'est très valorisant de prendre un jeune et de l'emmener au plus haut niveau. Mais maintenant que je suis entraîneur d'une équipe première, je ne regarde pas l'âge : si je dois faire progresser un jeune, évidemment que je le ferais, mais si un ancien est meilleur, c'est lui qui jouera. Pour moi, les joueurs n'ont pas d'âge et n'ont pas de carte d'identité. C'est le mérite et la performance qui m’amèneront à faire un choix.
A Lyon, vous avez côtoyé plein de jeunes qui ont éclaté au très, très haut niveau : Alexandre Lacazette, Nabil Fekir, Corentin Tolisso ou Samuel Umtiti. Quel joueur vous a le plus sauté aux yeux ?
G.B. : C'est dur d'en sortir un car tous ces joueurs sont des monstres sur le terrain. Alexandre Lacazette, c'est un chirurgien du jeu dos au but, dans les petits espaces et de la finition. Corentin Tolisso est un milieu de terrain qui peut tout faire, tout en marquant cinq ou six buts par an. Samuel Umtiti est un meneur de défense et un homme qui aime le duel. C'est du très haut niveau. Nabil Fekir, c'est un ouvre boîtes. Il n'y en a vraiment pas beaucoup des joueurs comme ça dans le monde qui peuvent mettre à mal des défenses bien en place. J'ai pris beaucoup de plaisir avec eux. On les a découverts jeunes et montés tout en haut. Ces joueurs, tu n'as pas beaucoup à leur apprendre car ils ont beaucoup de qualités mais tu as juste à les guider. Eux aussi t'emmènent vers le très haut niveau et te surprennent tous les jours.
Plus récemment, vous avez aussi côtoyé Rayan Cherki...
G.B. : Rayan fait partie de ces joueurs qui ont un potentiel de base et qu'il faut emmener en haut. Il est dans ce fameux chemin. Par rapport aux autres, il est arrivé encore plus jeune en pro. Donc il ne faut surtout pas qu'il s'impatiente.
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