Milan prend de la hauteur

Le football est décidément un sport rempli de paradoxes. Et ce n'est pas le quart de finale retour de C1 qui opposait ce soir deux géants européens, à gauche le Bayern Munich et à droite le Milan AC, qui démontrera le contraire. Après le résultat de l'aller (2-2), statistiquement, les chances de qualification semblaient sourire aux hommes d'Ottmar Hitzfeld. Surtout, après la mauvaise performance enregistrée à domicile par des Milanais ayant mené deux fois au score à San Siro, ces derniers se présentaient diminués en attaque avec la suspension de Gilardino. Pourtant, l'absence de l'ancien Parmesan n'a pas semblé peser bien lourd dans les débats, maîtrisés avec beaucoup de maestria de la part des protégés de Carlo Ancelotti (0-2). En fait, c'est plutôt le manque de réalisme offensif allemand qui a surpris ce soir. Comme quoi.

Virtuellement qualifié pour le dernier carré de la compétition, le Bayern aborde la rencontre avec sérénité. Peut-être un peu trop. Les Bavarois privilégient le jeu direct, sans préparation. Une stratégie vite mise en échec face à une formation lombarde bien en place et attentive, à l'image de son capitaine, Paolo Maldini, peu désireux de finir sa carrière sur une élimination européenne à l'Allianz-Arena. Hormis un centre vicieux de Lell (8e) sorti sur sa ligne par Oddo, rien à signaler côté munichois. Milan sent bien passer un frisson dans son dos quelques minutes plus tard sur un tir dans la surface de Podolski mais là encore, le bonheur n'est pas au bout du crampon de l'international allemand, bien stoppé par Dida (12e).

Milan bousculé ? Non, comme lors du match aller, les Rossoneri attendent leur heure. Patiemment. Le match étant très ouvert entre les deux formations, les espaces ne tardent pas à se faire jour au sein de la défense allemande. Il n'en fallait pas plus pour faire briller l'entrejeu du Milan. Kaka, en jambes, sème la zizanie dans l'arrière-garde bavaroise avant de décaler Seedorf à l'entrée de la surface. Une feinte de frappe sur Lucio suivie plus tard d'une frappe chirurgicale du pied droit, le tour est joué (0-1, 27e). Le Bayern, touché, n'a pas le temps de réagir qu'Inzaghi, lancé à la limite du hors-jeu par une génialissime talonnade de Seedorf, ne double la mise (0-2, 31e). Ou ne clore l'affaire, c'est selon.

Sûr de sa force, Milan abandonne l'initiative du jeu à ses adversaires. Un temps. Quand les Lombards décident ensuite de mettre un terme à l'étouffante domination munichoise, c'est peine perdue. Le physique n'y est plus. Surtout, l'entrée en jeu de l'énergique Claudio Pizarro (46e) et l'abnégation du tonique Mark Van Bommel font mal à la formation italienne, complètement pilonnée en seconde période. Rebond défavorable à Salihamidzic dans la surface (55e), frappe à bout portant de Van Bommel (63e)... Milan ne sue véritablement à grosses gouttes que sur une tête de Pizarro captée sur sa ligne par Dida (81e). Insuffisant pour déstabiliser la malice italienne.

A défaut de se montrer dangereux et d'exister dans le jeu, Milan, visiblement victime du même coup de mou que celui subi à l'aller, ne commettra pas les mêmes erreurs. La formation d'Ancelotti contre tout, renvoie tout, défend tout. Et fait tomber le Bayern Munich dans son antre de l'Allianz-Arena, une première pour l'enceinte bavaroise en C1. Finalement, l'équipe la moins "sûre" de se qualifier pour le tour suivant a réussi son pari. Décidément, les paradoxes sont faits pour être bousculer. Manchester, prochain invité de marque à venir se présenter sur le rectangle vert de San Siro, devrait ne pas occulter cet élément.

"On a fait ce soir un bon coup, ce n'était pas évident après le match aller et nous sommes très fier de pouvoir représenter le football italien en Europe. Tout le monde a fait ce soir une excellente partie, les deux défenseurs centraux, notre gardien, pas seulement Clarence Seedorf et Filippo Inzaghi. Notre équipe a des joueurs d'expérience qui aiment ce genre de rencontre et savent les gagner. Pour nous, chaque match est un nouvel examen, pas pour moi personnellement. Arriver à ce stade de la compétition a été difficile, plus difficile que les autres années: cette équipe peut encore faire des belles choses. Ce qui fait la différence, c'est sa détermination féroce. Je n'étais pas vraiment sur de moi en titularisant Inzaghi pour ce match: sa condition physique n'était pas très bonne, mais il m'a convaincu par son envie et sa motivation".