Le Real Madrid doit forcer sa nature, le Barça proposer autre chose

Humiliés au match aller, le Real Madrid et le FC Barcelone pourront-ils -au moins- sauver leur honneur devant leurs publics respectifs ? Les choix tactiques de José Mourinho et Tito Vilanova seront prépondérants car en face, les deux clubs allemands se déplaceront en terres espagnoles dans le même état d'esprit et les mêmes approches que lors des matchs aller.

La formule est éculée mais elle est d'une implacable logique vu le contexte : du côté du Borussia Dortmund, on ne changera pas une équipe qui a gagné et surtout jamais perdu face au Real Madrid cette saison. Lors de la phase de poules, les Borussen n'avaient déjà pas changé leur philosophie de jeu au moment de se déplacer au Santiago-Bernabeu. Et ils en avaient été récompensés en frôlant la victoire (2-2, égalisation de Özil à la 89e) et en confirmant leur avantage sur les Madrilènes dans la course à la première place du groupe D. Jurgen Klopp, qui a évidemment de la mémoire, a bien résumé l'affaire en conférence de presse hier après-midi : "Nous attaquerons et défendrons tous ensemble, c'est le seul moyen d’atteindre la finale." 

Tactiquement, il ne faudra donc pas s'attendre au moindre changement. Sans le ballon, Götze ne lâchera pas Xabi Alonso, Lewandowski reviendra défendre en cas de grosse poussée madrilène et l'ensemble du bloc travaillera pour empêcher le Real de dicter le rythme de la rencontre. Côté joueur, une seule incertitude subsiste concernant Lukas Piszczek : touché aux adducteurs, le latéral polonais est annoncé "très incertain". S'il est finalement forfait, Klopp devrait certainement faire confiance à Kevin Grosskreutz, qui avait déjà repris le poste au match aller. Milieu offensif de formation, il ne fait pas de doute que le natif de Dortmund sera au moins autant porté vers l'avant que le titulaire habituel. La principale interrogation concernera son apport défensif, lui qui évoluera dans la zone de Cristiano Ronaldo. Les premières minutes de la partie seront très importantes pour déterminer qui prendra l'avantage dans ce duel qui aura son importance dans l'affrontement tactique entre les deux formations.

Il y a six jours, le Real Madrid avait vécu un véritable calvaire s'étendant sur 25 minutes de jeu après la pause. Sans doute mis en confiance par l'égalisation de ses hommes juste avant la mi-temps, José Mourinho avait fait le choix d'abandonner le 4-1-4-1 pour repasser dans son 4-2-3-1 habituel et libérer Özil d'une aile droite où il n'avait eu aucune influence sur le jeu. L'Allemand a tout juste eu le temps d'un contrôle manqué alors qu'il filait au but (sur une relance de Diego Lopez) avant de voir Dortmund accélérer et prendre le dessus sur l'organisation défensive du nouveau système de son équipe. De la même façon qu'à l'automne dernier, les mouvements offensifs du Borussia ont complètement baladé le bloc madrilène, obligeant le repli de ses attaquants et ouvrant le terrain à Gundogan.

Au final, sur le plan défensif, le 4-2-3-1 du Real Madrid n'a jamais su contrôler le jeu placé du Borussia. Et pourtant, c'est bien lui qui est attendu mardi soir sur la pelouse du Bernabeu, avec Ronaldo, Özil et Di Maria derrière l'attaquant de pointe (Benzema ou Higuain). Alors comment le Real peut-il s'en sortir ? Tout simplement en forçant sa nature et en prenant réellement possession du ballon et du terrain, au lieu d'attendre pour contrer et donc de se retrouver en position d'être dépassé. Pour atteindre une telle maîtrise, les Madrilènes auront besoin d'un pressing intense sur la relance allemande et d'un double pivot efficace pour maîtriser la partie malgré le repli de Götze et Lewandowski. Un objectif qui pourrait être atteint avec la titularisation de Modric aux côtés de Xabi Alonso : si l'un est pris, l'autre pourra organiser le jeu et inversement. Retrouver une plaque tournante au milieu de terrain, voilà bien le premier objectif des Madrilènes dans leur espoir de remontada.

A l'instar du Borussia Dortmund, le Bayern Munich n'a clairement pas à changer d'approche après sa démonstration d'il y a une semaine. L'effectif sera au complet et en pleine forme après avoir largement tourné durant le week-end (victoire face à Fribourg, 1-0). Mieux, il sera renforcé par le retour de Mario Mandzukic, qui avait purgé son match de suspension au match aller. Défensivement, l'attaquant croate ne rechigne jamais devant l'effort et est d'un plus grand apport que Mario Gomez. Face à la Juventus, il avait annihilé les milieux bianconeri en revenant dans leur dos pour leur mettre la pression. Les milieux catalans sont certainement prévenus : le Bayern défendra de la même façon mais à un rythme certainement encore plus élevé qu'au match aller.

Et en plus offensivement, il ne perdra rien au change avec le remplacement de Gomez par Mandzukic. L'ancien attaquant de Wolfsburg peut aussi évoluer en tant que point d'appui aérien et ne sera sans doute pas de trop pour permettre au Bayern de passer outre le pressing catalan. A l'aller, les Bavarois avaient très facilement ressorti les ballons en alternant jeu court (autour de Ribéry et Schweinsteiger) et jeu long (vers Mandzukic ou Muller). Ils avaient ensuite utilisé les automatismes entre leurs joueurs de couloirs (Robben-Lahm, Ribéry-Alaba) et les déplacements de Muller pour trouver des décalages sur les extérieurs. De ces mouvements naissaient ensuite des occasions dans le jeu ou sur coups de pied arrêtés où les attaquants pouvaient faire parler leur supériorité dans les airs.

A l'aller, la défaite du Barça n'a pas été uniquement celle de 11 joueurs. C'est tout le système de jeu barcelonais qui a explosé contre une formation bavaroise qui a su exploiter ses failles tout en annihilant son pouvoir offensif. Si une seule semaine de travail ne suffira pas pour permettre à Tito Vilanova de revoir entièrement sa copie, certaines absences devraient lui permettre de proposer autre chose que le onze qui avait sombré corps et biens à l'Allianz Arena. Comme d'habitude, c'est la défense qui va être retouchée puisque Jordi Alba sera suspendu pour ce match retour. Quel que soit son remplaçant (Montoya, Abidal ou Adriano), le Barça va perdre en présence offensive puisqu'aucun des trois candidats au poste n'est aussi porté vers l'avant que l'ancien latéral de Valence.

Mais il gagnera avec "l'heureux élu" un joueur supplémentaire capable d'assurer la couverture... ce qui permettra de libérer un autre joueur. Reste à savoir qui sera ce dernier. Lors du huitième de finale retour face au Milan AC, Busquets avait profité du rôle plus défensif de Jordi Alba pour dépasser sa fonction de n°6 et participer aux mouvements dans les 30 derniers mètres. Il s'était ainsi retrouvé à l'origine du premier but de Messi. Préservé durant le week-end, l'international espagnol pourrait retrouver ce registre plus porté vers l'avant après trois matchs difficiles face au PSG et au Bayern. Sinon, Alex Song se fera certainement un plaisir de retrouver un rôle qui lui rappellera sans doute ses meilleurs moments à Arsenal.