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Avant PSG-Real Madrid (20h45) - Qui veut (déjà) la peau de Rafa Benitez ?

François-Miguel Boudet

Mis à jour 21/10/2015 à 14:41 GMT+2

LIGUE DES CHAMPIONS - Le Real Madrid s'est emparé de la tête de la Liga. Une première place qui n'a pas calmé les anti-Benitez. Accusé de tous les maux, le technicien espagnol n'était pas le casting rêvé par les supporters. Mais c'est peut-être lui qui pourrait redonner du lustre à la Maison Blanche.

Rafael Benitez (Real Madrid)

Crédit: Panoramic

Leader de la Liga avec 18 points en 9 journées, 18 buts inscrits pour seulement 2 encaissés. 1er de son groupe de Ligue des Champions avec 6 points, 6 buts inscrits et deux cleansheets. Mais ce n'est toujours pas assez. Chaque jour, le niveau du Real Madrid est remis en cause. Davantage que l'équipe, c'est un homme qui suscite toutes les polémiques : Rafa Benitez. Depuis son arrivée, rien ne lui est épargné. Ses relations avec ses joueurs vedettes sont épiées. Son style de jeu n'a pas le temps de s'installer, mais il est déjà critiqué.
Rafa Benitez rêvait d'entraîner la Casa Blanca, mais l'aficion ne rêvait pas de lui. Une aficion de plus en plus intolérante, impatiente et injuste, qui brûle ses idoles, siffle à tort et à travers et qui oublie que si peu de techniciens de renom veulent s'installer sur le banc du Bernabeu, c'est parce que la position est absolument intenable, en grande partie par sa faute. Une aficion qui ne perçoit pas que le passage de Rafa Benitez peut faire plus de bien que de mal au club. Au travers de ce début de saison, une interrogation d'envergure sur le passé récent de l'institution se pose : Benitez est-il fait pour entraîner ce Real-là ?

Mauvaise réputation

Quand il a été officiellement présenté comme nouvel entraîneur du Real Madrid, Rafa Benitez n'a pu retenir ses larmes. Supporter merengue, ancien joueur et coach de la Castilla, Benitez est un pur produit footballistique madridiste. Son palmarès parle pour lui et seuls Vicente Del Bosque et Pep Guardiola sont en mesure de soutenir la comparaison en Espagne. Pourtant, sa réputation d'entraîneur défensif lui colle à la peau.
Comme l'a écrit Juanma Iturriaga dans El Pais, les étiquettes ont la vie dure, au point qu'elles deviennent des tatouages : "Benitez, comme tous ceux qui sont exposés au scrutin populaire et médiatique, doit porter son fardeau. Il n'est pas le seul. Peu importe ses succès, Del Bosque sera toujours considéré comme un entraîneur mou avec des tactiques éculées. Mourinho, malgré ses insuccès, restera un gagnant". Dans l'imaginaire populaire, Benitez est un "amarrategui", c'est-à-dire un coach privilégiant la destruction du jeu adverse à la construction. Un poncif pourtant battu en brêche par Juan Mata et Fernando Torres, qui l'ont côtoyé de près.
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Rafa Benitez

Crédit: AFP

Les sombres font des rêves

"Organisé et défensif ne sont pas des synonymes" : Benitez peut l'expliquer tant qu'il veut, il ne sera pas écouté. L'aficion veut tout : 5 golazos par match, ne pas encaisser de buts, du spectacle, pas de temps mort. Elle vit dans un jeu vidéo, croit que les automatismes se créent en un clin d'oeil, que l'on peut jouer avec 8 attaquants et qu'elle sait tout mieux que l'un des meilleurs entraîneurs des 15 dernières années, qui a gagné partout où il est passé, dans trois championnats radicalement différents. Elle privilégie l'individuel au collectif alors que, précisément, Benitez pense l'exact inverse. Elle est le reflet d'un des côtés les plus sombres et insupportables du football actuel.
Pire que tout, elle fait dans le délit de faciès, oubliant un peu vite que le mandat de Del Bosque a été bien plus prestigieux que celui de Mourinho qui, pour le coup, ne correspondait pas du tout à l'image classe que le Real Madrid veut exporter à travers le monde. Depuis le départ de l'homme à la moustache, qu'a fait le Real sur le plan du jeu ? Un amas de statistiques, impressionnantes certes, mais qui ne sont rien en comparaison de l'empreinte collective que laissera le Barça pour les décennies à venir. Benitez ne va rien révolutionner. En revanche, il peut remettre le madridisme à l'endroit, initier le début de la reconquête et c'est tout aussi capital.

Décimés, mais réalistes et premiers

Benitez est arrivé au milieu d'un chantier laissé par Carlo Ancelotti, lassé par l'ambiance délétère à la périphérie du club, poussé vers la sortie alors qu'il a emmené le Real Madrid vers la Décima. La prolongation de Sergio Ramos, le placement de Gareth Bale, l'absence d'équilibre, le transfert loupé de David De Gea et la bouderie (légitime) de Keylor Navas : sur et hors terrain, l'entraîneur a eu droit à un beau baptême du feu. Dès le Trofeo Bernabeu disputé en août contre Galatasaray, et malgré la victoire, Benitez a été hué. Cristiano Ronaldo aussi d'ailleurs. Le commencement d'une entreprise de déconsidération et de déstabilisation qui consiste à dévaluer les débuts du nouvel arrivant. Les deux petits buts encaissés depuis le début de saison devraient plus à la forme exceptionnelle de Keylor Navas qu'à son système de jeu.
Ce "Keylorsistema", comme il est appelé, aurait sauvé les apparences contre Levante le week-end dernier (3-0). Pour autant, c'est le positionnement, le replacement, le pressing haut qui ont permis aux Merengue de marquer à trois reprises, preuve que les consignes sont appliquées. Certes, le Real Madrid est beaucoup plus permissif, les adversaires tirent souvent au but. Mais Benitez doit aussi composer avec une épidémie de blessures musculaires. D'après les spécialistes, elles sont dues à l'harassante tournée estivale qui a été organisée au détriment de la santé des joueurs. Neuf hommes sur le flanc, une charnière centrale qui change sans arrêt entre les indispositions de Pepe et Ramos. James, Modric, Bale ou encore Benzema qui rechutent. Et malgré tout une attaque qui tient la route, même si on est loin des 40 buts marqués à la même époque la saison dernière, avec en sus une défense imperméable.

Réminiscence du "doble pivote"

Comme souvent quand il s'agit d'allier recul et lucidité, Jorge Valdano a eu la parole juste, sur les ondes de la Cadena Ser dimanche soir : "à partir de janvier, nous verrons la capacité de réaction du Real. C'est une équipe solide, pas toujours vigilante mais sérieuse, disciplinée et fiable. Ça coûte beaucoup d'efforts de récupérer le ballon et c'est pour cela qu'elle donne l'impression de souffrir. Mais ce n'est pas un manque de solidarité ou de la dispersion. En fait, les joueurs évoluent ensemble. C'est ce qu'a réussi à faire Benitez depuis le début de saison". En réalité, Benitez n'est pas au Real Madrid pour bien jouer, mais pour faire mieux jouer.
Avec Casemiro et Kovacic, il a un choix dont ne jouissait pas Ancelotti la saison dernière. Deux joueurs qui équilibrent le milieu de terrain, assurent le lien entre défense et attaque, fluidifient le jeu. Dans El Mundo, Jorge Bustos établit un parallèle entre l'ancien coéquipier de Lucas Moura à São Paulo et Claude Makelele, l'un des piliers des premiers Galactiques. Une allusion prémonitoire ? Benitez est le spécialiste pour donner un sens au jeu. C'est austère, pas glamour pour deux sous, cela prend du temps à mettre en place. Mais c'est ce qui va redonner une orientation footballistique aux Merengue. Surtout, Benitez se moque bien de l'image qu'il renvoie. Il est là pour le Real Madrid, pas pour se regarder dans un miroir. A l'approche des élections, en choisissant un Madridiste fervent, Florentino Pérez a fait le choix le moins bling-bling de sa deuxième ère. C'est peut-être ce qui va le sauver et donner un nouveau souffle à la Maison Blanche.
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