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Les clubs anglais… back in business en Ligue des Champions

Bruno Constant

Publié 02/11/2017 à 17:45 GMT+1

LIGUE DES CHAMPIONS - En retrait depuis le sacre de Chelsea en 2012, les clubs anglais semblent bel et bien enclencher leur retour sur le devant de la scène européenne, à l’image des démonstrations de Tottenham et Manchester City. Et il y a plusieurs raisons à cela.

Emre Can (Liverpool)

Crédit: Getty Images

Si elle se perd en décembre, la Ligue des champions se gagne en mai et pas avant. Les matches qui comptent vraiment, ceux à élimination directe sur deux rencontres, se jouent au printemps, pas en novembre. Et il y a peu de doute que le Real Madrid, corrigé et en crise aujourd’hui, redevienne un sérieux candidat à sa propre succession au mois de mars. Mais on ne peut pas non plus faire comme s’il ne s’était rien passé cette semaine et depuis le début de la compétition. Au terme de la quatrième journée, qui révèle souvent les premiers qualifiés, quatre clubs anglais trônent en tête de leur poule et le cinquième, Chelsea, l’a seulement abandonné à Rome (0-3), ce dernier devant encore se rendre sur la pelouse d’un Atlético Madrid qui jouera sa survie le 22 novembre.
Sauf énorme surprise au sein du groupe E de Liverpool, où rien n’est joué mais plutôt en faveur des Reds, il devrait y avoir cinq clubs anglais en huitièmes de finale. Tottenham et Manchester City sont déjà qualifiés, il ne manque qu’un point à Manchester United et le nul de l’Atlético face à Qarabag a quasiment propulsé Chelsea malgré son revers à Rome (0-3). C’est le signe du retour des clubs anglais au premier plan sur la scène européenne depuis le dernier sacre de Chelsea (2012). Cinq années durant lesquelles les Blues (2013) et Manchester United (2017) ont tout de même remporté la "petite" coupe d’Europe (Ligue Europa) et Manchester City atteint le dernier carré en 2016.
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Conte : ''Le futur de l'Angleterre est assuré''

Les clubs allemands à la trappe, l'Espagne en difficulté

Le football européen fonctionne par cycle depuis que plusieurs clubs d’un même championnat peuvent participer à la même compétition. Les clubs allemands, qui avaient fourni quatre finalistes entre 2010 et 2013, le constatent douloureusement cette saison (un seul potentiellement qualifié) tandis que les clubs espagnols, sans les écarter pour autant, subissent peut-être le premier contrecoup de leur suprématie depuis quatre ans avec les difficultés du tenant, le Real Madrid, mal en point, et de l’Atlético, tout proche de passer à la trappe (3e de son groupe). C’est quelque chose qu’ont connu les clubs anglais.
J’ai déjà dressé dans cette chronique les raisons du passage à vide des clubs anglais depuis 2012 : la fin de règne de Ferguson à Manchester United (2013), le déclin progressif d’Arsenal et son manager, Arsène Wenger, mais surtout la fin de générations qui faisaient l’ADN et l’identité de ces clubs (Carragher et Gerrard à Liverpool, Scholes, Giggs, Ferdinand et Vidic à United, Lampard, Terry et Drogba à Chelsea) ainsi que l’émergence de nouvelles forces - Manchester City, Tottenham, voire l'inattendue Leicester - qui ont bouleversé la hiérarchie anglaise. L’apprentissage des Citizens et des Spurs nécessitait forcément du temps tandis que le retour des clubs historiques - Manchester United, Chelsea et Liverpool, soit les trois derniers vainqueurs anglais de la compétition - a fini d’amorcer ce nouveau cycle.
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Manchester City vs Tottenham

Crédit: Eurosport

La maitrise collective de Tottenham et City

Mercredi soir, Tottenham et Manchester City ont envoyé un message fort à toute l’Europe, bien plus que le PSG face à un Bayern méconnaissable à l’aller (0-3) et une faible équipe d’Anderlecht (9-0 sur les deux matches !) comme le laissent penser certains médias français. Les Spurs ont plongé dans la crise le champion d’Europe après lui avoir tenu tête au Bernabeu (1-1) et l’avoir assommé à Wembley (3-1) tandis que les Citizens ont battu deux fois en quinze jours l’équipe qui propose sans doute le plus beau football en Europe cette saison (Naples, 2-1 et 4-2), éliminant presque au passage deux forces vives du football européen (Dortmund et Naples). Mais surtout ils ont affiché une grande maitrise collective du plan de jeu édicté par leurs managers respectifs et dominé leur adversaire dans la ferveur de San Paolo pour les Mancuniens et un stade qui n’est même pas le leur en ce qui concerne les Londoniens.
On le sentait venir à Manchester City au regard des investissements financiers puis avec l’arrivée de Guardiola, beaucoup moins à Tottenham, pendant longtemps le deuxième club du nord de Londres, en tout cas pas à ce niveau-là. Il y a tout juste un an, beaucoup se moquaient des Spurs, paumés dans leur nouvelle maison trop grande de Wembley et battus deux fois par Monaco en C1. A l’époque, on n’imaginait pas encore jusqu’où irait le club de la Principauté et on ne soupçonnait pas vraiment ce qu’était en train de réaliser Mauricio Pochettino, malgré une première ébauche en Premier League en 2016 (3e) et 2017 (2e).
Tottenham, c’est effrayant ! (Ian Wright)
''Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent de ce Real Madrid, ils les ont massacrés, massacrés ! Depuis que Pochettino est arrivé (2014), Tottenham ne cesse de monter, monter encore, et cette équipe a encore beaucoup à montrer. Et c’est un 'Arsenal man' qui le dit. C’est effrayant !'', admet Ian Wright, qu’on ne pourra pas taxer de pro-Tottenham. L’émergence de ce club, parfaitement géré par son président Daniel Levy, et de son jeune entraineur est trop linéaire pour que ce ne soit qu’un feu de paille. Quelque part, la montée en puissance des Spurs me fait penser à celles de Dortmund (2012) et de l’Atlético Madrid (2014).
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Zidane : "Tottenham est un candidat à la victoire finale"

Il est trop tôt pour faire de Manchester City un favori à la victoire finale tant il peut se passer beaucoup de choses d’ici au mois de mai, mais il faut avouer que le football proposé et élaboré par Guardiola est un pur enchantement. Le danger vient de partout, de derrière, à l’image des deux buts inscrits par la charnière Otamendi-Stones, de devant (Agüero et Sterling), du milieu, où De Bruyne et Sané ont été éblouissants, et alors que le technicien catalan avait reposé David Silva et Walker.
Mais il n’y a pas de hasard si ces deux équipes sont dirigées par deux des meilleurs techniciens du moment : Pep Guardiola et Mauricio Pochettino. Le premier a entrepris une véritable révolution culturelle au sein d’un club anglais qu’il lui a fallu assimiler la saison passée tandis que le second est en train de réaliser quelque chose d’insoupçonné avec une équipe jeune et finalement très britannique (Kane, Alli, Winks, Dier, Davies, Trippier) dont l’équipe d’Angleterre devra récolter les fruits.
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Sarri : "Guardiola, un génie"

MU sans faire de bruit

A Wembley, Pochettino a donné une leçon tactique au tout juste désigné ''meilleur entraineur du monde'', Zinédine Zidane. Certes, ce n’était pas un grand Real Madrid et certainement pas le double champion d’Europe. Mais les Spurs ont bien quelque chose à voir là-dedans. Seuls les imbéciles oseront encore affirmer que Harry Kane est un joueur ''surcoté'' après le récital de l’attaquant de 24 ans. ''Kane est un joueur complet'', disait Zidane. L’Anglais l’a démontré sans même avoir besoin de marquer tandis que Dele Alli (doublé) a choisi le meilleur moment pour lancer sa saison.
Derrière eux, Manchester United ne fait pas de bruit mais enchaîne les succès tout en gérant son effectif, certes dans un groupe assez faible. On saura plus tard si les équipes qui savent le mieux défendre ont plus de chances que celles qui savent le mieux attaquer mais les équipes de Mourinho sont toujours redoutables sur la scène européenne. A Chelsea, la claque reçue à Rome pourrait n'être qu’un simple rappel à l’ordre mais ce n’est pas le premier. Cependant, dans un groupe qui semblait difficile au départ, le champion d’Angleterre, loin de son niveau de la saison passée, assure pour l’instant l’essentiel en attendant le retour en forme de Hazard et le retour tout court de Kanté, indispensable à l’équilibre des Blues. Enfin, Liverpool donne toujours l’impression de jouer sur un fil et sa défense risque de lui coûter cher lors des matches à élimination directe. Mais les Reds sont là et Jürgen Klopp a déjà fait ses preuves par le passé sur la scène européenne.
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Manchester United

Crédit: Getty Images

Une seule défaite en 20 matches

Au-delà du renouveau logique de ces clubs par leur renouvellement, il y a un autre dénominateur commun : l’équilibre défensif retrouvé. Embarqué dans un football spectacle sans temps mort mais symbole de panache aux yeux de leurs supporters, ces derniers avaient perdu peu à peu l’idée de bien défendre. Avec le retour de Mourinho, l’arrivée de Guardiola, Conte, Pochettino et, à un degré moindre sur ce plan, Klopp, les clubs anglais apparaissent mieux organisés, mieux structurés et beaucoup plus équilibrés défensivement, à l’exception de Liverpool donc. Guardiola a fait de Stones et Otamendi une vraie charnière à City. Mourinho a imposé son pragmatisme à United. Conte a bâti son succès en passant à une défense à trois à Chelsea. Pochettino a fait de Tottenham la meilleure défense d’Angleterre depuis deux ans. Résultat : les clubs anglais n’ont perdu qu’un seul de leurs vingt matches de Ligue des champions cette saison.
Néanmoins, l’une des grandes questions sera de savoir si, dans un football de plus en plus compétitif à l’échelon national, ces derniers auront digéré, en mars, les quatre prochains mois qui s’annoncent sans la moindre coupure hivernale. Vous me direz que cela ne leur posait pas de problèmes lorsqu’ils écrasaient l’Europe mais la concurrence, qui s’est terriblement intensifiée en championnat, leur laisse très peu de marge pour gérer. D’un Big Four solide et intouchable, la Premier League est passée à un Top 6 au sein duquel on peut très vite se retrouver sur son canapé les mardis et mercredis soirs. Demandez à Arsenal.
Bruno Constant fut le correspondant de L’Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd’hui avec RTL et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté.
Pour approfondir le sujet, retrouvez mon Podcast 100% foot anglais sur l’actualité de la Premier League et du football britannique.
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