Remplacer Neymar, ça ne dépend pas que de Di Maria

C'est donc le pire des scénarios. Investir une somme record de 222 millions d'euros sur un joueur hors-norme pour qu'il vous claque entre les doigts à moins de dix jours du plus grand rendez-vous de la saison. L'intox n'a pas fait long feu dans le sens où elle n'a pas duré jusqu'au 6 mars. En annonçant une absence de six à huit semaines pour son fils, Neymar Sr a mis fin à un jeu de poker menteur. Même si on n'est jamais à l'abri d'un coup de bluff concernant la star brésilienne. Ce ne serait pas le premier avec lui. Mais Paris aurait tort de compter dessus. Il doit se préparer à faire sans Neymar.

La perte de la star auriverde est évidemment le coup le plus dur qui pouvait être porté au PSG dans cette optique. Le Brésilien est l'arme fatale de l'équipe d'Unai Emery. En Ligue des champions, il cumule les statuts de co-meilleur buteur (6 buts) et co-meilleur passeur (3 passes décisives) du club de la capitale. Le destin du PSG dépend de sa capacité à faire la différence, comme souvent, ou à ne pas la faire, comme à Munich ou à Madrid. Au Parc des Princes, il était attendu comme le messie qui devait mettre à terre le club merengue. Paris va devoir s'en remettre à quelqu'un d'autre.

A première vue, la solution semble déjà toute trouvée. Quelque part, c'était peut-être même le destin d'Angel Di Maria d'endosser ce costume. L'homme en forme du PSG en 2018 et la victime des choix d'Emery à Madrid. Le jour de son anniversaire, un an après sa performance éblouissante face au FC Barcelone, sur une pelouse qu'il connaît par cœur et face à une équipe qui lui a donné ses plus grands moments de gloire, l'Argentin n'a même pas eu le droit à une seconde de jeu. Une énorme injustice qui, sauf blessure d'ici-là, ne se reproduira pas au Parc.

C'est une bonne chose pour Paris de pouvoir compter sur un joueur qui pèse 16 buts et 15 passes décisives toutes compétitions confondues cette saison. Et qui a déjà prouvé sa capacité à répondre dans les plus grands rendez-vous. C'est un luxe que le PSG a pu se payer et c'est déjà ça. Mais ça ne suffit pas. L'absence de Neymar pose un problème bien plus vaste que la perte d'un joueur capable d'être décisif dans la zone de vérité, même s'il est l'un des meilleurs au monde dans ce domaine. Car le Brésilien a un rôle encore plus large que cela dans le collectif bâti par Emery à Paris.

Il en est surtout le principal organisateur. L'homme recherché dans l'élaboration des phases offensives, celui qui donne l'orientation du jeu dans le camp adverse, bien avant de produire son effort dans la finition. Emery n'a jamais négligé cet aspect du jeu de Neymar. Au contraire, il s'est appuyé dessus. C'est ce qui justifie notamment son choix initial de s'appuyer sur trois milieux récupérateurs dans un 4-3-3. Pour offrir la meilleure couverture possible à un joueur peu porté sur les tâches défensives. Pour lui laisser le loisir d'imprimer son propre rythme à l'équipe aussi.

C'est peut-être le plus grand vide laissé par Neymar. Parce qu'à moins d'une semaine d'un rendez-vous aussi capitale pour Paris, c'est l'identité d'un collectif qu'Emery doit repenser sans son maître à jouer brésilien. Et cela ne peut se résumer au simple apport de Di Maria. L'Argentin sera essentiel dans son rôle d'accélérateur, de dribbleur et de passeur décisif et même de buteur en l'absence de Neymar. Mais son registre n'est pas aussi large que celui de l'ancien Barcelonais. Il n'aura jamais la même influence dans l'entrejeu. Il n'est qu'une partie de la solution au problème posé au PSG.

L'autre passera en grande partie par les milieux. Emery peut s'appuyer sur des joueurs qui peuvent prendre le jeu à leur compte. Marco Verratti notamment. L'Italien n'avait pas exactement le même impact dans l'animation offensive avec la présence de Neymar dans le onze parisien. Il lui faudra certainement prendre davantage de responsabilités dans ce domaine, et probablement plus de risques dans ces choix de jeu. Ce n'est pas forcément son registre. Cela convient plutôt à celui de Javier Pastore.

L'Argentin est une option qu'Emery aurait tort de négliger en l'absence de Neymar. El Flaco est désormais l'un des rares éléments de son effectif capable de prendre le jeu à son compte et de donner de la créativité dans les intervalles entre le milieu et l'attaque. Pastore n'a jamais eu un rôle important au PSG cette saison. En partie à cause de ses blessures récurrentes. Aussi parce que le besoin d'un joueur de son profil se faisait moins sentir en la présence de Neymar. La blessure du Brésilien entraîne une nouvelle donne. Et Pastore peut être une carte importante pour Emery.

Intégrer l'Argentin dans le cœur du jeu parisien impliquerait fatalement de faire des choix. Sacrifier Adrien Rabiot ? Le placer en sentinelle quitte à se passer d'un Thiago Motta ou d'un Lassana Diarra ? Emery ne semble pas forcément prêt à payer ce prix. Il lui appartiendra de choisir la meilleure option dans le temps qui lui reste pour préparer le rendez-vous face au Real Madrid. Mais s'il peut se réjouir de pouvoir compter sur Di Maria pour prendre la place du Brésilien en attaque, cela ne réglera pas forcément tout le problème du vide laissé par l'absence de Neymar dans le milieu parisien.