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Géants au tapis, miracle, brouillard et csc mythique : les folles soirées du Marakana

Laurent Vergne

Mis à jour 10/12/2018 à 18:15 GMT+1

LIGUE DES CHAMPIONS – Mardi soir, le Paris Saint-Germain ira jouer sa qualification pour les huitièmes de finale à Belgrade, dans l'antre de l'Etoile Rouge. Le Marakana, une des arènes les plus intimidantes du Vieux continent, renoue cet automne avec ses plus belles heures. Retour sur quelques-unes des pages inoubliables vécues au "Rajko Mitic Stadium", que personne n'appelle ainsi...

Dejan Savicevic avec l'Etoile Rouge, face au Bayern, en 1991.

Crédit: Imago

14 avril 1971 : Le fol espoir

Coupe des champions
Demi-finale aller
Victoire 4-1 contre le Panathinaikos
Le début des années 70 voit la montée en puissance de l'Etoile Rouge en Europe. Sous la houlette du célèbre entraîneur Miljan Miljanic, le club de la capitale va même se retrouver tout près d'une première finale en Coupe des champions. Après avoir écarté Ujpest Dozsa, UTA Arad et le Carl Ziess Iena, l'Etoile Rouge est en demi-finale, face au Panathinaikos, entraîné par Ferenc Puskas. La première manche se tient à Belgrade dans une ambiance délirante, devant 100 000 spectateurs. L'Etoile Rouge s'impose 4-1, grâce notamment à un triplé de Stevan Ostovic. La finale contre l'Ajax de Johan Cruijff, Johan Neeskens et Piet Keizer est là, toute proche. Mais au retour à Athènes, Belgrade sombre (3-0) et voit son rêve s'envoler.

19 mars 1975 : Le Real au tapis

Coupe des coupes
Quart de finale retour
Victoire 2-0 contre le Real Madrid
Après sa demi-finale de C1 en 1971, l'Etoile Rouge joue les quarts de finale de la Coupe UEFA en 1973 et à nouveau les quarts en C1 l'année suivante, notamment en sortant Liverpool en huitièmes. Avec au passage l'unique défaite des Reds à Anfield en C1 au XXe siècle. Les Yougoslaves commencent à se tailler une solide réputation. Au printemps 1975, les voilà de retour en quarts de finale de la Coupe des coupes, face au Real Madrid, dont l'entraîneur est désormais... Miljan Miljanic.
Ce duel est présenté comme celui entre Antonio Camacho, pas encore 20 ans mais déjà considéré comme le meilleur défenseur de sa génération, et Dragan Dzajic, le légendaire ailier yougoslave, dribbleur hors normes. Battue 2-0 à Madrid, l'Etoile Rouge est dos au mur. Mais Dzajic, muselé à l'aller, prend cette fois le dessus. Il débloque le score (35e) avant qu'un penalty de Ognjen Petrovic (55e) n'envoie les deux équipes en prolongations. La place dans le dernier carré se décide dans une étouffante séance de tirs au but.
Les quatre premières tentatives de chaque côté sont réussies. Le 5e tireur yougoslave est Ognjen Petrovic. Il échoue. Benito peut alors qualifier le Real mais il rate complètement le cadre. Derrière, Vladimir Petrovic marque puis le jeune Santillana craque à son tour. Le Real est au tapis, et l'Etoile Rouge en demies. Elle s'y arrêtera.
1975 : L'exploit de l'Etoile Rouge face au Real au Marakana.

27 septembre 1978 : Le miracle

Coupe UEFA
1er tour retour
Victoire 4-1 contre le Dynamo Berlin
C'était il y a quarante ans. Une soirée inoubliable pour tous ceux qui l'ont vécue au Marakana. Au premier tour de la Coupe UEFA, l'Etoile Rouge a été surclassée par le Dynamo Berlin (5-2). Au retour, le club est-allemand ouvre rapidement la marque par Hans Jürgen Riediger. La seconde période est entamée depuis plus de dix minutes et les Yougoslaves n'ont toujours pas marqué. Ils ont besoin de quatre buts. Ils vont les mettre. Dusan Savic égalise (58e), puis le coach Branko Stankovic lance son jeune attaquant Zdravko Borovnica.
Si souvent cantonné au banc, l'attaquant saisit sa chance et claque un doublé (69e, 80e). A la 89e minute, la défense berlinoise, sous pression, finit par craquer : sur un centre au premier poteau, Reinhard Lauck marque contre son camp. Le volcan de Belgrade explose. C'est un des plus extraordinaires retournements de situation de l'histoire des Coupes d'Europe. Pour l'Etoile Rouge, ce miracle va marquer le début d'une folle aventure puisque le club ira jusqu'en finale, sa première, avant de s'incliner de peu face au Borussia Mönchengladbach du Ballon d'or 1977, Allan Simonsen.

4 mars 1987 : Et le monde découvrit Pixie...

Coupe des champions
Quart de finale aller
Victoire 4-2 contre le Real Madrid
La veille, Dragan Stojkovic a fêté ses 22 ans. La réputation du jeune numéro 10 yougoslave n'a pas encore franchi les frontières de son pays, mais cela va changer lors de ce quart de finale aller de Coupe des champions. Le printemps semble encore loin de Belgrade en ce début de mois de mars. Mais au cours de cette glaciale soirée, Stojkovic va mettre le feu au Marakana, notamment au cours d'une première période dantesque, toujours considérée comme la plus exceptionnelle jamais livrée par l'Etoile Rouge sur la scène européenne.
Le début de match est juste dingue : Bosko Djurovski (6e) et Zarko Djurovic (11e) mettent Belgrade sur orbite. Entre temps, Hugo Sanchez, le goleador mexicain du Real, a raté un penalty (8e). A six minutes de la pause, Boro Cvetkovic ajoute un troisième but (39e). Le grand Real est complètement perdu. "Pixie" Stojkovic n'a pas marqué, mais il a illuminé les débats. Après la pause, le Real reprend ses esprits et limite la casse grâce à un doublé d'Hugo Sanchez dans une fin de match marquée par deux penalties dans les dix dernières minutes, un de chaque côté. Après avoir mené 3-1 et 4-2, l'Etoile Rouge a laissé passer sa chance. Elle s'inclinera 2-0 au retour et sera éliminée. Mais elle a pris date.

10 novembre 1988 : Le grand Milan se sort du brouillard

Coupe des champions
Huitième de finale retour
Match nul 1-1 contre l'AC Milan
Mai 1989 : L'AC Milan pulvérise le Steaua Bucarest en finale de la Coupe des champions. Le sacre d'une formidable équipe, dirigée de main de maître par Arrigo Sacchi et magnifiée par le talent de Franco Baresi, Paolo Maldini, Roberto Donadoni et des trois Néerlandais, Marco van Basten, Frank Rijkaard et Ruud Gullitt. Mais Milan a bien failli ne jamais être couronné. Six mois plus tôt, au cœur de l'automne, les Rossoneri sont tombés sur un os belgradois qu'ils ont eu un mal fou à ronger. Accroché à San Siro (1-1), le Milan est dans une position inconfortable avant d'aller au Marakana.
Le match retour se dispute sous un épais brouillard. On n'y voit pas à dix mètres. Le match se tient malgré tout et cinq minutes après le début de la seconde période, le jeune Dejan Savicevic, future star du Milan, marque du gauche à bout portant. L'Etoile Rouge tient son exploit. Mais à la 65e minute, l'arbitre allemand, M.Pauly, décide d'interrompre les débats. Les joueurs ont livré un combat de plus d'une heure pour rien. L'AC Milan est sauvée. Ce huitième de finale retour est rejoué le lendemain, à 15 heures. C'est un jeudi, mais le Marakana fait encore le plein.
Van Basten ouvre le score (8e), Stojkovic, sur une merveille de passe de Savicevic, égalise (38e). Plus rien ne sera marqué. Il faut les tirs au but pour séparer les deux équipes. Dejan Savicevic et Dimitrije Mrkela échouent. Milan s'en sort sur le fil du rasoir. Les Yougoslaves, persuadés d'avoir été privés injustement de leur qualification, ne digèrent pas. Reste une question : jusqu'où serait allée cette équipe, aussi talentueuse que celle de 1991, sans ce cruel dénouement ?

24 avril 1991 : La libération

Coupe des champions
Demi-finale retour
Match nul 2-2 contre le Bayern Munich
Ce n'est qu'un match nul, mais c'est un triomphe. Le match le plus important jamais joué par l'Etoile Rouge dans son antre. C'est la grande équipe de Belgrade. Dragan Stojkovic est pourtant parti pour Marseille l'été précédent, mais il y a du talent partout. Miodrag Belodedici en défense, Vladimir Jugovic, Sinisa Mihajlovic et Robert Prosinecki au milieu, Dejan Savicevic et Darko Pancev devant... Avec sa jeunesse triomphante, l'Etoile Rouge se hisse en demi-finales où elle signe une démonstration à l'aller sur la pelouse du Bayern Munich, s'imposant 2-1. Au retour, la finale tend les bras aux hommes de Ljubomir Petrovic, surtout après l'ouverture du score de Mihajlovic à la 25e minute.
Mais avec le Bayern, rien n'est jamais fini. En quatre minutes (62e, 66e), les Allemands frappent deux fois coup sur coup, par Klaus Augenthaler (sur une énorme faute de main de Stevan Stojanovic) et Manfred Bender. Tout est à refaire. On se dirige vers la prolongation quand, à la dernière minute, sur un centre de Mihajlovic, Augenthaler détourne le ballon dans son propre but. Un des "csc" les plus mythiques de l'histoire des Coupes d'Europe.
C'est du délire au Marakana. Le stade explose et l'image à la télé de cette caméra qui vire au plan large juste après le but est restée célèbre (le but est à 1h42'10" dans la vidéo ci-dessous). Émotionnellement, on a rarement fait aussi fort. Un quart d'heure après la fin du match, des dizaines de milliers de supporters sont encore sur le terrain. L'Etoile Rouge est en finale de la C1, qu'elle gagnera face à l'Olympique de Marseille, au terme d'un match nettement moins épique...

6 novembre 2018 : Liverpool K.-O.

Ligue des champions
Phase de groupes
Victoire 2-0 contre Liverpool
Après un quart de siècle dans l'anonymat, l'Etoile Rouge goûte à nouveau au frisson des grandes soirées européennes de la Ligue des champions cette année. Les "Delije" (les héros), noms donnés aux bouillants supporters du "Zvezda", se font entendre comme à la grande époque. Le Marakana n'a guère changé depuis ses illustres années. Même si c'est aujourd'hui un stade vétuste, vieux de plus d'un demi-siècle. Et si sa capacité est désormais limitée à environ 50 000 places, son atmosphère demeure intimidante et peut faire perdre les pédales aux plus aguerris.
Liverpool, vice-champion d'Europe en titre, peut en témoigner. Après un nul contre le Napoli (0-0), l'Etoile Rouge a fait plier les Reds (2-0) au début de la phase retour, avec la grande révélation de Milan Pavkov, auteur d'un doublé en sept minutes en première période (2-0). Un succès qui a replacé l'Etoile Rouge sur la carte du foot européen. Si elle a bu la tasse loin de son cher Marakana (défaites 6-1 à Paris, 4-0 à Liverpool et 3-1 à Naples), elle reste redoutable sur ses terres. Comme toujours, au fond. Le PSG ne pourra pas dire qu'il n'est pas prévenu...
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La joie de Milan Pavkov et des joueurs de l'Etoile Rouge après leur victoire contre Liverpool.

Crédit: Getty Images

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