Ligue des champions : Le parcours européen de l’Ajax porte plus que jamais la patte Pochettino

La scène est cruelle ce 7 mars 2018. La mine déconfite, Mauricio Pochettino assiste, impuissant, à l’élimination de son équipe en huitième de finale face à la Juventus alors que les Spurs ont globalement dominé la formation turinoise. Un peu plus d’un an plus tard, Pochettino fond en larmes sur la pelouse de la Johan Cruyff Arena. Cette fois-ci ce sont des larmes de joie. Son équipe vient de se qualifier, à la dernière minute, pour la première finale de son histoire en Ligue des champions au terme d’un match complètement dingue.

En l’espace de 14 mois, pas grand-chose n’a changé à Tottenham. Aucune recrue n’a posé ses valises à Londres et Mauricio Pochettino a conservé sa philosophie de jeu. Si Tottenham va disputer le 1er juin à Madrid la finale d’une édition de C1 irrationnelle, il le doit en grande partie à son entraineur argentin. Plusieurs fois au bord du précipice, les Spurs ont pu compter, à chaque fois, sur les choix tactiques de l’entraîneur de 47 ans pour se sortir de l’impasse.

Tout commence le 11 décembre dernier face au FC Barcelone. Tottenham doit à tout prix ramener un résultat du Camp Nou, afin de terminer aux deux premières places du groupe B et ainsi rejoindre les huitièmes de finale. Mené au score, Mauricio Pochettino décide alors de faire entrer Erik Lamela à la place de Kyle Walker-Peters et de repositionner son équipe en 3-5-2 pour forcer la décision. A la 71e minute, Pochettino lance ensuite Lucas Moura en lieu et place d’Heung-min Son. Quatorze minutes plus tard, c’est le Brésilien, déjà, qui jouera les sauveurs. Lucas égalise et offre à Tottenham la qualification pour la phase à élimination directe.

Face à Manchester City en quart de finale, Pochettino va, grâce à ses choix, sortir son équipe d’une nouvelle situation mal embarquée. Si au match aller, les Spurs, positionnés en 4-2-3-1 avec Harry Kane soutenu par une ligne de trois Alli-Eriksen-Son, avaient maitrisé les débats, le match retour sur la pelouse de l’Etihad ne va pas se passer comme prévu. Privé de son serial buteur Kane et après un début de match qui restera dans les annales de la Ligue des champions, Tottenham prend l’eau et est mené 3-2 à la pause. Virtuellement encore qualifié grâce à sa victoire 1-0 de l’aller, Mauricio Pochettino est contraint de faire sortir Moussa Sissoko, touché physiquement, juste avant la mi-temps.

L’entraineur argentin en profite pour repositionner Christian Eriksen devant la défense à côté de Victor Wanyama et lance Fernando Llorente en pointe de l’attaque. Une formule qui s’avèrera gagnante. Le grand espagnol fait reculer à lui tout seul le bloc de Manchester City et inscrit à la 73e minute le but qui envoie Tottenham en demi-finale de C1.

Deux semaines plus tard, pour le match aller face à l’Ajax, le coach des Spurs opte cette fois-ci pour un 3-5-2. Encore une fois, la blessure d’un de ses joueurs, Jan Vertonghen, va le contraindre à revoir ses plans. Il sort son défenseur central et repasse à quatre derrière en faisant rentrer Sissoko dans l’entre jeu. L’international tricolore forme alors une doublette avec Wanyama devant la défense et permet aux Spurs de remettre un peu le pied sur le ballon. Si ce changement tactique n’empêchera pas les Londoniens d’être défaits 1-0 sur leur pelouse, il aura probablement évité aux coéquipiers d’Hugo Lloris de basculer vers la demi-finale retour avec un handicap plus important.

Pour tenter mercredi de renverser l’Ajax Amsterdam, Mauricio Pochettino ne change rien (ou presque) par rapport à la fin du match aller. Vertonghen retrouve sa place dans l’axe et les Spurs sont alignés en 4-2-3-1 avec Lucas en pointe, soutenu par le trio Son-Alli-Eriksen. Dans ce schéma, Moussa Sissoko devait, par ses déplacements sur toute la largeur du terrain, occuper les milieux adverses De Jong et Schöne afin de libérer de l’espace pour les joueurs offensifs de Tottenham.

Mais face au pressing incessant des Amstellodamois, la paire Sissoko-Wanyama ne s’en sort pas. Les deux joueurs, pas les plus à l'aise techniquement de l’effectif de Pochettino, ont du mal à ressortir proprement le ballon. Résultat, les Spurs sont contraints d’allonger le jeu pour sauter le pressing adverse. A la lutte avec les petits gabarits de Son, Lucas ou encore Alli, la défense de l’Ajax se régale de ces longs ballons. Le capitaine Matthijs de Ligt règne dans les airs et les Néerlandais remportent 14 duels aériens au cours des 45 premières minutes.

A la pause, Mauricio Pochettino décide une nouvelle fois de sortir Fernando Llorente de sa manche. Le coach des Spurs fait entrer le géant espagnol en pointe de l’attaque. Il sort Wanyama et repositionne, comme à Manchester City, Christian Eriksen un peu plus bas dans l’entrejeu. Le repositionnement tactique de son équipe va rapidement porter ses fruits. Le jeu long de Tottenham, faiblesse en première période, devient un atout pour les Spurs. Le mètre 95 de Llorente fait des merveilles et en remportant 13 duels aériens sur 17 (record en C1 pour un joueur offensif !) l’attaquant espagnol permet à toute son équipe de remonter.

La seule présence de l’ancien joueur de Bilbao dans l’axe fait reculer de 20m le bloc de l’Ajax et permet aux hommes de Pochettino de jouer autour de Llorente. L’Ajax recule inlassablement et va encaisser en l’espace de quatre minutes un doublé de Lucas Moura. Le dernier but, au bout du temps additionnel, symbolise parfaitement ce que voulait faire Mauricio Pochettino en lançant Fernando Llorente à la mi-temps.

Après un énième long ballon vers l’attaquant espagnol, ce dernier gagne son duel et dévie le cuir vers Dele Alli. L’attaquant anglais glisse ensuite le ballon à Lucas Moura. La suite appartient désormais à la légende. Si Christian Eriksen a réclamé après le match qu’une statue soit construite pour Lucas Moura, Mauricio Pochettino méritera probablement la sienne si les Spurs décrochent, avec un effectif qui n’a pas évolué depuis un an et demi, la première Ligue des champions de leur histoire face à Liverpool.