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Malgré les sceptiques, le Bayern est en train de réussir sa mue

David Lortholary

Mis à jour 13/03/2019 à 19:25 GMT+1

LIGUE DES CHAMPIONS - Cet automne, les critiques fusaient de toutes parts en direction du Bayern : entraîneur inexpérimenté, trentenaires repus, jeunes joueurs pas au niveau, crise de légitimité des présidents... Depuis, le "Rekordmeister" s'est spectaculairement redressé, tout heureux de trouver une harmonie entre ses glorieux anciens et leurs successeurs annoncés.

Niko Kovac et Joshua Kimmich (Bayern Munich)

Crédit: Getty Images

Beau joueur, l'influent quotidien à grand tirage Bild a fait son mea culpa le week-end dernier : il avait enterré le Bayern trop tôt. Le 3 février, à la Une de son supplément sport du dimanche, il affirmait : "Die Schale wird gelb" (le trophée du champion sera jaune, c'est-à-dire Dortmund remportera le championnat cette saison). Sauf que le Bayern, à la faveur d'un ébouriffant 6-0 contre Wolfsburg, a repris la tête d'une Bundesliga dont il avait abandonné les rênes depuis 161 jours (le 5 septembre dernier), laissant son rival du Borussia compter jusqu'à neuf points d'avance il y a quelques journées. Les Jaune et Noir ont flanché, l'écart est comblé et, même si évidemment une élimination contre Liverpool remettrait cet élan en question, la mini-crise de l'automne semble loin.
Le club aux 28 titres de champion, alors, concentrait les critiques et flottait dans l'incertitude. Avait-il trop attendu pour injecter du sang neuf à un groupe vieillissant – de fait le plus âgé, en moyenne, de Bundesliga ? Avait-il laissé régner trop longtemps son historique duo présidentiel ? Uli Hoeness était-il en train de devenir dangereusement sénile, à tout le moins en perte de lucidité au moment d'effectuer les bons choix pour l'avenir ? La légendaire paire d'ailiers Robben et Ribéry, symboles de la compétitivité sportive européenne du Bayern pendant une décennie et plus, avait-elle prolongé pour l'année de trop ? Sa paire de défenseurs centraux champions du monde, Hummels et Boateng, était-elle dépassée par la vitesse d'une virevoltante génération d'attaquants allant de Timo Werner à Jadon Sancho, en passant par Thorgan Hazard et Dodi Lukebakio ?
La pingrerie de ses stratèges financiers – Corentin Tolisso demeure, aujourd'hui, le transfert à l'achat le plus onéreux de l'histoire bavaroise, "à peine" 45 millions d'euros – faisait-elle de lui, désormais, un second couteau continental face aux rivaux gavés de pétrodollars ? La venue d'un entraîneur encore novice sur la scène européenne était-elle une erreur de casting ? La fragilité de Kinsley Coman, le déchet à la finition de Serge Gnabry et la tendresse d'Alphonso Davies allaient-elles ouvrir une longue période de reflux sportif ?
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Franck Ribéry et Arjen Robben

Crédit: Getty Images

Kovac a les épaules

Uli Hoeness, dont la fierté n'avait pas perdu une once d'éclat, allait assumer. "Si la transition nous fait perdre le titre une fois après l'avoir remporté à six reprises consécutivement, nous nous en remettrons", lâchait-il, en substance, au meilleur de la forme du grand rival de la Ruhr. Conscient, sans doute, que Dortmund avait agi plus vite et plus fort pour revigorer ses troupes. Confiant, pourtant, en son choix de faire venir les frères Kovac – Niko comme entraîneur principal, Robert comme adjoint. Bien, semble-t-il, lui en a pris. Alors que le Croate voyait, fin 2018, les critiques se multiplier sur les limites supposées de ses compétences et sur son incapacité à apposer une signature personnelle et pertinente sur le jeu de son équipe, celles-ci se sont dissipées à la faveur d'une série de douze victoires et un nul sur les treize derniers matches, toutes compétitions confondues.
Au lendemain du festival contre Wolfsburg, le week-end dernier, l'ancien attaquant international Fredi Bobic, qui préside aux destinées sportives de l'Eintracht Francfort et qui, à ce titre, a été le supérieur de Kovac ces dernières saisons, a livré un avis sans équivoque. "Je trouve sa maîtrise brillante", a-t-il formulé à la télévision à propos du coach bavarois. "On m'a questionné à ce sujet après le 3-3 du Bayern à domicile contre Düsseldorf (le 24 novembre). Moi, je m'occupe des destinées de l'Eintracht Francfort, qu'il a quitté l'été dernier, mais je dis très volontiers du bien de lui, car je suis totalement convaincu par ce qu'il fait."
Avant d'enchaîner : "Être un battant fait partie de son ADN, tout comme cette capacité à surmonter une situation difficile et à trouver son chemin vers le succès. Il a fait front. Je l'estime complètement, et également comme joueur et comme être humain. Comme entraîneur, à Francfort, il a aussi traversé des situations difficiles et il les a toujours traversées avec succès, en compagnie de son frère. Aujourd'hui, les victoires lui donnent totalement raison. Son équipe est au top de sa forme."
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Niko Kovac (FC Bayern München)

Crédit: Getty Images

Oliver Kahn en approche

Et le processus de transition enclenché par ses dirigeants a trouvé, concomitamment, un nouvel éclat. Les discussions avec Oliver Kahn pour intégrer celui-ci à la direction du club à moyen terme sont en bonne voie. Uli Hoeness, qui occupe toujours autant de place médiatique, même s'il a laissé une once d'espace à son directeur sportif Hasan Salihamidzic afin qui celui-ci s'affirme, a claironné récemment, sourire aux lèvres, que le Bayern était en phase très avancée de recrutement tous azimuts et qu'on allait voir ce qu'on allait voir. Tant que son club gagne, tant qu'il est en course pour le triplé Coupe d'Europe-Coupe nationale-Bundesliga, il s'avance sur du velours.
Dans cette configuration, le temps joue pour lui. Ses anciens tiennent le choc, ses jeunes pousses s'aguerrissent. Mieux : revigorés par l'annonce fracassante du sélectionneur Joachim Löw de les écarter de la Mannschaft, les trois champions du monde Jérôme Boateng (30 ans), Mats Hummels (30 ans) et Thomas Müller (29 ans) ont sifflé depuis le refrain de l'orgueil. Impressionnant contre Wolfsburg, le trio n'a pas surpris Klaus Allofs dans sa capacité à se relever de fierté : "Il n'y a pas de meilleure motivation, aussi bien pour leurs coéquipiers que pour eux, dans un match comme celui-là, pour montrer qu'ils ne sont pas à mettre à la retraite, qu'ils sont encore en mesure de très bien jouer au football. Il fallait s'attendre à une telle réaction d'orgueil", a formulé l'ancien avant-centre sur le plateau de l'émission dominicale "Doppelpass".

Kimmich, Süle et Goretzka pour assurer la relève

Il est trop tôt, cependant, pour juger pleinement de la transition amorcée par le Bayern après une longue période de choix pertinents s'étirant de l'avènement de Philipp Lahm, Bastian Schweinsteiger et Manuel Neuer à cette série, inédite dans l'histoire, de six titres de champion consécutifs. Certes, des convictions se forgent. Joshua Kimmich (24 ans), médiatiquement et humainement déjà mûr, est le futur patron. Niklas Süle (23 ans) est déjà le n°1 dans la hiérarchie des défenseurs centraux. Lucas Hernandez (23 ans), attendu l'an prochain, est une valeur sûre parmi les défenseurs européens. Leon Goretzka (24 ans) marche sur les traces stylistiques, mutatis mutandis, de Michael Ballack.
Kai Havertz (19 ans), qui s'affirme semaine après semaine à Leverkusen comme un petit Özil est annoncé moyennant 65 millions d'euros. Timo Werner (23 ans) se verrait bien en successeur de Robert Lewandowski. D'autres petits prodiges techniques, comme Callum Hudson-Odoi (18 ans) ou Julian Brandt (23 ans), sont également sur les tablettes.
Appétissant, mais quelques incertitudes demeurent. Benjamin Pavard s'affirmera-t-il ? Le jeune prodige Fiete Arp, en provenance de Hambourg, a-t-il les épaules d'un meneur de jeu capable de rivaliser avec les autres cracks du pays ? Le successeur de Manuel Neuer est-il né ? Le centre de formation, modernisé à coups de dizaines de millions d'euros par le club sous l'impulsion de l'omniprésent Hoeness, accouchera-t-il de dignes successeurs de David Alaba, dernier "monstre" formé en Bavière ? Au Bayern, le sourire est en tout cas revenu dans le carré VIP. Ce serait presque suffisant pour maintenir le reste du pays dans son complexe d'infériorité. Quant à l'Europe...
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