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En avance chez les grands mais en retard chez les jeunes : le Bayern Munich en formation accélérée

David Lortholary

Mis à jour 08/08/2020 à 20:29 GMT+2

LIGUE DES CHAMPIONS - La profonde rénovation du secteur de la formation, avec un "Bayern Campus" flambant neuf, était l'une des fiertés de la fin de mandat d'Uli Hoeness. À travers les récents et éclatants succès de l'équipe réserve, le Bayern confirme que cet axe "jeunesse" est désormais une priorité et un atout supplémentaire en Bavière.

FC Bayern München | Joshua Zirkzee

Crédit: Getty Images

La performance a marqué les esprits. Cet été, le "FC Bayern München II", l'équipe réserve du Bayern, est devenue championne de troisième division en battant une série de records. En enregistrant 65 points (dans un championnat à 20 clubs et 38 journées), le groupe entraîné par Sebastian Hoeness a effacé sa meilleure performance, qui datait de la saison 2008-2009 (59 points). Le Bayern, à cet étage, est le premier promu de l'histoire à rafler le titre : en 2013-2014, le RB Leipzig, dans la même situation, avait terminé deuxième.
Et ce avec une équipe particulièrement jeune : l'âge moyen des joueurs utilisés en championnat cette saison est de 22,2 ans, ce qui fait de la réserve du Bayern l'équipe la plus précoce de la compétition, et la plus jeune de l'histoire à terminer à l'une des quatre premières places.
Ces records collectifs s'accompagnent, forcément, de perfs individuelles. Le 9 juin, à l'occasion de la victoire 2-0 contre Zwickau, l'Anglo-Allemand Jamal Musiala a inscrit son troisième but en troisième division à l'âge de 17 ans et 104 jours. Un seul joueur, dans l'histoire, s'est montré plus précoce : un certain David Alaba, en 2009-2010, à l'âge de 17 ans et 66 jours, lui aussi, évidemment, pour la réserve du Bayern.
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Bayern-Star David Alaba

Crédit: Getty Images

Côté buteurs, justement, Kwasi Okyere Wriedt a terminé au sommet de la hiérarchie avec 24 buts, recevant pour l'occasion un tout nouveau trophée. Le Germano-Ghanéen aurait pu effacer des tablettes le meilleur buteur de l'histoire sur une saison, l'Allemand Dominik Stroh-Engel, auteur de 27 buts avec Darmstadt en 2013-2014 ; las, transféré au 1er juillet à Willem II, "Otschi" a été contraint d'assister en spectateur aux deux derniers matches de la saison, son nouvel employeur néerlandais refusant qu'il aille au terme de cette dernière avec le Bayern.

Le "chancelier" et son minutieux réseau

L'architecte de cette saison marquante ? Sebastian Hoeness, donc, fils de Dieter et neveu d'Uli, parti depuis à Hoffenheim pour y coacher l'équipe de Bundesliga – preuve de sa valeur – et remplacé le 3 août et jusqu'à nouvel ordre par son ancien adjoint, l'Allemand Dirk Teschke. À Munich, on ne rigole plus, désormais, avec les structures des équipes de jeunes, d'autant moins que, depuis les éclosions de Thomas Müller (il y a plus d'une décennie) puis David Alaba (un an plus tard), on attend avec impatience celle d'un futur prodige.
Si de grands noms du football en Allemagne, tels Miroslav Klose – ancien entraîneur des moins de 17 ans devenu cet été adjoint d'Hansi Flick au plus haut niveau – ou Halil Altintop, nouvel adjoint chez les moins de 16 ans, font leurs gammes d'entraîneur au sein du centre de formation, le "chancelier" de la structure s'appelle Jochen Sauer.
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Hermann Gerland (l.) und Jochen Sauer vom FC Bayern

Crédit: Imago

Ce juriste de 47 ans dirige depuis 2017 le "Bayern Campus", inauguré il y a trois ans, avec vue imprenable sur l'Allianz Arena, au nord de Munich. Nul doute que ses études de droit ont forgé les qualités de ponctualité, de précision et la pensée structurée de Sauer, ancien footballeur mais surtout champion de golf dans sa jeunesse dans le sud-ouest de l'Allemagne. Bien que supporter et abonné du VfB Stuttgart, c'est à Munich 1860 qu'il a effectué ses premières missions d'encadrement.
Mais en raison des tergiversations du patron du club de l'époque, Karl-Heinz Wildmoser, il a filé bien vite à Berlin où Dieter Hoeness, qui y officiait comme manager, l'a recruté pour le Hertha. Il a ainsi commencé à tisser un minutieux réseau basé sur la filière souabe, dont il est issu. Un exemple ? Le Sud-Africain Lance Davids, dont il a favorisé l'éclosion à 1860 au tournant du siècle, est aujourd'hui l'agent d'un certain Taylor Booth, milieu international américain de 19 ans recruté cette année par le Bayern

Amener la formation munichoise dans le top 5 européen

Passé ensuite par Wolfsburg (2010) puis la galaxie Red Bull (2012), il démontre depuis une décennie à quel point son assiduité, son intégrité, ses capacités d'analyse et sa compréhension de la chose footballistique mènent à la performance, non sans y ajouter des qualités humaines remarquées. La découverte de pointures tels Sadio Mané, devenu depuis une vedette mondiale à Liverpool, Naby Keita (également chez les Reds) ou Dayot Upamecano (le défenseur central très courtisé du RB Leipzig) est à porter à son crédit.
Pas étonnant, dès lors, qu'un certain Ralf Rangnick formule à son égard des propos dithyrambiques lorsqu'il évoque, dans le bi-hebdomadaire kicker, leur passé commun à Salzbourg. "C'était une période fantastique, qui aurait difficilement pu être plus fructueuse. Tout ce que nous y avons développé en trois saisons était basé sur notre collaboration."
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Ralf Rangnick

Crédit: Getty Images

Aussi essentiel soit-il dans le parcours de Sauer, Rangnick n'est que l'une des "têtes" du football côtoyées par l'actuel directeur de la formation bavaroise. La liste est prestigieuse : Lucien Favre, Werner Lorant, Huub Stevens, Felix Magath, Steve McClaren, Gérard Houllier... et on en passe. L'expérience du bonhomme est impressionnante et son accession à ses actuelles fonctions finalement logique, comme en juge Dieter Hoeness : "Au Bayern, on va toujours chercher le personnel dans les meilleurs cercles." Sans doute Sauer aurait-il aisément pu trouver une place chez les professionnels ailleurs mais la mission que lui ont confié ses dirigeants en Bavière est aussi primordiale que prestigieuse : combler l'écart entre le niveau de formation du Bayern et les performances de son équipe première. Autrement dit, amener la formation munichoise dans le top 5 européen.

Hansi Flick puise dans le vivier

La saison qui s'achève, dans cette perspective, a constitué un bond en avant. Outre les performances de l'équipe réserve mentionnées plus haut, les juniors ont remporté leur championnat régional. Plus significatif encore : au cours des dernières semaines de la saison, cinq ou six membres de l'équipe réserve se sont partagés du temps d'entraînement, voire même de jeu, chez les professionnels, sans que les performances des équipes de jeunes n'en pâtissent.
Mais Sauer refuse le feu des projecteurs, partageant ces mérites avec Hermann Gerland (qui est aussi adjoint chez les pros) et Holger Seitz. Ce qui ne l'a pas empêché de prolonger, fin avril, son contrat jusqu'en 2023, refusant par là même telle ou telle offre venue d'ailleurs et s'attirant les louanges du nouvel homme fort chez les pros, le directeur sportif Hasan Salihamidzic.
Car le travail de formation ruisselle désormais jusque dans le groupe d'Hansi Flick, qui y a intégré depuis novembre des talents comme le Néerlandais Joshua Zirkzee, le Néo-Zélandais Sarpreet Singh ou le Germano-Brésilien Oliver Batista-Meier. Pour la plus grande joie des dirigeants, qui entendent accentuer cette tendance avec deux paramètres à l'esprit : d'une part, faire émerger un nouveau symbole d'identification bavaroise dans les traces de Thomas Müller, d'autre part maîtriser les finances dans le contexte de pandémie virale et de concurrence avec les nouveaux riches.
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Sarpreet Singh stand gegen Freiburg erstmals in der Bayern-Startelf

Crédit: Getty Images

Sauer, dont l'un des axes de philosophie est que le talent n'attend pas le nombre des années, est la cheville ouvrière parfaite d'un tel projet. Et si les talents émergents ne s'imposent pas chez les pros maison, ils iront tenter leur chance ailleurs. Tel Meritan Shabani à Wolverhampton, Jonathan Meier à Mayence, Jeong Woo Yeong à Fribourg ou Maxime Awoudja à Stuttgart, dont les départs ont gonflé la tirelire bavaroise de près de 10 M€. Mais, même si le "Bayern Campus "a coûté 70 M€, vendre des joueurs n'est pas une priorité. S'il est favori de l'actuelle Ligue des champions, le Bayern fait aussi en sorte de former ceux qui lui permettront de l'être encore à l'avenir.
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