Incident avec Gervinho à Rotterdam : La banane gonflable, entre tradition... et racisme ?

A chaque semaine son affaire aux relents racistes qui secoue le football européen. Huit jours après l’incident impliquant des supporters de Chelsea dans le métro parisien, ceux de Feyenoord ont fait parler d’eux ce jeudi. La raison ? Une banane gonflable arrivée depuis les tribunes du stade De Kuip et venue se poser près de Gervinho, à la 37e minute du 16e de finale retour de Ligue Europa opposant le club de Rotterdam à l’AS Rome (1-2). Un incident qui a contraint Clément Turpin à arrêter la rencontre durant deux minutes. Hasard ou coïncidence, difficile de le certifier au vu des images, même si la thèse de l’accident a souvent bon dos dans un tel cas. Au moment des faits, les réseaux sociaux ont eu vite fait de s’enflammer suite à ce nouvel acte à caractère raciste.

Une condamnation que réfute Fred Rutten. Pour l’entraîneur de Feyenoord, la polémique est "inutile" et les accusations de racisme n’ont "aucun sens"."Je ne pense pas que ce soit un geste avec une telle connotation, nous avons des joueurs noirs dans notre équipe". Un remix des excuses maintes fois utilisées pour se laver de tout soupçon. Mais il faut dire que dans ce cas précis, celui qui est à l'origine de cette histoire a au moins le droit au bénéfice du doute. Parce que les bananes et autres objets gonflables font partie d’une vieille tradition dans les travées de De Kuip. Venue d’Angleterre, où elle avait fait irruption à Manchester City avant de pulluler partout dans le Royaume, elle a débarqué à Rotterdam dans les années 90.

A l’époque, les bananes étaient présentes chaque semaine dans les tribunes et faisaient partie du folklore d’un match du Feyenoord. Mais la tradition s’est perdue en route, au fil des années. Elle est désormais remise au goût du jour par intermittence, comme lors de la réception d’Héraclés en octobre 2013. Un "one shot", ou presque.

C’est aussi pour ça que l’incident de jeudi est plus que douteux. Même si la banane volante aurait pu échapper à son propriétaire et venir malencontreusement vers Gervinho, sous l’effet du vent, la coïncidence est trop grosse pour être passée sous silence. Surtout que Feyenoord a un passif lourd avec ses supporters, qui figurent parmi les plus dangereux du continent et qui restent un problème insoluble pour les dirigeants. Ils l'avaient déjà rappelé avant le match aller, en saccageant les rues de Rome, et ont encore provoqué l'interruption du match en jetant divers objets sur la pelouse jeudi.

Une frange des fans tend vers l'optimisme, par opposition primaire à l'Ajax, où les supporters se réclament d'une identité juive qui ne se retrouve pas dans les racines du club. En août dernier, Feyenoord a été condamné pour comportement raciste par l’UEFA . La commission de discipline de l’instance européenne avait alors sanctionné le club néerlandais d’un huis-clos partiel et d’une amende de 45 000 euros, pour des chants anti-islam lors du troisième tour préliminaire de Ligue des champions face au Besiktas. Un paradoxe pour Rotterdam, ville qui a élu en 2009 un maire musulman, fils d’un imam et né au Maroc. Preuve que le football n’aime rien de plus que marcher sur la tête.