Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Relancer ou reconstruire, Arsenal devra faire le bon choix

Bruno Constant

Publié 15/03/2018 à 00:57 GMT+1

LIGUE EUROPA - Si Arsène Wenger n’a toujours pas l’intention de quitter son poste avant la dernière année de son contrat, ses dirigeants, qui étudient plusieurs pistes à sa succession, semblent partagés entre l’idée rassurante d’un manager d’expérience et celle d’un jeune technicien qui pourrait écrire un nouveau chapitre du club.

Arsène Wenger lors de la rencontre entre Arsenal et Chelsea / Premier League

Crédit: Getty Images

Le temps change vite en football, très vite même. Sacré champion il y a moins de dix mois, Chelsea cherche déjà un successeur à Antonio Conte. Porté en triomphe comme le successeur désigné d’Alex Ferguson après avoir décroché l’Europa League dès sa première saison, Jose Mourinho et son jeu ultra défensif ont fini par lasser les supporters de Manchester United qui débattent du profil du prochain manager des Red Devils depuis l’élimination du club en huitièmes de finale de la Ligue des Champions.
A Arsenal, en revanche, le temps s’écoule lentement, trop lentement au goût des fans qui aimeraient voir un nouvel homme aux idées neuves à la place d’Arsène Wenger, dont le tour d’honneur dure depuis trop longtemps. L’Alsacien a toujours dit qu’il irait au bout de ses contrats, le sien court jusqu’en 2019, mais cela n’empêche pas le board du club londonien, pressé par les supporters et par la dégringolade de l’équipe, de chercher un successeur. La mission ne s’annonce pas simple.
D’abord parce qu’Arsenal n’est pas un club comme les autres, qu’il lui faut remplacer un monument en place depuis bientôt 22 ans, un technicien qui a révolutionné le club et une partie du football anglais à son arrivée. Mais aussi un homme qui a trop longtemps concentré tous les pouvoirs sportifs. Ensuite parce que le club londonien aurait tort de reproduire les erreurs de Manchester United après la succession ratée d’Alex Ferguson.
picture

Wenger et Ferguson en 2009/2010

Crédit: AFP

Tout le monde savait que ce serait difficile et les dirigeants mancuniens se sont quand même trompés. En premier lieu, remplacer Ferguson en misant sur Moyes qui n’avait pas la carrure pour le poste. Puis quand les dirigeants ont opté pour Van Gaal dont l’ego semblait plus grand encore que l’histoire du club. La tentation Mourinho pour remettre le club sur le droit chemin et surtout celui du succès était légitime quand on connaît le pedigree du bonhomme mais beaucoup savaient que l’approche ultra défensive voire négative du Special One irait un jour à l’encontre de la philosophie de United et de ses supporters. Il aura fallu attendre dix-huit mois de règne « mourinhien », pas plus, pour entendre ceux qui critiquaient Van Gaal entonner le même refrain : "Attack ! Attack ! Attack !" Et à peine plus, depuis l’élimination sans gloire ni combat face à Séville pour les voir discuter du profil du remplaçant du Portugais. Ce n’est pas faute de les avoir avertis, pas plus que les supporters d’Arsenal sur le déclin annoncé de Wenger.

Plusieurs profils de managers, aucune vision

D’Old Trafford en 2013 à l’Emirates Stadium en 2018, le chantier n’est pas très différent si ce n’est que MU était un champion en titre. Mais un champion reposant davantage sur l’aura de son manager que sur le talent de ses joueurs. Ses cadres étaient vieillissants (Ferdinand, Vidic, Giggs, Evra) et sa relève des paris ratés (Rafael, Welbeck, Nani, Cleverley, Evans…). Arsenal est un peu dans le même cas de figure avec des rares "anciens" (Cech, Koscielny, Monreal, Mertesacker) usés par le temps et l’irrégularité de ceux qui les entourent : les espoirs peinent à confirmer (Ramsey, Wilshere, Bellerin, Chambers, Iwobi, Holding) et des recrues ont déçu (Mustafi, Xhaka, Welbeck voire Lacazette). Néanmoins, le renouvellement amorcé en janvier (arrivées d’Aubameyang et Mkhitaryan, départs d’Alexis, Giroud, Walcott et Coquelin, prolongation d’Özil) devrait pouvoir éviter un remaniement trop profond à condition de viser juste cet été (un défenseur central voire deux, un milieu défensif axial voire un joueur offensif) auxquels Kolasinac, Elneny, Maitland-Niles seront d’excellentes additions. Un travail entrepris par les arrivées successives en coulisses de Huss Fahmy (directeur juridique et commercial, ex Team Sky), Sven Mislintat (recrutement, ex Dortmund) et Raul Sanellhi (relations football, ex Barcelone).
La course à la succession n’est pas officiellement ouverte, ce qui est déjà un tort en soi, mais tout le monde y va de son petit nom : Carlo Ancelotti pour Mikael Silvestre, Sean Dyche pour Ian Wright, Thierry Henry pour Jamie Redknapp, Leonardo Jardim pour une partie des médias, Mikel Arteta pour l’autre… Reste à savoir si c’est l’effectif qui doit définir le profil du prochain manager ou ce dernier qui doit le redessiner à son image pour repartir de zéro ? Et c’est bien là le casse-tête des dirigeants d’Arsenal qui ne semblent pas vraiment savoir à quel saint se vouer. La liste des candidats potentiels compte aussi bien Ancelotti (58 ans), Löw (58 ans), Rodgers (45 ans), Henry (40 ans), Arteta (35 ans)… Autant dire qu’il y en a pour tous les goûts, plus ou moins expérimentés et donc plusieurs visions, à court, moyen ou long terme.

Jardim, le favori du board

Carlo Ancelotti serait une option "rassurante à court terme". Son expérience et son palmarès plaident en saveur. Il a déjà travaillé en Angleterre (2 saisons à Chelsea) et y a remporté le titre (2010) avec un football offensif. Mais le technicien de 58 ans, sollicité pour un retour au PSG ou à Chelsea, est davantage habitué à gérer des effectifs riches et expérimentés (Juve, Milan, Chelsea, PSG, Real, Bayern).
picture

Leonardo Jardim, entraîneur de l'AS Monaco

Crédit: Getty Images

Joachim Löw, rêve des dirigeants, est à la tête d’une sélection (Allemagne) depuis maintenant douze ans et rien ne dit qu’il est adapté à un club ni qu’il en a l’envie. Leonardo Jardim et Brendan Rodgers sont sans doute ceux qui correspondent le mieux au profil de l’effectif actuel. Ce sont des bâtisseurs capables de faire progresser un groupe tout en intégrant des jeunes. Le Portugais serait d’ailleurs le favori du board d’Arsenal tandis que le Nord-irlandais, malgré une belle expérience à Liverpool, reste marqué par l’image d’un manager qui ne gagne pas de trophée (en dehors du championnat d’Ecosse avec le Celtic) et échoue en Ligue des Champions.

Henry, le choix du peuple

Les anciens du club ont également la cote. Le premier fait déjà chavirer le cœur du peuple rouge et blanc : Thierry Henry, intronisé officiellement dans la course par Jamie Redknapp en direct sur Sky après la finale de la Coupe de la Ligue perdue face à Manchester City (0-3) : "Arsenal a besoin de quelqu’un jeune, frais, qui a faim et il est assis à côté de moi dans ce studio..." Il est écrit que Henry sera un jour sur le banc d’Arsenal. Mais rien ne sera simple pour la légende du club qui entretient des rapports capricieux avec Wenger et pour qui la proposition arriverait un peu tôt cet été.
A 40 ans, Henry a peu d’expérience de terrain en dehors d’un apprentissage avec les jeunes d’Arsenal et son rôle de "troisième assistant", comme il aime le rappeler, de Roberto Martinez à la tête de la Belgique. Très loin des années passées par Zinédine Zidane et Pep Guardiola à la tête des équipes B du Real Madrid et du Barça. Mais ce manque peut être comblé avec l’apport d’un adjoint. L’idée d’un duo Henry - Bergkamp suscite l’excitation de leur association passée sur le terrain. Or, le public d’Arsenal a besoin de rêver à nouveau. Henry a tout réussi à Arsenal, y compris son retour au club en tant que joueur en 2012. J’avoue être, moi aussi, excité à l’idée de voir "Titi" s’agiter en costume trois pièces sur le bord de la touche. Le Français dégage la même exigence vis-à-vis du jeu que Guardiola et l’aura pour rallier l’amour autour du club et remotiver les troupes, à condition de lui laisser trois années pour travailler et rebâtir.

Vieira, l’oublié…

Patrick Vieira est souvent oublié et son interview à L’Equipe, où il déclare être "prêt", était une manière de rappeler qu’il était disponible. Loin (au New York City) mais disponible. Il est difficile de jauger le niveau de la MLS mais l’ancien capitaine de la sélection américaine Alexi Lalas a déclaré récemment que la formation de Vieira était la seule de la ligue à avoir un vrai style de jeu reconnaissable.
picture

Patrick Vieira wird ab 2016 neuer Trainer in New York

Crédit: AFP

S’il reste encore très marqué "Manchester City" où il est sous contrat depuis 2010 entre son passage de joueur, de responsable dans le développement des jeunes puis d’entraîneur de la réserve et enfin du New York FC, club satellite de… City, Vieira reste une figure emblématique à Arsenal. Si vous demandez aux supporters qui incarne le mieux les glorieuses années, ils vous répondent davantage Vieira que Henry. Son départ a d’ailleurs coïncidé au dernier trophée (la Cup en 2005) avant une longue disette (8 ans). Néanmoins, son absence de la course à la succession s’explique par les rapports compliqués qu’il entretient avec Wenger et sa déception affichée, comme bon nombre d’anciens, de ne pas avoir été appelé pour devenir son adjoint.

Arteta, la préférence de Wenger ?

Pour Vieira comme pour Henry, le retour à la maison n’est pas un gage de réussite. Si les expériences de Zidane au Real Madrid et Guardiola au Barça (puis au Bayern et à City) ont été et sont encore des réussites magistrales, Alan Shearer n’est resté que huit matches sur le banc de Newcastle qu’il n’a pu sauver (2009) tandis que Ryan Giggs est demeuré dans l’ombre à Manchester United sans jamais convaincre les dirigeants de lui laisser les clés de la maison. Néanmoins, un autre ancien Gunner semble avoir les faveurs du roi : Mikel Arteta, passé par Arsenal (2011-2016) dont il fut le capitaine et désormais adjoint de Guardiola à City depuis 2016. Dans les couloirs du club londonien, on dit que Wenger aimerait voir l’Espagnol lui succéder. Un dernier tour de passe-passe pour fermer la porte aux anciens qui l’ont critiqué trop facilement à son goût ?
Bruno Constant fut le correspondant de L’Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd’hui avec RTL et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté. Pour approfondir le sujet, écoutez mon Podcast 100% foot anglais sur l’actualité de la Premier League et du football britannique.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Partager cet article
Publicité
Publicité