L'antisèche de France - Eire : Mbappé - Fekir, un duo de magie qu'on aimerait revoir

Il y avait eu le 4-4-2 à plat face à la Colombie, puis le retour au 4-3-3 devant la Russie. Cette fois, Didier Deschamps a choisi d'innover, optant pour un milieu de terrain en losange mené par Nabil Fekir. Devant lui, Kylian Mbappé a pris énormément de liberté. Et puisque la défense irlandaise avait choisi de densifier l'axe, les Bleus ont installé leur domination par les côtés. Durant le premier quart d'heure, l'équipe de France a monopolisé le ballon 89% du temps. Mais jusqu'alors, le tout a probablement manqué d'un peu de vitesse, de justesse et d'audace pour fissurer le mur vert, inoffensif.

Puis les vice-champions d'Europe ont accéléré. Après quelques centres infructueux, Mendy et Sidibé ont amené eux-mêmes le danger dans la surface, le premier trouvant une position de frappe (25e), le second offrant un ballon en retrait pour Tolisso (37e). Entretemps, les Bleus avaient aussi déstabilisé le bloc de l'Eire grâce aux incessantes combinaisons nouées entre Mbappé et Fekir, qui ont permis au Parisien de tenter sa chance à plusieurs reprises (17e, 31e). Le salut est venu d'un corner et de l'abnégation de Giroud (40e), et le Lyonnais a fait le break avec beaucoup de réussite.

Didier Deschamps sait qu'il a désormais une nouvelle corde à son arc. L'entente entre Fekir et Mbappé a fait des étincelles. Très mobile et créatif, intenable dans le jeu court, le duo a compensé la relative timidité de Corentin Tolisso et masqué les limites de Blaise Matuidi à la création. Il a, aussi, contraint l'arrière-garde irlandaise à resserrer les rangs, ouvrant des espaces aux latéraux.

James McClean et Jonathan Walters sevrés de ballons, Benjamin Mendy et Djibril Sidibé ont ainsi pu étaler leurs qualités offensives sans avoir à masquer leurs failles défensives. Les autres Bleus se sont contentés de faire le job devant une opposition faiblarde, incarnée par le portier Colin Doyle, coupable deux fois sur le but de Fekir.

Ce n'est pas un hasard si l'équipe de France a baissé de rythme après l'heure de jeu et la sortie du joyau de l'OL. Le dispositif n'a pas véritablement été corrigé malgré l'entrée d'Antoine Griezmann, mais Kylian Mbappé a naturellement été repoussé sur l'aile droite, l'attaquant de l'Atlético de Madrid ayant pour habitude d'utiliser beaucoup plus d'espaces aux abords de la surface adverse. Les trois attaquants ont ensuite aligné les mésententes.

72e sélection, comme Platini, et 31e but, comme Zidane. Même quand il est discret, Giroud sait toujours se mettre en valeur.

La performance du soir lui a peut-être mis la puce à l'oreille. Dans l'absolu, ce système de jeu est ô combien séduisant avec les joueurs à la disposition du sélectionneur français. Mais ce schéma comporte encore trop d'inconnus. D'abord parce qu'il implique le sacrifice d'Antoine Griezmann ou Olivier Giroud. Pour l'heure, c'est inenvisageable : le premier est encore la pièce maîtresse du sélectionneur et le second est toujours son arme la plus infaillible, comme l'a démontré son 31e but en Bleu.

Ensuite, parce qu'il réclame d'autres nombreux réajustements, du rôle hybride de Pogba à celui de premier relanceur de N'Golo Kanté, et que Didier Deschamps est pragmatique. La faiblesse de l'opposition n'a apporté aucun indice sur la véritable solidité des Bleus dans un tel schéma, malgré les gigantesques trous d'air laissés par les latéraux derrière eux. A un peu plus de quinze jours du Mondial, les équations à résoudre sont probablement trop nombreuses.