Les Bleus défendent Pogba : "Il est jugé différemment mais il n'est ni attaquant ni gardien de but"

"Mais non, tu sais bien que je ne parle pas. Ca va très bien." Dans un sourire charmeur, Paul Pogba a gentiment fait comprendre à un de nos confrères qu'il ne s'exprimerait pas après France-Italie (3-1). Tous sauf une surprise pour celui qui n'aime guère la confrontation face aux journalistes après ses matches. Dommage. Car hormis la victoire convaincante, cette soirée fut marquée par des sifflets nourris à son encontre. Si Florian Thauvin a subi le même traitement en sa qualité de Marseillais, ceux dirigés contre Pogba avaient des airs de sanction. Une première bronca a accompagné une frappe totalement dévisée, puis une seconde, plus nourrie encore, lors de son remplacement. Une conclusion malheureuse d'une soirée bien poussive.

"Les sifflets, je ne les comprends pas", l'a défendu Pavard. "Le public doit être derrière ses joueurs." Plus philosophe, Mbappé a pointé la versatilité du public tricolore : "Il joue à l'étranger, il n'a pas l'habitude. Je vais lui expliquer que c'est comme ça ici. Je joue ici toute l'année. Il doit s'habituer." S'il a trouvé quelques décalages avant la pause, il a mis une demi-heure pour rentrer dans son match avant de souffrir dans l'engagement. Ses coéquipiers ont évidemment une autre lecture, du moins devant les micros. Kylian Mbappé l'a, par exemple, trouvé "bon".

Didier Deschamps s'est montré sans doute plus juste dans son jugement : "Paul n'a pas tout réussi, il était moins dans la phase offensive, mais il le fait pour l'équipe..." Est-ce une question de confiance après une saison contrastée à Manchester United ? "Il a une grosse confiance en lui, on le voit tous les jours à l'entraînement", balaie son complice Antoine Griezmann. Ou alors de rythme pour celui qui n'avait pas débuter face à l'Irlande ? "Paul, c'était son match de reprise", l'a défendu Deschamps.

Pour ses équipiers chez les Bleus, le problème est ailleurs : "J'ai l'impression que Paul Pogba quoi qu'il fasse, on lui demande toujours de faire plus", diagnostique Mbappé. "Il faut admirer le joueur qu'on a et avoir conscience de la chance qu'on a qu'il soit français. C'est dommage qu'il y ait ce genre de choses." Pogba charrie-t-il vraiment cet éternel malentendu ? Le débat est aussi vieux que sa présence en équipe de France. Depuis 2013 des questions entourent sa meilleure position et son rôle exact dans le collectif.

"Paul est jugé différemment", continue Mbappé. "Les gens attendent un dépassement de fonction. Mais il est milieu de terrain, il n'est pas attaquant, il n'est pas gardien de but. On ne demande pas de marquer à tous les matches mais d'apporter sa vista et son impact." Dans un rôle plus sobre, plus défensif, il a malgré tout manqué d'impact. "Il n'a pas tout bien fait", concède son sélectionneur. "Mais il a permis à l'équipe d'être efficace sur le plan défensif, pas forcément là où vous l'attendez, mais par moments il doit y être aussi..."

Le moment n'est pas bien choisi pour un coup de mou. D'abord parce que la Coupe du monde des Bleus va démarrer dans quinze jours. Ensuite parce que la concurrence au milieu de terrain n'a jamais été aussi féroce. Ce 4-3-3 assure une place à N'Golo Kanté en sentinelle. Restent Corentin Tolisso, au volume de jeu considérable et aux performances très convaincantes en sélection, Blaise Matuidi, toujours très régulier, et Paul Pogba. "J'ai le choix", a sobrement commenté Didier Deschamps.

Jusqu'ici, le milieu de Manchester United s'en est toujours sorti. Tancé à l'Euro, il a répondu par une tête rageuse contre l'Islande en quart de finale puis par une demi-finale parfaite contre l'Allemagne. Remis en cause en mars, il a ajusté un superbe coup franc en amical contre la Russie (3-1), assorti d'une passe décisive pour Kylian Mbappé. Il se doit d'être plus régulier, son poids en sélection l'exige. Il a avoué ces dernières semaines vouloir "prendre les rênes de l'équipe de France". A Nice, son statut s'est effrité. Le leader a disparu. Sous les sifflets.