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Rooney n'est plus vraiment Rooney, le derby arrive à point pour qu'il le redevienne

Philippe Auclair

Mis à jour 25/10/2015 à 13:23 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Hormis quelques rares exceptions, Wayne Rooney enchaîne les prestations insipides cette saison. Louis van Gaal lui maintient pourtant une confiance absolue, dont il pourrait recueillir les dividendes dimanche lors d'un derby de Manchester (15h05) qui a souvent réussi à l'attaquant vedette de United.

Wayne Rooney (Manchester United)

Crédit: Panoramic

Si Wayne Rooney n’était pas Wayne Rooney, conserverait-il sa place de titulaire à Manchester United ? Mais est-il encore, est-il toujours Wayne Rooney ? A le voir si isolé, perdu même, si imprécis, si inefficace dans le match nul ramené de Moscou mercredi dernier (1-1), on peut – hélas, mille fois hélas – se poser ces questions. C’est que cette performance fantômatique n’était pas un de ces "jours sans" qui affligent les plus grands, mais un nuage de plus dans le ciel d’une saison morose, dans laquelle les "hauts" peuvent se compter sur la main gauche de Django Reinhardt.
Un hat-trick contre un Bruges totalement dépassé lors du tour préliminaire de Ligue des Champions. Un but à Everton (son premier à l’extérieur en onze mois) à l’occasion de la prestation la plus convaincante des Red Devils depuis l’arrivée de Louis van Gaal à Old Trafford. Et le penalty transformé face à la Suisse le 8 septembre dernier à Wembley, qui lui donnait le plus beau des records du football anglais, celui du nombre de buts marqués en sélection. 50 en 107 matchs, c’est un de mieux que Sir Bobby Charlton en 106. C'est magnifique. Cela ressemble aussi à l’une des dernières notes du dernier mouvement de la symphonie qu’il compose et interprète sur les terrains depuis le 17 octobre 2002, quand David Moyes lança le bébé Rooney dans le grand bain à l’occasion d’un nul 2-2 face à Tottenham. Il n’avait encore que seize ans. Il en a eu trente ce samedi. Il est encore jeune. Crisitiano Ronaldo n’est-il pas son aîné de huit mois et demi ?
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Face à la Suisse (2-0), Wayne Rooney a inscrit son 50e but avec l'Angleterre.

Crédit: AFP

Van Gaal ne peut pas ou ne veut pas se passer de lui

Mais ce n’est pas avec un calendrier qu’on calcule le véritable âge d’un footballeur. Cet âge, on le donne en saisons plus qu’en années. Et de ce point de vue, ce n’est pas d’hier que Wayne Rooney est entré dans son automne. L’hiver approche, inéluctablement. Avec 676 matches en club et sélection à son actif – ô combien actif ! – il en a déjà livré presque 200 de plus qu’un autre dieu de Manchester United, Eric Cantona, en avait disputé lorsqu’il décida de tourner la page "football" du livre de sa vie. Fernando Torres, alors dit "grillé", voire "cramé", en avait joué un nombre équivalent lorsque Chelsea jeta l’éponge et l’expédia à l'AC Milan. Didier Drogba, né sept ans et demi plus tôt, en comptait trois de moins à son CV lorsqu’il quitta les Blues pour Galatasaray. Wazza n’a plus l’âge de son surnom d’adolescent. Il n’est même pas sûr qu’il en ait toujours l’âme de rebelle.
Quiconque aime Rooney, et dieu sait que c’est mon cas, aura été peiné par ce qu’on vit à l’Arena Khimki mercredi soir. Je ne veux pas parler des passes ratées, des duels perdus, des opportunités manquées, lesquelles, encore une fois, font parfois partie de l’ordinaire des meilleurs. C’était plutôt l’absence de révolte dans le regard et la gestuelle de l’un des footballeurs les plus agressifs de sa génération, d’un homme qui a toujours haï l’échec, l’a toujours ressenti comme une injustice, pour parfois en perdre la raison. Certains y verront une preuve de maturité : le chien fou n’aboie plus qu’à bon escient. D’autres objecteront que ce serait plutôt le signe que le guerrier est fatigué et se demande si cela vaut encore la peine de se battre - comme un chien, justement.
Et pourtant, Van Gaal ne peut ou ne veut se passer de lui. Le même van Gaal qui fait sortir un champion du monde - Bastian Schweinsteiger - à la mi-temps à Moscou, et qui, dans tous les clubs où il est passé, s’est fait une spécialité de mettre les "tauliers" au frais, tels Rivaldo à Barcelone ou Franck Ribéry au Bayern. Pour le Néerlandais, Rooney, s’il n’est plus tout à fait Rooney, demeure néanmoins indispensable, comme interlocuteur privilégié dans le vestiaire, comme skipper, et dans un rôle de numéro neuf qui n’a pourtant jamais été une seconde nature pour lui.

Le meilleur buteur de l'histoire du derby de Manchester

Et ce alors qu’Anthony Martial n’a certainement pas démérité lorsqu’il lui a été confié. Il est exact que l’an dernier, Rooney fut encore l’attaquant le plus prolifique de United, avec 14 buts. Il est aussi exact que c’était son bilan le plus modeste depuis son transfert au club mancunien il y a onze ans de cela, et que c’était aussi le bilan le plus modeste d’un pichichi de MU depuis 1982. Van Gaal, néanmoins, persévère. Sauf pépin physique de dernière minute, Wayne Rooney sera dans le onze de départ des Red Devils ce dimanche, le brassard de capitaine passé autour de son bras de boxeur.
C’est que rien n’inspire autant l’enfant de Liverpool que devoir se frotter aux "voisins bruyants" de l’Etihad. Parmi les records qu’il détient, il en est un qui tient particulièrement au coeur des habitués d’Old Trafford: que ce soit dans le camp des "rouges" ou des "bleus", aucun joueur n’a marqué autant de buts que Rooney dans le derby mancunien - 11 depuis le 13 février 2005, lorsque United s’imposa 2-0 à Maine Road. Le dernier à Old Trafford, tout le monde s’en souvient. C’était le fameux ciseau retourné décisif à la 78ème minute de la victoire 2-1 de MU le 12 février 2011, qui fut ensuite élu "plus beau but de l’histoire de l’histoire de la Premier League" lorsque celle-ci célébra son vingtième anniversaire. Même lorsque le United de David Moyes sombra 1-4 face aux Citizens en septembre 2013, c’était encore lui qui avait sauvé l’honneur de son équipe en fin de rencontre.
Peut-être ne manque-t-il qu’une nouvelle étincelle pour faire repartir ce moteur pour quelques tours de piste supplémentaires, dont on espère qu’ils seront des tours d’honneur, justement. Peut-être que ce 170e derby sera le silex qu’il fallait frapper pour cela. Si c’est le cas, Manuel Pellegrini a du souci à se faire. Si ce ne l’est pas, rappelons-nous d’abord ce que tout ce que Rooney a donné, car peu de joueurs contemporains se seront montrés aussi généreux que lui. Et qu’il le paie aujourd’hui.
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Wayne Rooney avec Andres Pereira

Crédit: AFP

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