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Football - Premier League : Manchester City, club le plus riche du monde, ne connaît pas la crise

Philippe Auclair

Mis à jour 22/03/2022 à 16:19 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Malgré une saison dernière tronquée par l'épidémie de Covid-19, les mastodontes anglais sont sortis de cette période en étant très stables financièrement. Pour preuve : parmi les 20 clubs les plus riches du monde, 11 évoluent en Angleterre. Non, la "bulle" du football anglais n'a toujours pas éclaté. Et Manchester City en est l'exemple parfait.

Manchester City

Crédit: Getty Images

Il était prévisible que la saison 2020-21, autrement dit la saison des confinements, épargnât davantage ces clubs et ces championnats qui dépendaient le moins de leur billetterie pour alimenter leur chiffre d'affaires. Au premier rang de ceux-là se trouvait évidemment l'Angleterre, forte de contrats TV qu'elle avait eu le nez de prolonger en pleine pandémie.
Et ce sont donc pas moins de onze clubs de Premier League, un nouveau record, qui figurent dans le Top 20 de la toute nouvelle Football Rich List, le rapport que le cabinet comptable londonien Deloitte publie à la fin de chaque hiver depuis 1997. Trois autres, Leeds United, Southampton et Newcastle - celui de Mike Ashley, pas des Saoudiens - ont eux aussi leur place dans le Top 30. Non, la "bulle" du football anglais n'a toujours pas éclaté. Elle continue même de grossir, pour faire de plus en plus d'ombre à la concurrence.

Manchester City dans la cour des très grands

Là n'est pas la surprise. Ce qui en constitue une est l'identité du club qui figure à la première place du classement de Deloitte, une première place que seuls trois institutions du football mondial se sont partagées depuis que ce classement existe : le Real Madrid, Manchester United et Barcelone. Un trio auquel on doit désormais ajouter le champion d'Angleterre en titre, vainqueur de la Coupe de la League et finaliste de la Ligue des Champions : Manchester City.
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Manchester City

Crédit: Getty Images

Le club mancunien a vu son chiffre d'affaires passer de 12,7 à 571,1 millions de livres sterling (644.9 millions d'euros) entre 1997 et 2021, soit une progression de presque 4500 %. Manchester City ne figurait pourtant qu'au sixième rang de ce hit-parade une année plus tôt, derrière Liverpool, mais aussi Manchester United. Comment expliquer un pareil revirement ? Comment expliquer qu'alors que la totalité des autres clubs européens ont vu leurs revenus chuter (et parfois spectaculairement, comme dans le cas de Barcelone, dont le chiffre d'affaire est passé de 713,4 millions d'euros à 582,1 en douze mois), les Citizens, eux, aient ajouté pas loin de cent millions à leur turnover ?
Les résultats y sont pour un peu. Le long parcours de City en Ligue des Champions et le troisième sacre national de l'ère Guardiola ont reçu la récompense qu'ils méritaient. Le secret de la réussite financière du club de Sheikh Mansour est néanmoins ailleurs, encore que parler de "secret" serait prendre une certaine liberté de langage, puisque quiconque se rend à l'Etihad (tiens, tiens !) peut le voir affiché en toutes lettres sur les maillots des coéquipiers de Kevin de Bruyne, sur les tableaux d'affichage et les panneaux lumineux sur lesquels défilent sans discontinuer les noms et les messages des sponsors du club les jours de match.

Les Emirats Arabes Unis, partenaire de folie

Ce secret qui n'en est pas un, ce sont les relations commerciales que Manchester City a nouées avec un nombre remarquable d'entreprises dont il se trouve que beaucoup ont des liens directs avec les Emirats Arabes Unis - et quasiment aucune présence réelle sur le sol britannique. Voilà la véritable origine du miracle.
Comme le confirmera n'importe quel spécialiste du Golfe, c'est avec la bénédiction, voire l'encouragement du prince en place sur le trône que se nouent ce type de relations dans la région. Ce prince est Khalifa bin Zayed Al Nahyan, président des Emirats Arabes Unis, émir d'Abou Dhabi, et...demi-frère du propriétaire nominal de Manchester City, Sheikh Mansour, lui-même vice-premier ministre des Emirats Arabes Unis, dont pas grand monde ne doute qu'il serve de feuille de vigne à son aîné.
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Etihad Stadium

Crédit: Getty Images

Manchester City aura donc eu cette chance inouïe : pile au moment où ses finances pouvaient être mises en danger par l'impact de la pandémie, de nouveaux sponsors se sont manifestés, basés à Dubai ("Expo Dubai" et la société immobilière Aldar), à Abou Dhabi (Masdar, une entreprise d'énergie renouvelable; "Visit Abou Dhabi" - en pleine pandémie, tout de même - et l'hôtel de très grand luxe Emirates Palace). Ces noms s'ajoutaient à ceux de partenaires "historiques" comme Etisalat, le groupe de télécommunications émirati lié à City depuis 2009, et, évidemment, la compagnie aérienne Etihad, qui déboursa pas loin de 500 millions d'euros pour les droits de naming du City of Manchester Stadium en 2011.
La question mille fois posée, dans le cas de City comme dans celui du PSG, est celle de la surévaluation de la valeur des contrats de sponsoring qui permettraient à ces clubs de contourner les faibles obstacles placés sur leur voie par les mécanismes du fair-play financier de l'UEFA. Faibles, voire futiles. Ni l'un ni l'autre club ne furent sanctionnés aussi sévèrement qu'on aurait pu l'escompter pour les libertés qu'ils avaient prises avec la réglementation de l'instance européenne. City avait bien été exclu des compétitions de l'UEFA pour deux saisons dans un premier temps, avant que le TAS n'annule cette sanction en juillet 2020. Le fair-play financier, lui, avait été l'une des premières victimes de la Covid dans le monde du football. Manchester City, par contre, en est sorti indemne, et premier de la classe.

Un Fair-play financier inexistant ?

Du coup, des clubs comme le Barça d'avant le départ de Messi, le Liverpool de Klopp, et même Manchester United, dont le staff commercial est le plus étoffé de quelque club que ce soit au monde, sont désormais à la traîne des Citizens en matière de revenus commerciaux, alors que leurs bases globales de supporters sont bien plus conséquentes que celle de Manchester City. Que le football anglais domine les autres, passe encore quand on voit ses résultats en Europe, et quand on considère son immense popularité partout dans le monde. Il a su mieux se vendre que les autres, c'est ainsi.
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Raheem Sterling - Pep Guardiola - Bernardo Silva, montage par Quentin Guichard

Crédit: Eurosport

Mais comme l'exemple de City le montre, comme celui de Chelsea l'avait montré auparavant, et comme Newcastle risque de le montrer encore plus spectaculairement au cours des mois qui viennent, la Premier League n'a pas son pareil non plus pour fermer les yeux sur des pratiques qui contredisent l'esprit comme la lettre de la "charte" que les présidents de ses vingt clubs s'engagent à honorer.
Cela n'est pas du goût de tous, des fans en particulier, qui souhaitent qu'un régulateur extérieur à la Premier League se voit donner les moyens de remettre un semblant d'ordre dans cette maison où l'argent coule à flots, sans qu'on se demande d'où il provient et s'il a sa place dans le football. L'idée n'est pas nouvelle, mais a gagné en crédibilité après les travaux d'une commission dirigée par l'ancienne ministre conservatrice des Sports Tracey Crouch, et dont les recommandations transformeraient radicalement le paysage du football anglais. Il n'est pas dit qu'elles soient jamais adoptées. Les intérêts économiques, mais aussi diplomatiques, primeront toujours sur le désir de justice de la majorité des fans. Dit autrement, Manchester City n'est pas prêt de descendre de son piédestal, quels que soient les bras qui l'y ont déposé.
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