Manchester United : Tout a changé, tout reste pareil

Manchester United s'avance comme l'une des grandes curiosités de la saison en Premier League au moment d'ouvrir son championnat vendredi face à Fulham (21h). L'arrivée de Sir Jim Ratcliff à la tête du club annonçait une révolution au sein des Red Devils. Le changement peut sembler relatif à première vue, à l'image du maintien d'Erik ten Hag au poste d'entraîneur. Mais...

Old Trafford, l'antre de Manchester United

Crédit: Getty Images

C'est une drôle de saison qui s'annonce en Angleterre, alors que le pays semble encore avoir la tête ailleurs, et notamment à Paris. Le Community Shield - remporté par Manchester City face à Manchester United aux tirs au but le week-end dernier, si vous avez prêté attention - s'est joué dans l'indifférence générale. Des centaines de millions de livres sterling ont changé de main (345 millions d'euros net au 13 août), mais aucun transfert n'a "défrayé la chronique". Les joueurs qui ont participé à l'Euro reviennent à peine de vacances. Il fait chaud, très chaud à Londres. Lee Carsley est le nouvel entraîneur des Three Lions pour un intérim dont on ne serait pas étonné qu'il dure plus longtemps que les règnes de quelques managers de Premier League.
Manchester City est le grandissime favori pour un septième titre en huit ans. Mais Manchester City est aussi coté à 6 contre 1 pour la relégation si tant est que la Premier League tranche enfin le noeud gordien des fameuses 115 infractions (130 en fait) imputées au club de Pep Guardiola au printemps 2025, comme on le dit désormais. Onze des vingt sponsors maillot des clubs de PL sont des opérateurs de paris sportifs plus ou moins légaux (plutôt plus que moins). Everton va quitter Goodison pour emménager dans un magnifique nouveau stade que les Toffees n'ont pas les moyens de payer, et cherche toujours un acheteur après la débâcle 777 Partners. Il faudra se faire à voir Arne et pas Jürgen dans la zone technique de Liverpool, mais, à part ça, c'est le train-train. A une exception : Manchester United.

Ratcliffe ne fuit pas les micros

On nous avait promis la révolution. Sir Jim Ratcliffe, le multimilliardaire de la pétrochimie exilé à Monaco, déjà propriétaire du FC Lausanne-Sport et de l'OGC Nice, enchérisseur déçu pour Chelsea, était finalement parvenu à ses fins ce 20 février en acquérant un peu plus d'un quart des actions de la famille Glazer, obtenant en même temps la direction des affaires sportives du club. A la différence de presque tous les autres propriétaires de clubs de Premier League, Ratcliffe n'a pas fui les micros.
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Jim Ratcliffe, co-propriétaire de Manchester United

Crédit: Getty Images

C'est qu'il avait beaucoup à dire. Ses ambitions étaient claires, à commencer par celle de faire tomber Liverpool et leur voisin de City de leur perchoir "d'ici trois ans". United avait besoin d'un nouveau stade, d'un "Wembley du nord" qui coûterait deux milliards, subventionné en partie par la ville de Manchester, et qui serait construit juste à côté d'Old Trafford. United avait aussi besoin de revoir son mode de fonctionnement de A à Z, ce qu'on s'imaginait concerner au premier chef l'entraîneur en place, Erik ten Hag.

Le paradoxe ten Hag

Six mois plus tard, le Néerlandais demeure pourtant en place. Mieux, sa position parait plus assurée aujourd'hui qu'elle ne l'était avant l'arrivée de Ratcliffe, ce qui est tout de même paradoxal. Ratcliffe n'avait-il pas expliqué qu'il souhaitait faire évoluer la nature du rôle de manager à United, pour passer à un modèle de head coach ? L'arrivée d'un quatuor de dirigeants de fort calibre - Jason Wilcox, Omar Berrada, Sir Dave Brailsford et Dan Ashworth, l'ancien directeur sportif de Newcastle - indiquait que le nouveau régime entendait se diriger vers un type de management "à l'américaine", dans lequel l'identification des recrues, par exemple, n'était plus la chasse réservée du manager. Au lieu de quoi...
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Erik ten Hag

Crédit: Getty Images

Erik ten Hag ne pourra certainement pas se plaindre de ne pas avoir été soutenu par ses dirigeants sur le marché des transferts. Manchester United est à ce jour le seul club anglais à avoir passé - tout juste - la barre des 100 millions d'euros de dépenses en net. Ten Hag voulait Yoro, Zirkzee, De Ligt et Mazraoui, ten Hag les a eus; et la série ne devrait pas s'arrêter là. Les noms de Raphinha, Frenkie de Jong, Ivan Toney et Adrien Rabiot circulent aujourd'hui, et d'autres s'y seront ajoutés d'ici le 30 août, 23:00 heure locale, quand la "fenêtre" des transferts se fermera en Angleterre jusqu'au 1er janvier 2025.

Une empreinte discrète sur le plan sportif...

Il aura aussi été soutenu dans le choix de son staff technique, qu'ont rejoint Rene Hake - qui a démissionné de son poste de manager de Go Ahead Eagles pour rejoindre l'homme avec lequel il avait déjà travaillé au FC Twente - et Ruud van Nistelrooy, qui avait mis fin à sa relation avec le PSV il y a un an. Manchester United est plus hollandais que jamais, même si le pauvre Donny van de Beek a été cédé à Girona pour une bouchée de pain.
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Ruud van Nistelrooy

Crédit: AFP

S'il y a une 'patte' Ratcliffe, son empreinte est donc des plus discrètes, au moins sur le plan purement sportif. Attention : cela ne signifie pas que Ratcliffe ait cédé, et que ten Hag ait "gagné" un bras-de-fer avec son nouveau propriétaire. Ratcliffe, après réflexion, s'est convaincu que la meilleure solution dans l'immédiat était de garder en place un homme qui, malgré les graves dysfonctionnements de son club, venait de lui donner un second trophée en deux ans - la FA Cup -, et en battant Manchester City à la régulière, de plus. Et si ten Hag était bien la "meilleure solution", il fallait lui donner les chances de le prouver.

... beaucoup moins sur la gestion administrative

La "patte" Ratcliffe se fait bien plus sentir dans la gestion du club en tant qu'entreprise; et là, le choc a été rude. Ce 3 juillet, le directeur exécutif intérimaire de MU Jean-Claude Blanc annonçait à une assemblée générale du personnel de Manchester United que 250 des 1100 emplois du club allaient être supprimés. L'ordre venait directement de Ratcliffe. Peu importe que les économies ainsi réalisées ne couvriraient même pas un an de salaire de Mason Mount, et que des serviteurs de longue date du club allaient se retrouver à la rue. On ne devient pas multimilliardaire en faisant du sentiment.
Mais imaginez une seconde qu'une telle mesure ait été prise par les Glazer. C'aurait été l'émeute sur Matt Busby Way. Comme l'économiste du football Kieran Maguire l'a suggéré, l'arrivée de Ratcliffe, le fan de toujours, l'Anglais, permet aux Glazers de garder le contrôle financier du club sans avoir à assumer les responsabilités de sa gestion. Autrement dit, tout devait changer pour que les choses demeurent les mêmes; et c'est ce qu'il s'est passé. La question est désormais de savoir si ce changement sera aussi sensible sur le terrain. Premier élément de réponse ce vendredi soir, contre Fulham.
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