Pour l'Italie, les années passent et les joueurs se ressemblent

La rencontre Bosnie-Belgique a peut-être réalisé un des records d’audience de la saison dans la Botte, pas pour suivre les prestations de Mertens et Dzeko - hommes forts du Napoli et de la Roma - mais pour souhaiter une défaite du pays hôte. Un résultat qui validait mathématiquement la qualification de l’Italie aux playoffs en tant qu’une des huit meilleures deuxièmes.

Le succès 4-3 des Diables Rouges est donc allé dans ce sens, mais pas de quoi exulter vue la piètre prestation de la Nazionale face à la Macédoine la veille (nul 1-1 à Turin). Après huit premiers mois où son travail a été plutôt apprécié, toute la presse et les tifosi continuent de tomber sur Gian Piero Ventura pour ses choix tactiques (le fameux 4-2-4 en Espagne) et l’absence de jeu. Or, un autre aspect pourtant prioritaire pose également problème.

31 ans et 169 jours, c’était l'âge moyen de la Nazionale lors de son premier match du dernier Euro face à la Belgique. Un record dans l’histoire de la compétition et un chiffre que le successeur d’Antonio Conte n’a cessé de pointer du doigt depuis sa prise de fonctions, flirtant avec une certaine ingratitude. Neuf trentenaires figuraient parmi les 23 joueurs ayant passé leur été 2016 en France, cinq sont encore régulièrement appelés aujourd’hui dont 4 des 6 plus âgés : Buffon, Barzagli, De Rossi et Chiellini. Ceux qui ont sauté en cours de route ont surtout payé leur statut en club. Federico Marchetti, alors troisième gardien, est aujourd’hui écarté du groupe pro de la Lazio après avoir perdu sa place de titulaire. Emanuele Giaccherini a un temps de jeu dérisoire au Napoli où il endosse le rôle de doublure d’Insigne depuis l’an dernier.

Enfin, Graziano Pellè paye évidemment sa décision de partir en Chine juste après l’Euro, même s’il était encore dans le groupe il y a un an et que la fin de sa carrière internationale est due à une embrouille avec Ventura (refus de lui serrer la main au moment d’être remplacé). En fait, seul Thiago Motta a été évincé pour la limite d'âge ou des raisons techniques. Pis, 14 de ces 23 sont encore dans les petits papiers de l’ancien entraîneur du Toro. Aux absents déjà cités, il faut ajouter Ogbonna, Zaza, Sirigu, Sturaro et Florenzi qui paye sa double et grave blessure du genou. Sirigu est l’unique néo-trentenaire de ce groupe à être mis à l’écart, puisque les Eder, Bonucci et Candreva sont encore là.

L’ossature de la Squadra Azzurra n’a donc presque pas changé, les références se nomment encore Buffon, la BBC et De Rossi, 35 ans de moyenne d'âge et jamais sur le banc de touche dans les matches décisifs. Il ne s’agit pas de remettre en question la méritocratie puisqu’ils sont ce qui se fait encore de mieux à leur poste en Italie, mais les alterner à des éléments plus jeunes dans les rencontres à enjeu permettrait de faciliter cette fameuse transition générationnelle. Or, parmi les vraies nouveautés de Ventura, c’est à dire les joueurs convoqués au moins sept fois durant son ère, on retrouve Donnarumma et Belotti, impossibles à ne pas convoquer, Verratti qui n’en est pas une puisqu’absent à l’Euro sur blessure, Rugani, Gabbiadini, mais aussi Astori et Montolivo, respectivement 30 et 32 ans.

On se rend compte que le onze-type de Conte à la moyenne d'âge si décriée a à peine été retouché. Dans l'ordre, le duo d’attaque Belotti-Immobile a supplé celui Pellé-Eder (l’italo-brésilien restant le 3ème choix), le retour du petit hibou - quand il est disponible - et Insigne à la place de Giaccherini avec un changement tactique à la clé. Et parmi toutes ces nouveautés, Belotti était le seul à ne jamais avoir été appelé par Conte.

Bien entendu, le jeunisme ne doit pas l’emporter coûte que coûte, mais le fait est que de l'autre côté des Alpes, on a passé les derniers mois à tresser les louanges la génération Espoirs, la meilleure depuis deux décennies. Elle avait d’ailleurs de bonnes chances de remporter l’Euro de la catégorie en juin mais a échoué en demi contre l’Espagne. La grande majorité des sélectionnés de Gigi Di Biagio évoluaient en Serie A et avec un temps de jeu conséquent, de fait, leur intégration au groupe des A paraissait légitime. Toutefois, la malchance a mis sur le carreau Andrea Conti (out six mois) et Ventura doit se passer de Pellegrini pour les mêmes raisons ces jours-ci.

Des garçons comme Rugani, Romagnoli, Gagliardini, Berardi et Bernardeshi ont soit des problèmes de temps de jeu, soit un rendement décevant, ou les deux. Et pour finir, le sélectionneur y met aussi du sien en snobant Caldara ou Chiesa. Certes, beaucoup d’entre eux ainsi que les fameux U26 présents lors des stages spéciaux ont fait leurs débuts en sélection, mais leur rôle reste tout à fait marginal, en atteste la moyenne d’âge du onze aligné face à la Macédoine vendredi : 29 ans et 11 mois. Le risque étant donc de se retrouver dans la même situation à la rentrée 2018 qu’à celle 2016, d’où la satisfaction excessive lorsque Ventura évoque inlassablement son “ricambio generazionale”. Vus les résultats concrets de cette mesure prioritaire, il faudrait peut-être l'appliquer au propre patron de la Squadra Azzurra (69 ans et prolongé jusqu'en 2020 en aout) ainsi à celui qui l'a choisi (Tavecchio, 74 ans, président de la fédération tout juste réélu).