Les plus populaires
Tous les sports
Voir tout

Super Ligue européenne : les questions que posent les menaces de la FIFA et de l'UEFA

Glenn Ceillier

Mis à jour 21/01/2021 à 16:08 GMT+1

La FIFA et les six confédérations du football (AFC, CAF, Concacaf, Conmebol, OFC et UEFA) sont montées au créneau pour affirmer qu'elles banniront de leurs compétitions tout joueur ou club participant à une Super Ligue européenne. Un communiqué qui pose questions. Et en dit long sur ce projet.

Gianni Infantino face à Aleksander Ceferin

Crédit: Getty Images

Quel est le but de ce communiqué commun de la FIFA et des six confédérations du football ?

La FIFA et six confédérations du football (AFC, CAF, Concacaf, Conmebol, OFC et UEFA) ont décidé de passer à l'action ce jeudi. Alors que depuis plusieurs mois maintenant l'hypothèse de la création d'une Super Ligue européenne est régulièrement évoquée dans les médias, ces grandes instances du monde du ballon rond brandissent des menaces claires et dissuasives. "Tout club ou joueur impliqué dans une telle compétition se verrait par conséquent interdire de participer à toute compétition organisée par la FIFA ou les confédérations", écrivent-elles dans un texte commun inédit dans ce dossier. Leur idée ? Stopper net toute initiative de ce type.

Pourquoi ce texte illustre que l'inquiétude monte dans les instances ?

Un tel communiqué n'est pas anodin. C'est même tout l'inverse. Il en dit très long sur l'inquiétude grandissante dans les coulisses de ces instances. Si la FIFA et les grandes confédérations du football (AFC, CAF, Concacaf, Conmebol, OFC et UEFA) montent au créneau, ce n'est pas pour rien. Elles ne prendraient pas la peine de communiquer ainsi pour de simples rumeurs. Cet avertissement illustre qu'une crainte réelle les fait trembler. Et que le dossier "Super Ligue européenne" est sûrement plus avancé que certains veulent bien l'imaginer.
Ce n'est pas forcément une surprise. Depuis plusieurs mois, ce serpent de mer est une nouvelle fois revenu avec insistance. Mais cette fois, les signaux envoyés semblent montrer que ce n'est pas qu'une simple chimère pour mettre la pression sur l'UEFA avant les renégociations pour la réforme de la Ligue des champions en 2024. La crise sanitaire liée au Covid-19 et les difficultés rencontrées actuellement par de nombreux géants sur le plan financier poussent de nombreux dirigeants à s'interroger à une réforme en profondeur du paysage du ballon rond. Avec l'idée de diminuer l'incertitude du sport au profit de leur confort économique.
En octobre, le président démissionnaire du Barça, Josep Maria Bartomeu, avait d'ailleurs annoncé que le club catalan avait accepté de participer à un tel projet. Et en décembre, Florentino Perez s'est lui livré à un plaidoyer pour faire avancer les choses. "L'impact du Covid-19 exige de nouveaux changements", a lancé le président du Real Madrid lors de l'assemblée générale des "socios" du club. "Tout le monde plaide pour une réforme du panorama actuel des compétitions. La réforme du football ne peut pas attendre". Les instances ont vu la menace monter. Et ne pouvaient pas rester sans rien faire.

Pourquoi ce communiqué est surtout une victoire de l'UEFA ?

La puissante UEFA peut se frotter les mains. Elle a réussi un tour de force en coulisses avec ce communiqué commun. Pourquoi ? Tout simplement car depuis des années, de nombreuses rumeurs laissaient penser que la FIFA manœuvrait dans l'ombre pour ce projet de Super Ligue européenne. Fin novembre, Sky Sport le confirmait d'ailleurs encore une fois dans sa longue enquête sur ce dossier. Pour comprendre les raisons de cette implication supposée, il faut se pencher sur la lutte de pouvoir entre la FIFA et l'UEFA.
Si elle chapote le football mondial, l'instance international a vu l'UEFA s'émanciper, grâce aux revenus colossaux de ses compétitions, comme la Ligue des champions. La FIFA est elle encore en quête de "sources de revenus additionnelles" comme l'analysait en novembre dernier Kieran Maguire, économiste du football à l'Université de Liverpool. L'élargissement de la Coupe du monde des clubs avec au moins huit formations européennes conviées avait déjà illustré cette tendance. Et avec la Super Ligue, la FIFA aurait pu concurrencer directement la Ligue des champions, cette poule aux œufs d'or de l'UEFA.
La puissante instance européenne a donc obtenu de la FIFA une mise au point claire. Histoire de tuer le moindre désir de sa maison mère de venir jouer sur son terrain de chasse en s'immisçant une nouvelle fois dans les compétitions de club. Un tel tournoi "ne serait reconnu ni par la FIFA, ni par les confédérations concernées", précise bien le texte avant de poursuivre : "A cet égard, les confédérations reconnaissent la Coupe du monde des clubs de la FIFA comme l'unique compétition de clubs mondiale, tandis que la FIFA reconnaît les compétitions de club organisées par les confédérations comme les uniques tournois de clubs continentaux". L'UEFA, qui a tout à craindre de cette Super Ligue européenne, est bien la grande gagnante de cette histoire. Reste à savoir si cela va apaiser les relations entre les deux grandes instances.
picture

Des drapeaux de l'UEFA au siège de l'instance européenne, à Nyon (Suisse)

Crédit: AFP

Alors, est-ce vraiment fini pour la Super Ligue européenne ?

Pas forcément. Loin de là même. Les grands clubs avaient forcément imaginé un tel scénario. Une révolution ne se fait pas sans casser des vieux pots. Ils le savent. Mais sont-ils vraiment prêts à renverser l'ordre établi à l'heure actuelle ? Toute la question réside bien là. "Une période de crise favorise souvent la mise à plat du système ou un certain nombre de révolutions", nous avait prévenu en fin d'année Loïc Ravenel, chercheur à l'observatoire du football CIES, à Genève. Comme souvent, tout sera en fait une question d'argent.
Même si ce projet privé n'est pas désiré par tous les cadors du football européen, les grands clubs sont légion à vouloir récupérer une part encore plus grosse du gâteau des droits TV. Un tel championnat fermé entre les grosses cylindrées du Vieux Continent, vieille rengaine depuis la fin des années 1990, permettrait d'assouvir leurs désirs (Sky Sports annonçait "des centaines de millions de livres sterling" pour chaque participant). De quoi accepter certains sacrifices tant pour les clubs que les joueurs ? C'est possible même si on part de loin.
Dans le monde du basket où s'opposent d'ailleurs en Europe l'Euroligue et la Ligue des champions en clubs, la puissance de la NBA par rapport à la FIBA illustre que des ligues privées peuvent s'imposer sur le long terme au détriment d'une fédération mondiale. Cela semble certes beaucoup plus compliqué sur la planète football où les sélections ont encore un pouvoir certain et passionnent. Mais il ne faut jamais dire jamais. Surtout quand c'est une question d'argent. "Dans tous les sports à l'échelle mondiale, cela arrive régulièrement que des Ligues concurrentes se créent. Et aboutissent à la victoire de l'une sur l'autre. Ou elles peuvent aussi fusionner. C'est assez classique", nous avait d'ailleurs glissé Loïc Ravenel en novembre. Affaire à suivre donc.
Rejoignez Plus de 3M d'utilisateurs sur l'app
Restez connecté aux dernières infos, résultats et suivez le sport en direct
Télécharger
Sur le même sujet
Partager cet article
Publicité
Publicité