Bleus : En Europe, Valbuena n’est pas un cas isolé

"Les joueurs anglais sont généralement pris pour cible à cause de leurs personnalités, plutôt qu’en raison de leur club d’appartenance. La plupart des matches étant joués à Wembley et les fans voyageant à travers tout le pays, il serait difficile de trouver assez de supporters d’un même club pour cibler un joueur d’une équipe rivale.

Ashley Cole (parce qu’il a trompé sa femme), John Terry (parce qu’il a couché avec l’ex-petite amie d’un coéquipier), Rio Ferdinand (parce que son frère a été victime d’insultes racistes de Terry) ou Frank Lampard (parce qu’il vient d’une famille plus bourgeoise que la plupart des fans et certains pensent qu’il n’est pas assez bon pour la sélection) ont été hués. David Beckham l’a aussi été durant un moment parce qu’il est plus sexy que tout le monde.

Vous pouvez voir que les fans anglais sont jaloux et lisent les tabloïds. J’imagine que si des matches étaient joués à Liverpool ou à Leeds, les joueurs de Manchester United seraient sifflés. Mais ça ne marche pas vraiment comme ça ici."

"Nous avons une victime favorite en Allemagne, qui est sifflée très régulièrement : il s’agit de Mario Gomez. C’est dur de trouver un argument qui le justifie, mais il semble simplement qu’il y a beaucoup d’idiots dans les tribunes quand l’équipe nationale joue. La structure des supporters et leur organisation sont complètement différentes de celles des clubs. Les gens huent Gomez à cause de sa réputation de "Chancentod", de joueur qui vendange beaucoup d’occasions de marquer. C’est une opinion très étrange, sachant que Gomez fait tout pour obtenir ces situations. Et il est surtout un buteur très régulier !

Un autre incident resté célèbre s’est passé juste avant le Mondial 2006, lorsque Jürgen Klinsmann a remplacé Oliver Kahn par Jens Lehmann. Le Bayern Munich, les dirigeants et les fans sont devenus fous ! Peu après, en 2005, il y a eu un match amical entre le Bayern et la sélection allemande pour l’inauguration de l’Allianz-Arena. Tout le stade a hué et sifflé Lehmann, en l’insultant copieusement. Cela faisait un bruit terrible et Lehmann a vraiment été déstabilisé sur le terrain, apparaissant très nerveux."

"L’Italie est un pays étrange. Nous avons tant de rivalités internes. Par exemple, la Toscane est la reine de la haine entre villes, avec Florence au-dessus de toutes. Mais quand l’équipe nationale joue, 60 millions de personnes deviennent simplement italiens et supportent les Azzurri, sans se soucier du club où jouent Pirlo ou Balotelli. Notre hymne national est un vrai rite : les Italiens chantent au stade mais aussi devant leur télévision avant le match. Donc les sifflets pour les joueurs italiens peuvent seulement se produire pendant le match et seulement si le joueur en question joue vraiment mal… Mais c’est très rare

Toutefois, nous pouvons nous rappeler un cas très célèbre : la Coupe du monde 90 en Italie. Nous étions le pays hôte et c’était un énorme événement pour nous. En demi-finale, l’Italie jouait contre l’Argentine. Mais le match se disputait à San Paolo, le stade de Naples. La ville adoptive de Diego Maradona. Les supporters napolitains étaient divisés en deux camps : la majeure partie encourageait l’Italie, comme d’habitude. Mais un petit groupe soutenait l’Argentine et Maradona, le seul dieu pour la ville encore aujourd’hui, vingt ans après. Il y est presque plus important que Saint Jean et la pizza !"

"Nous ne nous souvenons pas de joueur de l’équipe nationale ayant été sifflé. L’équipe nationale espagnole joue habituellement dans différentes villes, où il n’y a pas de football d’élite. Le public peut apprécier les joueurs qu’il admire.

Bien sûr, les matches importants se disputent dans des grands stades, comme Santiago-Bernabeu ou Mestalla. Mais les supporters sont très sympas avec les joueurs, peu importe où ils jouent. Iniesta ou Xavi sont très appréciés par Bernabeu, par exemple.

Cela peut s’expliquer par le profil très différent des supporters de la sélection nationale. Ces matches attirent beaucoup de familles, il y a beaucoup d’enfants dans les tribunes. Quand les clubs jouent, vous pouvez voir fréquemment comment les fans sifflent leurs propres joueurs. Deux exemples récents parmi d’autres : Karim Benzema (Real Madrid) ou Sofiane Feghouli (Valence)."

"En Suède, la plupart des joueurs de l’équipe nationale jouent à l’étranger en raison du faible niveau de notre championnat. Les fans voient rarement des joueurs venant de clubs rivaux lorsque la sélection joue. Parmi les convoqués pour les deux rencontres d’octobre, seuls Anders Svensson, Tobias Hysén et Adam Johansson jouent en Allsvenskan. Le premier est le seul à être régulièrement aligné dans le onze de départ.

Joueur suédois le plus capé, Svensson s’est trouvé pendant de nombreuses années au centre d’un débat qui l’opposait à Kim Källström. L’opinion se demandait qui devait jouer en numéro 10. Pendant le Mondial 2006, le débat a pris une autre dimension. Le plus grand journal suédois, Aftonbladet, a débuté une campagne en faveur de Källström et a fait des pins qui disait ‘’tous pour Kim’’. Certains supporters suédois ont hué Svensson durant un entraînement en Allemagne et ont barré son nom de leurs maillots pour le remplacer par celui de Källström. Peu de gens remettent en question Svensson aujourd’hui et il est considéré comme l’un des meilleurs joueurs suédois de tous les temps."

"Le dernier match où des joueurs russes ont été sifflés date d’août 2012. C’était le premier après un Euro 2012 catastrophique. Il est facile de comprendre pourquoi la sélection nationale n’était pas l’équipe la plus populaire de la planète.

Andrey Arshavin et Yury Zhirkov ont été particulièrement pris pour cible lors de cette rencontre face à la Côte d’Ivoire. Arshavin avait dit après l’Euro, en s’adressant à un supporter, que ses attentes démesurées étaient son problème. Il n’avait pas totalement tort mais comme tous les Russes étaient énervés par les mauvais matches contre la Pologne et la Grèce à l’Euro, Arshavin est devenu le joueur le plus impopulaire de Russie.

Zhirkov avait lui quitté Chelsea pour l’Anzhi quelques jours avant ce match. Tout le monde a compris que ce transfert était une question d’argent et comme l’Anzhi, pour les Moscovites, est l’équivalent de l’OM pour les Parisiens, Zhirkov a beaucoup pris."