L'Italie a de la réserve

L'homme qui tombe à pic. Au lendemain du triste parcours de l'Italie à la Coupe du monde 2010, la fédération a nommé le sélectionneur parfait pour effectuer un virage à 180 degrés : Cesare Prandelli. Depuis bientôt trois ans, Prandelli a renouvelé une partie de l'effectif et a fait confiance à de nombreux jeunes, de manière certes sporadique, car le onze titulaire est dur à bouger. Contre le Brésil, le dernier arrivé, Mattia De Sciglio, a fait un match correct, peu aidé par un milieu de terrain positionné trop haut et une charnière centrale peu concentrée. L'arrière milanais n'est certainement pas le dernier joueur qui aura sa chance avec Prandelli car, qu'on se le dise, le réservoir italien est intarissable et le sélectionneur peut faire trois équipes compétitives.

4-3-3, 4-4-2, 3-5-2, 4-3-1-2, Cesare Prandelli n'est pas de ceux qui ne jurent que par un système de jeu et le montre depuis qu'il est à la tête de la Nazionale. Le sélectionneur a utilisé tous ces schémas en moins d'un an, à la recherche du dispositif parfait en vue de la Coupe du monde 2014. S'il a avoué récemment que l'idée du 4-3-3 est séduisante, le manque d'ailiers italiens pourrait lui jouer des tours. D'où cette idée de pouvoir changer de système en plein match, comme il l'a fait contre le Brésil où, après les entrées d'El Shaarawy et Cerci, l'équipe est passée d'un 4-3-1-2 (que j'ai trouvé peu séduisant, la faute au positionnement de Montolivo, sur le côté gauche, qui a laissé des boulevards aux Brésiliens) à un 4-3-3 qui germe au fur et à mesure des semaines dans l'esprit de Prandelli.

L'équipe de titulaires à la Coupe du monde 2014, si qualification il y a, est connue à 90%. Dans les buts, l'indéboulonnable Buffon. Derrière, si c'est une ligne de quatre, elle devrait être constituée d'une charnière Barzagli-Bonucci, avec Chiellini à gauche et Maggio, ou Abate, ou De Sciglio à droite. Prandelli a également la possibilité de faire glisser Chiellini dans l'axe, écartant Bonucci et faisant rentrer Criscito (s'il se remet de sa grave blessure) ou De Sciglio à gauche. Au milieu de terrain, Marchisio, Pirlo et De Rossi sont intouchables. Si Prandelli évolue avec un autre milieu derrière les attaquants, le poste semble promis à Montolivo, comme lors de l'Euro. Si le sélectionneur italien choisi une ligne de trois devant, le milieu milanais sera "sacrifié" et l'attaque sera alors composée d'El Shaarawy, Balotelli et un ailier à droite. C'est l'inconnue majeure. Alessio Cerci est revenu dans les petits papiers de Prandelli mais l'actuel joueur du Toro manque de régularité. Lorenzo Insigne pourrait dépanner mais il préfère le côté gauche où il joue en club. Quant à Candreva (Lazio), il est bien moins décisif depuis quelques semaines, au point de se demander s'il n'était pas en sur régime en début de saison.

Si Prandelli maintient son idée de 4-3-3, à l'heure actuelle, le choix peut se résumer à "ou Cerci ou un bricolage". Pas vraiment le meilleur choix selon moi. Je préfère nettement le 4-3-1-2 qui a fait ses preuves à l'Euro avec un milieu hyper technique et mobile, ou De Rossi et Marchisio se projettent vers l'avant, Montolivo pouvant décrocher pour les couvrir, et inversement.

Le virage pris par Cesare Prandelli a été grandement facilité par la volonté de nombreux clubs italiens de miser à nouveau sur leurs jeunes talents. Même si certains dirigeants essayent de présenter la chose différemment, il s'agit plus d'un virage forcé par la crise économique que par une volonté intellectuelle et stratégique. Mais, c'est appréciable et c'est certainement la seule bonne conséquence de la crise sur le football italien.

Plusieurs joueurs ont ainsi pris une nouvelle dimension cette année. Parmi les cas les plus intéressants, le jeune latéral Mattia De Sciglio à Milan qui étonne par ses excellentes performances, principalement au poste de latéral droit, mais aussi à gauche quand il dépanne. Alessandro Florenzi a lui aussi fait son trou à la Roma et est un infatigable milieu de terrain, bon avec le ballon dans les pieds, mais encore meilleur dans ses déplacements et mouvements sans ballon. C'est un milieu idéal pour le jeu de Prandelli. Le cas de Lorenzo Insigne mérite également d'être souligné. Il n'est pas un titulaire indiscutable à Naples – ce qui agace d'ailleurs de nombreux tifosi – mais lorsqu'il joue, il fait toujours la différence. Vif, doué techniquement, il sait désorganiser une défense bien regroupée.

À Gênes, Andrea Poli est en train de retrouver son niveau après quelques mois laborieux avec l'Inter. Milieu de terrain créatif, sûr techniquement et bon dans la construction, le joueur de la Sampdoria réalise une excellente saison et a été appelé par Prandelli face au Brésil. D'autres joueurs pleins d'avenir existent en Italie (Destro, Marrone, Caldirola, Donati, Saponara, …) mais aussi en Angleterre ou Davide Santon est très performant avec Newcastle, alors que Borini vit une première saison très compliquée à Liverpool avec deux grosses blessures.

Il y a les trentenaires confirmés qui ont encore leur mot à dire, mais également des joueurs entre 25 et 30 ans qui ont encore un espoir de faire partie de la liste des 23 sélectionnés pour le Brésil, car récemment appelés ou cités en conférence de presse par Cesare Prandelli.

En procédant ligne par ligne, malgré d'excellentes performances avec l'Atalanta, Andrea Consigli ne se fait plus trop d'illusions car il a devant lui Buffon, De Sanctis, Marchetti, Sirigu et même Viviano. Même chose pour Sorrentino (Palerme), certainement dans le top 3 des gardiens de Serie A cette saison. Sacrée génération. En défense, là où les places peuvent encore basculer (pour être remplaçant), des joueurs comme Peluso, Gastaldello, Bocchetti et Astori jouent des coudes. Au milieu de terrain, le choix est très vaste, des "bons équipiers" Giaccherini et Nocerino au revenant Alberto Aquilani, il y a au moins une ou deux places à s'attribuer. Enfin, devant, Pazzini, Gilardino (revenu en forme), Giovinco, Matri, Quagliarella et Osvaldo sont en concurrence. Sans oublier une surprise du chef tout à fait possible, entre Totti, Cassano et Di Natale, s'ils continuent à être aussi performants. Toute la semaine, Buffon, Pirlo et consorts se sont relayés pour dire tout le bien qu'ils pensent de Francesco Totti, qui survole encore les débats en Série A. Prandelli a ouvert la porte, la presse sportive pousse, lui met le frein mais rêve en secret.

Enfin, la rubrique "ils n'ont à priori aucune chance mais ne les oublions pas" : Andrea Coda, Paolo Cannavaro, Cristian Ledesma, Luca Cigarini, Francesco Lodi, Giovanni Pasquale, Manuel Pasqual, Marco Parolo et Stefano Mauri.

Et si vous deviez faire votre liste de 23 aujourd'hui, qui prendriez-vous ?

Johann CROCHET : Créateur de footballtagcloud.com, pigiste, Johann Crochet a l'habitude de dire qu'une bonne journée commence par une revue de presse italienne et qu'une bonne année se mesure au nombre de matches de Serie A vus dans les stades. Par goût, il suit aussi le foot néerlandais et les championnats scandinaves.