Grosjean, retour en grâce

"C'est un rêve qui devient ou qui redevient réalité." Les premiers mots de Romain Grosjean, titularisé au sein de l'équipe Lotus (ex-Renault), vendredi, ont leur importance. Par deux fois, le pilote français emploie le verbe redevenir. Deux ans après avoir quitté Enstone, il a bien conscience qu'on lui accorde une deuxième chance.

Il faut dire que lors de son premier passage en Formule 1, en 2009 au sein de l'écurie Renault, Grosjean n'avait pas bénéficié des meilleures conditions possibles. Le contexte ne l'avait pas aidé non plus. Alors qu'il était en tête du championnat GP2 Series, l'écurie française l'appelle en cours de saison pour remplacer Nelson Piquet Jr. Un cadeau empoisonné. Après une première course honorable à Valence (15e), il doit rapidement composer avec une équipe en déliquescence : affaire du crashgate, monoplace difficile à piloter, Grosjean termine la saison sans le moindre point. Et son image s'est détériorée. On lui reproche notamment son arrogance et ses relations avec Flavio Briatore, le controversé directeur de Renault, qui est aussi son manager. A la fin de la saison, il est remercié et on le croit fini pour la Formule 1.

Mais un homme va tout faire pour le remettre en selle : Eric Boullier. Fraichement nommé à la tête de l'équipe Renault, l'ancien patron de DAMS va conseiller Grosjean, jouer parfois les intermédiaires pour l'aider à restaurer son image. En 2010, le Français dispute ainsi quelques manches du championnat du monde FIA GT, s'impose à deux reprises, avant de s'engager en Auto GP. Dans ce modeste championnat de monoplace, il montre qu'il n'a rien perdu de son coup de volant en décrochant le titre en fin de saison. Parallèlement, il effectue des piges en GP2 Series et devient testeur pour les pneus Pirelli.

L'année suivante, il poursuit sa reconstruction en revenant à ses premières amours : le GP2 Series. Avec DAMS, il ne laisse cette fois-ci pas passer sa chance et remporte le titre une manche avant la fin de la saison. "Ça a été clairement une aide pour obtenir le siège de pilote titulaire pour 2012, reconnaît-il. On attendait de moi que je montre que j'avais grandi, que j'étais plus mature, que j'étais capable d'être un leader d'équipe."

Le contrat étant rempli, Lotus Renault dont il est 3e pilote, lui offre la possibilité de rouler lors des essais libres 1 des Grands Prix d'Abou Dabi et du Brésil. Là aussi, Grosjean ne déçoit pas en devançant à chaque fois son équipier, Vitaly Petrov à Abou Dhabi, Bruno Senna au Brésil. "Ça a aussi été une évaluation grandeur nature pour voir si je m'étais amélioré, si je résistais mieux à la pression, si j'étais toujours aussi rapide", explique-t-il.

Les tests passés avec brio, Grosjean attend alors patiemment son heure. La signature de Kimi Räikkönen fin novembre, brouille quelque peu les cartes. Mais l'attente est de courte durée. Une semaine et demie plus tard, le Français se voit offrir un poste de titulaire. Après avoir connu un chemin mouvementé, il ne peut que savourer ce retour au premier plan. "Revenir à Enstone dans la peau d'un pilote titulaire me donne le sentiment de rentrer à la maison." Une maison qu'il espère à présent combler. "On veut aller chercher des résultats, on ne va pas se mentir, conclut-il. Je ne décevrai pas."