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Le Brexit, c'est aussi vrai en Formule 1

Stéphane Vrignaud

Mis à jour 22/03/2017 à 22:24 GMT+1

FORMULE 1 - Bernie Ecclestone mis sur la touche, Williams et McLaren débordées par Mercedes, Red Bull, Ferrari et Force India... La Grande-Bretagne n'est plus ce qu'elle était en Formule 1.

Bernie Ecclestone à Kitzbühel le 21 janvier 2017

Crédit: AFP

La Formule 1 vit cette saison une mutation pas seulement incarnée . Elle vit une révolution à travers la perte d'influence sans précédent de son porte-drapeau britannique, le premier ayant flotté sur le championnat du monde, le 13 mai en 1950 à Silverstone.
Cet hiver, l'omnipotent Bernie Ecclestone s'est fait proprement déposer par les Américains de Liberty Media, qui ont quand même sagement confié la gestion de la branche sportive à Ross Brawn. Une page s'est tournée car l'octogénaire gérait les affaires commerciales de la F1 depuis 1978. Le voilà "président honorifique" plutôt acariâtre dans un vague rôle de conseiller qu'il ne "comprend pas". A l'entendre, le staff de Liberty Media aurait passé l'ordre de ne plus lui adresser la parole. Et puisque rien ne sera plus jamais comme avant, Chase Carey a fait déménager ses bureaux londoniens du 6 Princes Gate.
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Bernie Ecclestone lors du Grand Prix du Mexique 2016

Crédit: AFP

Les Britanniques ont presque toujours eu la main sur un sport jaloux de son pouvoir financier, de ses intrigues politiques. En piste, ils ont juste mis du temps à investir une discipline où les Italiens d'Alfa Romeo et de Ferrari avaient leurs habitudes. Ils ont réalisé une première percée en 1958 avec la première victoire d'une écurie royale, Vanwall, consacrée dans le nouveau championnat du monde des constructeurs. L'année suivante, Cooper a fini d'installer l'Union Jack en imposant la première voiture à moteur arrière.

L'Angleterre ne fait plus gagner ses équipes

Les marques anglaises ont dès lors presque toujours ferraillé avec Ferrari, ultime tenant de la passion transalpine. Elles ont occupé l'une des trois places du Mondial des marques avec une régularité que l'on croyait immuable. Jusqu'à monopoliser le Top 3 du championnat à dix reprises (1962, 1963, 1965, 1967, 1972, 1973, 1986, 1987, 1992, 1993).
Mais voilà, 2016 a marqué une rupture brutale, profonde, peut-être durable car on n'aurait jamais imaginé la "Perfide Albion" un jour absente du top 4 d'un Mondial constructeurs. Pourtant, l'Allemande Mercedes, l'Autrichienne Red Bull, l'Italienne Ferrari et l'Indienne Force India ont en toute logique repoussé Williams au 5e rang du bilan. Mercedes est un géant prospère de l'industrie mondiale difficile à challenger sur le plan de la puissance technologique et financière, et le Royaume-Uni souffre certainement de l'absence de grand constructeur capable d'armer une écurie, mais cela n'explique pas tout. Il suffit de se pencher sur la raison d'être de Red Bull et le système D à travers lequel fonctionne Force India pour s'en convaincre.
Felipe Massa (Williams) - Tests Montmelo 2 2017
On pourrait relativiser le constat en remarquant que Mercedes, Red Bull et Force India ont des adresses anglaises. Mais si elles en sont là, c'est qu'elles sont les émanations de Brawn, Jaguar et Jordan, qui n'avaient plus les moyens de suivre le mouvement. Econduits comme de vulgaires "garagistes", aurait pu dire Enzo Ferrari.
La Grande-Bretagne doit-elle revoir son modèle ? Urgemment. Frank Williams est encore plus jaloux de son indépendance depuis l'expérience BMW mais sa condition d'indépendant l'enferme dans un second rôle et un palmarès à une victoire en 12 saisons. En 2006, l'idée était belle. Croire comme Patrick Head que Nico Rosberg serait le prochain champion du monde "maison" avait de l'allure. L'Allemand a dû migrer chez Mercedes pour accomplir son destin. Le rêve ne semble plus possible et c'est assez déprimant quand on pense à l'esprit "pure racing" magnifié par ce seigneur qu'est Frank Williams.

Brawn et Lotus, dernières références...

Quant à l'équipe McLaren, elle s'est perdue dans un passé nostalgique qu'elle n'assume plus. Ron Dennis voulait réécrire l'histoire avec Honda, Eric Boullier vient de situer le retard du motoriste japonais à trois ans sur Mercedes, Ferrari et Renault. Un constat déjà dressé il y a un an, ce qui n'augure rien de bon pour le partenariat soumis à une "tension maximale".
Comble pour Ron Dennis, historique dirigeant débarqué sans égard : Woking a entrepris d'effacer consciencieusement son héritage en débaptisant sa monoplace et en lui donnant une livrée orange digne des années 70 ou 80. Depuis 2012, l'écurie a perdu son sponsor titre, Lewis Hamilton et un bon moteur. Ça fait beaucoup et c'est la définition parfaite de la descente aux enfers. Elle veut se débarrasser du V6 nippon mais évidemment qu'elle n'en a pas les moyens, ni le droit de critique vu les yens qui alimentent la trésorie de Woking.
Et si elle voulait se montrer aussi puissante que Mercedes, Ferrari ou même Renault, elle fabriquerait son propre moteur. Dans cet abime d'incertitudes, on saisit l'ampleur du drame qui se prépare quand on entend Fernando Alonso clamer qu'il veut gagner avant de lâcher la F1. En 2018 chez McLaren ? Ce serait un miracle et Carlos Ghosn, qui rêve d'un énième retour, peut se prendre à rêver...
Dans tout ça, c'est quand même fou de réaliser que la Grande-Bretagne n'a plus gagné de titre constructeurs depuis l'opération commando Brawn en 2009, et que la défunte Lotus est la dernière victorieuse en Grand Prix, en 2013. Le genre de pan d'histoire que Liberty Media ne veut précisément plus voir tomber.
Fernando Alonso (McLaren) - Tests Montmelo 2 2017
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