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Handball, Euro 2022 - Avant France-Suède : Dika Mem, l’artilleur qui veut emmener la France sur le toit de l’Europe

Vincent Roussel

Mis à jour 28/01/2022 à 18:31 GMT+1

EURO 2022 – Héros du match face au Danemark, qui a permis aux Bleus de se qualifier en demi-finale, Dika Mem ne cesse de prendre de l’ampleur en équipe de France, avec, à l’horizon, les Jeux de Paris 2024. Celui que certains désignent de meilleur joueur du monde compte bien s’appuyer sur sa force de frappe pour faire à nouveau la différence face à la Suède, ce vendredi (20h30).

Dika Mem

Crédit: Getty Images

Il profite d’un relais de Melvyn Richardson pour s’élever plein axe à neuf mètres, trompe d’un tir surpuissant le gardien danois Niklas Landin, à terre comme le reste de son équipe. Alors qu’il ne reste que quelques secondes au chronomètre, Dika Mem, lui, se replie rapidement dans son camp, se frappant le torse en lâchant un cri de rage, et de soulagement : après avoir, pendant plus 45 minutes, vu les portes des demi-finales se refermer, l’arrière droit de 24 ans a permis, mercredi, à la France d’atteindre, pour la troisième fois en un an, le dernier carré d’une grande compétition internationale, au terme d’un match dingue.
"Je suis K.O., a dit après-coup celui qui, d’un pauvre 1/6 au tir en première période, a fini sur un triomphant 7/8 en seconde période. On s'est battus jusqu'au bout. Le message, c'était de ne rien regretter, peu importe ce qui se passait. Toute l'équipe s'est vidée". Et lui qui, malgré son âge, fait figure de leader du groupe, le premier. Sans surprise, le lendemain, en visioconférence de presse, il a reçu les louanges de son sélectionneur Guillaume Gille : "Il a beaucoup contribué à nos résultats, donc on est ravi de le voir continuer à prendre plus d’épaisseurs et de responsabilités au sein de cette équipe. On a besoin de tauliers, de joueurs qui, par leur attitude et leur engagement, montrent la voie aux plus jeunes. C’est un jeune joueur, mais du fait de son expérience récente en équipe de France, il a franchi beaucoup de paliers pour devenir un joueur très important", a-t-il raconté.
Au fur et à mesure des saisons, il montre plus de régularité, plus de maturité, c’est essentiel d’avoir un joueur comme lui dans l’équipe, il peut faire la différence à tout moment
D’aucuns, d’ailleurs, n’hésitent pas à parler de l’arrière droit comme du meilleur joueur du monde, du fait de ses performances en équipe nationale mais aussi au FC Barcelone, où il est arrivé en 2016 et avec qui il a remporté, la saison passée, sa première Ligue des champions. "Je le connais très bien, on a fait pas mal de chemin ensemble et je trouve qu’il a énormément grandi sur cette dernière année et demie", lance le pivot Ludovic Fabregas, lui aussi de cette génération 96/97 avec laquelle les équipes de jeunes ont raflé, notamment, les titres de champions d’Europe U18 et de champions du monde U19, en 2014 et 2015, et qui vit en club à ses côtés depuis 2018.

Il a découvert le handball sur le tard

"C’est certainement notre atout numéro un sur la phase offensive lorsqu’on est en club, tout en ayant une importance capitale sur le secteur défensif. Je pense qu’au fur et à mesure des saisons, il montre plus de régularité, plus de maturité, c’est essentiel d’avoir un joueur comme lui dans l’équipe, il peut faire la différence à tout moment", raconte celui qu’on surnomme "Wolverine", à propos de "Dikson", qui a débuté sa carrière professionnelle à Tremblay-en-France. "Physiquement, il est doté d’une génétique hors-norme", observe Jérôme Fernandez, en référence notamment à la vélocité, l'explosivité et la détente spectaculaire du joueur d'1,94m (pour 90 kilos). "C’est quelqu’un qui, depuis plusieurs compétitions, est un de nos fers de lance en attaque. C’est un joueur complet qui défend, qui court, qui est précieux sur grand espace, avec une qualité de tir à neuf mètres qui est rare", l’encense aussi Guillaume Gille. Et qui est arrivé un peu par hasard dans le monde du handball.
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Vincent Gérard, ici en plein "High Five" avec Dika Mem, symbolise la solidité tricolore depuis le début de l'Euro 2022

Crédit: Getty Images

"C’est un sport que je ne connaissais pas de base, disait-il récemment à beIN Sports. Mon père et ma mère n’ont pas joué au handball", à la différence de beaucoup de ses partenaires, parmi lesquels Kentin Mahé ou Nedim Remili (absent de l’Euro car blessé). La rencontre s’est faite sur une curiosité enfantine. A 13 ans, alors qu’il accompagne un de ses amis aux détections départementales dans le Val-d'Oise, il décide de s’essayer à ce sport, et convainc, d’emblée, les observateurs sur le bord du terrain : "Le cas de Dika, c'est un peu la ruée vers l'or dans le grand ouest américain. On a trouvé une pépite, comme ça, par hasard. Ça n'arrive qu'une fois tous les 20 ans un truc pareil !", se souvenait en 2017, pour Vice, Fabrice Le Roy, ancien coach de Sannois-Saint-Gratien, où Mem a commencé à martyriser les gardiens adverses.
Il a montré qu’il pouvait rebondir dans le même match alors même qu’il n’était pas en réussite, c’est la marque des très grands
Cette année-là, le jeune prodige tricolore a remporté son premier trophée majeur en équipe de France, grâce à un coup de pouce du destin. Non retenu par Didier Dinart dans le groupe pour disputer la coupe du monde organisée en France, il est finalement appelé en cours de compétition pour pallier l’absence de Luka Karabatic. Son histoire avec les Bleus, commencée en fanfare, s’est donc depuis considérablement renforcée, malgré quelques trous d’air comme l’élimination dès le tour préliminaire lors du dernier Euro. Le titre olympique glané l’été dernier à Tokyo a été une sorte de consécration, où il a porté les Tricolores jusqu’à la médaille avec cette fois un rôle de taulier.
S’il joue à l’opposée de Nikola Karabatic, la tentation est grande de faire du Parisien de naissance le successeur, dans l’importance qu’il peut avoir sur les matches de l’équipe de France, de la légende du handball, avec lequel il cohabite depuis plusieurs années sur la base arrière. Questionné à propos de Mem, jeudi, le triple meilleur joueur du monde, à la poursuite d’un quatrième titre à l’Euro, n’a pas manqué de le complimenter : "Je sais de quoi il est capable. Hier (mercredi), ce que je lui ai dit, c’est que ce qui a été fort, c’était de réussir à revenir dans le match et faire une seconde période incroyable alors qu’il était dans le dur au début. Il a montré qu’il pouvait rebondir dans le même match alors même qu’il n’était pas en réussite, c’est la marque des très grands", a lâché le joueur du PSG. Un terme pas anodin dans la bouche de celui que Vincent Gérard, le gardien français, considère comme le GOAT.
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Dika Mem face aux Pays-Bas lors de l'Euro 2022

Crédit: Getty Images

Régulièrement, lors des matches de l’équipe de France, c’est Mem qui s’élève le premier pour tenter de marquer : "On n’en parle pas forcément avant le match, c'est juste que j'ai toujours été motivé en équipe de France. Plus les années passent, plus j'ai envie de m'imposer. Mes partenaires ont confiance en moi, donc je prends le tir et c'est cool", racontait-il, toujours à beIN Sports, à propos de cette première mèche qu’il allume souvent. Ce côté "Jean sans peur" peut parfois lui jouer des tours, comme lors du dernier match face au Danemark où, par deux fois en début de match, il a vu la défense adverse repousser sa tentative. Annonçant la première période à l’envers des siens.
Il a besoin d’étoffer son jeu avant de pouvoir prétendre être le meilleur joueur de la planète
Ce qui fait dire à Jérôme Fernandez, meilleur buteur de l’histoire de l’équipe de France, qu'"il est beaucoup moins collectif que d’autres. C’est des buts sur montées de balles ou des tirs de loin dans le jeu placé, son jeu tourne essentiellement autour de ça", regrette l’ancien entraîneur d’Aix, qui en attend plus du Barcelonais : "C’est un super buteur, un joueur qui peut être déterminant parce qu’il met beaucoup d’impact dans tout ce qu’il fait. Mais il y a beaucoup de fois où il shoote, alors qu’il y a deux mecs au contre et qu’il a un coéquipier qui est tout seul. Il a besoin d’étoffer son jeu avant de pouvoir prétendre être le meilleur joueur de la planète".
Et l’ancien arrière gauche de prendre un des absents de cet Euro comme exemple : "Nedim Remili, il ne pourra jamais faire ce que fait Dika, dans la dimension athlétique du jeu. Par contre, je pense que Dika Mem, dans l’organisation du jeu, dans le fait d’être un joueur complet comme Nedim Remili, il peut aspirer à ça. Aujourd’hui, on a un Nedim Remili très collectif, capable de marquer des buts, qui lit très bien le jeu. Dika est très bon en défense, très bon dans son rôle de buteur, mais il n’est pas complet comme Nedim". Interrogé à propos de son coéquipier sur son statut, Ludovic Fabregas, lui, est resté mesuré : "Je pense qu’il peut encore progresser, comme nous tous. Est-ce qu’aujourd’hui il fait partie des meilleurs joueurs du monde ? Certainement. Est-ce qu’il est le meilleur ? Je ne sais pas. En tout cas c’est un joueur important pour l’équipe de France".
Le principal intéressé, lui, garde les pieds sur terre : "J’ai envie d’être le meilleur, je bosse à fond, je suis à l’écoute. Je suis content de ce que je fais aujourd’hui mais je sais aussi que je peux faire beaucoup plus". Face à la Suède, que la France retrouve un an après la demi-finale perdue au Mondial en Egypte (26-32), elle aussi miraculée après une victoire glanée dans les dernières secondes face à la Norvège, Dika Mem sera très attendu.

Johannesson/Mem, duel attendu

"La Suède de ce tournoi n’est pas aussi forte qu’on l’espérait. Des joueurs comme (Jonathan) Carlsbogard sont un peu en-dedans. Ce n’est pas aussi performant qu’il y a un an", estime Fernandez. Face aux recordmans de titres à l’Euro (4) - tous glanés lors des années 90-2000, période faste de la sélection suédoise - qui, selon Guillaume Gille, "s’est replacée ces dernières années dans le gotha des nations qui comptent au niveau international", la prudence reste de mise.
L’ailier Hampus Wanne aux 41 buts dans cet Euro (82% de réussite au tir) ou le maître à jouer Jim Gottfridsson seront les principales menaces, même si, pour Fernandez, "ça va se jouer sur la prestation des gardiens de buts". Il pense notamment à la performance stratosphérique de Peter Johannesson en seconde période face aux Norvégiens, tandis que l’habituel titulaire, Andreas Palicka, manquera la rencontre, car testé positif au Covid-19 (comme Felix Claar). Celui-ci aura, face à lui, un artilleur hors pair, qui compte bien glaner le seul titre qui manque à son palmarès en équipe de France.
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