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Handball/Mondial - De retour en finale, face au Danemark, l'équipe de France prolonge son incroyable longévité

Vincent Roussel

Mis à jour 29/01/2023 à 20:03 GMT+1

CHAMPIONNAT DU MONDE – De retour en finale, six ans plus tard, l’équipe de France continue de briller par sa présence au plus haut niveau. Les champions olympiques de Tokyo, à un pas d’un septième sacre, profitent d’un vivier extraordinaire et d’une culture de l’exigence transmise d’une génération à l’autre qui font des Bleus une sélection unique en son genre.

Kentin Mahe célèbre la victoire de l'équipe de France face à la Suède en demi-finale du Mondial

Crédit: Getty Images

Un classique en cache un autre. Après la Suède, terrassée chez elle en demi-finale au terme d’une prestation grandiose, de patron même, l’équipe de France retrouve un autre adversaire qu’elle connaît par coeur ce dimanche (21h), pour aller peut-être chercher un septième titre de champion du monde : le Danemark.

7 sur 18 à avoir connu le dernier sacre en 2017

Du dernier titre qu’ils ont glané, à domicile en 2017, ils ne sont plus que 7 Français actuellement dans le groupe de 18 à avoir connu l’aventure : Nikola Karabatic, Kentin Mahé, Valentin Porte et Vincent Gérard faisaient déjà partie des meubles à l’époque, tandis que Nedim Remili, Dika Mem et Ludovic Fabregas incarnaient alors la génération montante. Depuis, les trois derniers cités sont devenus des cadres de l’équipe, influents sur les décisions de groupe, pesant sur les tactiques décidées en match et, plus important encore, sur les résultats de cette équipe de France qui continue, année après année, à voler à très haute altitude.
Une anomalie à l’échelle planétaire : que ce soit les Suédois, sur lesquels ils ont pris leur revanche vendredi, ou les Danois et les Espagnols, pour ne citer que les nations les plus récompensées ces dernières années, tous les pays qui ont fait l’Histoire du handball n’ont jamais réussi à être aussi constants que l’équipe de France, depuis la première médaille, d’argent, glanée par les "Barjots" au Mondial suédois de 1993.
C’est un vrai travail fédéral, parce qu’il y a une politique de formation qui fait qu’on a toujours des jeunes joueurs qui arrivent
Cette particularité française étonne même jusqu’aux joueurs, comme nous le confiait le roc Gérard, à la Maison du handball fin décembre : "C’est sûr que ça me surprend toujours. C’est un vrai travail fédéral, parce qu’il y a une politique de formation qui fait qu’on a toujours des jeunes joueurs qui arrivent. Quand la génération dorée des Experts est partie à la retraite, il y a eu une nouvelle génération intermédiaire avec moi, Luka (Karabatic)… Là il y a Dika (Mem), Mevlyn (Richardson), Ludo (Fabregas)… Tous ces joueurs exceptionnels", énumère le gardien de Saint-Raphaël, en référence à cette génération 1996-1997, vainqueure de l’Euro des moins de 18 ans en 2014, puis du championnat du monde jeunes l’année suivante.

Un être vous manque, et tout n'est pas dépeuplé

Comme une confirmation que les talents éclosent comme des fleurs au printemps sur le sol hexagonal, la génération 1998-1999, symbolisée en Pologne et en Suède par Elohim Prandi et Dylan Nahi, qui auraient dû être rejoints par Kyllian Villeminot sans le forfait du Montpelliérain au dernier moment, ont eux aussi réalisé le doublé Euro-Mondial chez les jeunes, en 2016-17.
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Vincent Gérard, ici en plein "High Five" avec Dika Mem lors de l'Euro 2022

Crédit: Getty Images

Et ces pépites, les clubs français les polissent en leur permettant d’évoluer au plus haut niveau, sans avoir à s’exiler. Et ce ne sont pas n'importe quels clubs, puisque même ceux du haut de tableau comme le PSG (qui a lancé Nahi ou Kounkoud par exemple), ou Montpellier, avec qui Fabregas ou Richardson ont gagné la Ligue des champions en 2018 avant d’aller à Barcelone, font souvent la part belle aux jeunes français.
Sans oublier Nantes, qui a additionné les talents précoces, parfois par contrainte, mais souvent par conviction, ces dernières saisons dans les compétitions européennes. Cela a même permis au "H" de révéler un phénomène passé, et c'est rare, au travers du système fédéral : l’arrière gauche Thibaud Briet, encore bluffant dans ce Mondial, mais qui devrait manquer la finale car blessé à un doigt de la main droite. Cette profusion de joueurs de haut niveau, au poste de pivot ou du côté des arrières gauches notamment, permet aux Bleus de surmonter, déjà, tous les pépins physiques inhérents au rythme endiablé auquel les joueurs qui mènent de front la vie en club et en sélections sont confrontés.
Le vivier est tellement important, ça en est relou, franchement, les gens n’en peuvent plus !
Ainsi, alors que les absences et les forfaits (7 avant le début de la compétition) ou les blessures de dernière minute (qui ont privé Luka Karabatic, Dika Mem, Nikola Karabatic de plusieurs matches) auraient pu faire vaciller n’importe quelle formation, celle de Guillaume Gille a tenu bon. "Le vivier est tellement important, ça en est relou, franchement, les gens n’en peuvent plus !", glisse ainsi dans un sourire Nedim Remili, lorsque le sujet est abordé.
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Nikola Karabatic lors de France - Slovénie, le 16 janvier 2023 au championnat du monde

Crédit: Getty Images

Pour le sélectionneur, son adjoint Erick Mathé et tout le staff, cela permet surtout d’opposer aux adversaires une variété de solutions et d’essorer presque tout le monde, comme par exemple l’Allemagne, longtemps devant mais finalement débordée lors du dernier quart d’heure du quart de finale. "On a beaucoup de talents à tous les postes et sur le banc de touche pour les doublures. C’est peut-être une des équipes les plus complètes qu’on ait eu dans l’histoire du handball français", s’émerveille ainsi l’ancien taulier des Bleus Jérôme Fernandez, désormais consultant pour Eurosport.
Ce qui fait la force de l’équipe de France aujourd’hui, c’est le potentiel des 16 joueurs qui sont sur la feuille de match. Aucune équipe au monde n’a cette profondeur de banc
"Ce qui fait la force de l’équipe de France aujourd’hui, ce n’est pas le talent ou le potentiel de son 7 majeur. Mais c’est le potentiel des 16 joueurs qui sont sur la feuille (de match, ndlr). Aucune équipe au monde n’a cette profondeur de banc", embraye le recordman de buts en équipe de France (1463), qui compare la réussite tricolore à celle des All Blacks, longtemps insatiables dans le monde de la balle ovale. Dans celui des cages aux poteaux (toujours) carrés, aucun pays ne parvient à transmettre cet esprit de la gagne et à intégrer les nouveaux avec autant d’aisance que l’Hexagone.

Le "patron" Karabatic, le gardien du temple Guillaume Gille

"Pendant longtemps, le sport collectif a été moribond en France. Le handball n’y est pas pour rien si aujourd’hui on parle d’un savoir-faire à la française sur les sports collectifs", raconte ainsi Guillaume Gille, arrivé en sélection comme joueur juste après le sacre mondial de 1995, et qui participe lui aussi à ce relai de flambeau toujours réussi. "Il y a une forme de culture qui s’est transformée sur le sujet. Je trouve riche et inspirant de voir les sports de salle où en extérieur vivre des aventures couronnées de succès, par de belles médailles. On était très souvent contents de participer, aujourd’hui, l’ambition des sports co français, c’est de gagner des titres".
"C’est vraiment une équipe qui a la dalle, c’est quelque chose qui ressort vraiment, appuie Remili, qui évolue à Kielce après plusieurs années au PSG, deux clubs où l'exigence du résultat est aussi prépondérante. "A chaque fois que Gino (le surnom de Gille, ndlr) parle de nous, il vous le fait ressentir, cette envie de gagner, d’imposer notre marque, de faire mieux que ce que les Experts ont fait avant nous", dit-il, avant d'y ajouter une nuance : "Ce n'est pas possible, on ne va pas se mentir, mais c’est notre but. On a envie de tout gagner".
Ça arrive rarement, voire même jamais, qu’un joueur arrive dans l’équipe et qu’on se calque sur lui
Les handballeurs tricolores le font grâce à une méthode tout en douceur, comme l’explique "le patron" - pour reprendre l’expression de Remili - Nikola Karabatic, dix médailles d’or autour du cou avec la France : "J’essaie juste de faire ce que les anciens ont fait quand je suis arrivé, de faciliter l’intégration (des nouveaux, ndlr) et de leur expliquer le fonctionnement de l’équipe, en tout cas d’essayer de rendre cette entrée en équipe de France la moins stressante possible". "Les rôles s’acquièrent avec l’expérience mais pas que. Le plus important c’est de savoir ce qu’on doit apporter à l’équipe", enchaîne Remili.
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Nedim Remili (à droite), ici en pleine discussion avec Valentin Porte, a pris, année après année, un peu plus de poids en équipe de France, jusqu'à en devenir le chef d'orchestre cette année

Crédit: Imago

Il est très vite rejoint par Vincent Gérard : "Ça arrive rarement, voire même jamais, qu’un joueur arrive dans l’équipe et qu’on se calque sur lui. Il faut que tout le monde puisse comprendre ce qu’est une grande compétition, comment on fonctionne", raconte le futur gardien de Kiel, alors que, depuis ses débuts sur le banc en janvier 2021, Guillaume Gille a sélectionné 36 joueurs différents sur les feuilles de match. Le petit dernier, le gardien Charles Bolzinger, est né en 2000.
Celui qui évolue à Montpellier a pu vivre ses premières minutes dans une compétition internationale lors des premiers matches, souvent lorsque le scénario était déjà plié, avant d’observer patiemment, depuis le tribunes, ses coéquipiers se rapprocher du Graal. "Au-delà d’être une bonne bande de potes bien cons en dehors du terrain, on a créé un super groupe, où chacun a trouvé son rôle et son équilibre sur le terrain. Ça nous permet d’utiliser le plein potentiel de cette équipe", se réjouit Nedim Remili.
"Même les très grands joueurs, quand ils découvrent une nouvelle équipe, n’explosent pas tout tout de suite. Il y a un cadre à appréhender, des automatismes à gérer, poursuit le portier numéro 1 des Bleus. C’est un sport co (sic), il faut absorber tout ça avant de tout exploser. Ce mode d’incorporation globale permet une assimilation plus homogène qui va beaucoup plus perdurer dans le temps", conclut Vincent Gérard. Les Français, qui l’ont déjà démontré en s’assurant de finir sur le podium d'un Mondial pour la 12e fois lors des 16 dernières éditions (dont 6 médailles d’or), ont bien l’intention de vanter un peu plus leur modèle en rajoutant une nouvelle étoile à leur maillot.
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