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Jo-Wilfried Tsonga, Gilles Simon : La vie sans entraîneur n'est pas un long fleuve tranquille

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ParEurosport

Mis à jour 19/10/2012 à 16:53 GMT+2

Jo-Wilfried Tsonga et Gilles Simon, qui ont décidé de faire seuls leur route à un moment donné de leur carrière, font office d'exception sur le circuit ATP. Si le Manceau semble avoir changé d'avis sur la question, être sans entraîneur témoigne d'une volonté d'indépendance intellectuelle et financière. Mais cette situation montre indéniablement ses limites et doit rester transitoire. Explications.

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Crédit: Eurosport

Être un joueur professionnel sans entraîneur sur le circuit ATP n'est pas chose courante. C'est pourtant une aventure que mènent de front Jo-Wilfried Tsonga, depuis plus d'un an, et plus récemment Gilles Simon, après s'être séparés respectivement d'Eric Winogradsky et de Thierry Tulasne. Les deux Français représentent une exception sur le circuit ATP, tant ils affichent leur envie de ne pas se lier à quelqu'un d'autre dans l'immédiat. Au sein du Top 20 mondial, seul Stanislas Wawrinka a fait également ce choix depuis la fin de sa collaboration avec Peter Lundgren. La cause qui caractériserait le mieux leur démarche est une grande volonté d'indépendance.
Fin septembre, Thierry Tulasne expliquait au Parisien que son ancien protégé souhaitait faire un peu comme Tsonga, "être seul pendant une saison". Mais un joueur esseulé sur le circuit l'est-il vraiment ? L'expression est somme toute relative : elle s'arrête au seul fait de ne pas avoir d'entraîneur attitré. "Les champions ne disent pas tout, explique Eric Winogradsky. En ce qui le concerne, Tsonga a beaucoup de gens autour de lui. Il travaille de façon très régulière avec Michel Franco, ancien kinésithérapeute d'Amélie Mauresmo, et avec Morgan Menahem, son agent qui le suit parfois sur les tournois. En dehors des rendez-vous auxquels il participe, Jo a fait appel à certaines personnalités pour l'aider à s'améliorer. Je pense à Yannick Noah ou encore à Patrick Rafter. Il a également fait untour dans l’académie d'Agassi à Las Vegas."
"Un joueur n'est jamais seul sur le circuit", confirme Patrice Hagelauer, Directeur Technique National de la Fédération Française. Depuis la fin de sa collaboration avec Thierry Tulasne, Gilles Simontravaille sur le plan physique avec Paul Quétin, entraîneur de l'équipe de France, quand il vient à Roland-Garros. Pour l'instant, il n'a personne avec lui sur les tournois, hormis peut-être sa femme et son petit garçon qui peuvent l'accompagner de temps en autre. Mais je pense que son but à court terme serait au moins d'avoir un kiné avec lui, surtout avec tous les petits bobos qu'il a ces derniers temps."
Federer, un exemple de solitude qui n'en est pas un
"C'est rare d'être sans entraîneur, mais ça va arriver de plus en plus car on a un Top 20 qui vieillit, argumentait Gilles Simon en marge du tournoi de Bangkok, où il a annoncé sa séparation. Quand tu approches de tes 30 ans, tu as moins besoin d'être guidé comme au début". Le point de vue des joueurs se laisse souvent guidé par la référence à Roger Federer. Sans entraîneur officiel alors qu'il était au sommet de sa carrière, le Suisse n'est pourtant pas un bon exemple à prendre car celui-ci n'a jamais connu une phase de "solitude" à proprement parler. Le numéro un mondial a toujours eu Severin Lüthi à ses côtés. Et quand il s'est lié avec des entraîneurs de renom, comme Tony Roche ou encore Paul Annacone, ce fut toujours en binôme avec le capitaine suisse de Coupe Davis.
Après une longue collaboration, comme ont pu le connaître Tsonga et Simon, évoluer sans quelqu'un d'attitré sur le circuit peut s'expliquer de différentes façons. D'un point de vue financier : la Fédération française a décidé cette saison de mettre davantage à contribution les joueurs pour la rétribution de leur entraîneur fédéral. D'un point de vue personnel, leur nouvelle "solitude" les oblige à se prendre davantage en main, en faisant eux-mêmes leur emploi du temps du matin au soir, mais elle leur permet aussi de se retrouver afin de connaître leurs réels besoins et de déceler le profil de l'entraîneur qui viendra les aider par la suite.
Même s'ils en ont finalement peu parlé ensemble, le Niçois ne réfute pas le parallèle avec le numéro un français. "Je sais que ça lui a fait du bien et ça montre que ça peut marcher." Et d'insister : "Cela fait quatre ans que je suis dans les vingt premiers et j'ai envie d'aller plus haut. J'ai le sentiment aujourd'hui d'être un peu bloqué et que ça vient de moi. J'ai besoin de me débrouiller un peu tout seul, de casser ma routine et de voir ce que ça peut donner. Il faut que je trouve plus de sérénité et je pense que devoir chercher les solutions au fond de moi va énormément m'aider. Aujourd'hui, je n'ai envie d'entendre aucun autre discours que le mien. J'ai une envie profonde d'être seul, avec personne qui me regarde, pas de staff, pas de camp".
Hagelauer: "Cela doit rester une phase transitoire"
"Si tous les joueurs du circuit travaillent avec un entraîneur attitré, en dépit de tout ce que ça coûte, c'est que ça leur est utile et indispensable, conteste Patrick Mouratoglou, actuel coach de Serena Williams et de Grigor Dimitrov. Psychologiquement, la fin de sa collaboration avec Eric Winogradsky a fait avancer le Manceau, selon ses propres dires. Pour lui, la saison 2012 a jusqu'ici été bonne avec deux titres ATP 250, une nouvelle demi-finale à Wimbledon, un premier quart à Roland-Garros et une médaille d'argent en double messieurs aux Jeux Olympiques. Mais toujours pas de finale de Grand Chelem, encore moins de victoire, un but pourtant affiché en grand dans ses objectifs. Être seul, "ça marche", mais dans une certaine mesure. "Picorer à droite et à gauche, ce n'est pas efficace, constate Mouratoglou. Mettre en place un vrai suivi tactique, ça l'est davantage. Faire une demi-finale à Wimbledon, c'est bien, mais cela reste un monde avec une victoire en Grand Chelem."
Conscient de son plafonnement, le numéro un français s'est d'ailleurs lancé à la recherche du coach idéal pour la saison 2013. Une quête souvent utile, mais loin d'être évidente, et pourtant nécessaire s'il veut encore évoluer au plus haut niveau. "C'est compliqué de trouver la bonne personne surtout quand tu es dans le Top 10 ou le Top 20, analyse Patrice Hagelauer. Il faut que la personne choisie ait de l'expérience, avec qui le joueur doit s'entendre parfaitement et avec qui il doit pouvoir facilement communiquer. Je sous-entends que la barrière de la langue peut parfois être un frein pour un joueur français. Ce n'est pas un robot.Un coach doit aussi intervenir sur le mental du joueur. La priorité, c'est la confiance que doivent s'accorder les deux personnes. C'est pour cela que ça rend la tâche difficile."
Être seul sous-entend une nouvelle façon de concevoir sa vie de joueur à un moment donné, mais engage une phase qui ne portera ses fruits que si elle prend fin. "Êtreface à lui-même,sans personne à qui rendre des comptes, cela peut être séduisant. Mais cela doit rester une phase transitoire, affirme encore Hagelauer. Quand cela dure trop longtemps, là, ça devient préoccupant car cela peut se retourner contre le joueur, surtout s'il s'est fixé de grands objectifs de carrière". Après plus d'un an face à lui-même, Tsonga a compris qu'il était temps que ça change. Reste à savoir combien de temps Simon prendra pour rebondir.
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