Privée de joueurs dans le Top 20 du classement ATP, la France broie du noir
Mis à jour 15/10/2018 à 15:59 GMT+2
SAISON 2018 - Ce lundi 15 octobre, le classement ATP marque la disparition des joueurs français parmi le Top 20. C'est une première depuis douze ans. Forcément, c'est quelque chose de marquant.
Paradoxe à la française. Alors que l'équipe de France de Coupe Davis a validé au mois de septembre dernier sa deuxième finale consécutive dans la mythique épreuve par équipes, le classement ATP du lundi 15 octobre a apporté une bien mauvaise nouvelle à tout l'Hexagone : plus aucun de ses représentants ne figure parmi le Top 20 à l'ATP. Le couperet est tombé après la sortie de route de Lucas Pouille, absent en Asie et donc automatiquement privé de ses 45 points glanés à Shanghai l'an dernier. Pour vingt petits points, le Nordiste, 22e désormais, a été bouté en dehors de ce cercle fermé. Cette disparition de nos chers bleus est une première depuis douze ans et le classement ATP du lundi 23 octobre 2006. Si cela venait à perdurer jusqu'à la fin de la saison, ce serait une première depuis vingt-deux ans et la saison 1996. Petite cause, grandes conséquences.
Baromètre impitoyable, le "ranking" mondial de l'ATP a finalement sanctionné une saison bien trop moyenne de la part du contingent français dont le meilleur joueur à la Race - Richard Gasquet - ne pointe qu'à la 26e place (1445 points). Cette péripétie fait surtout écho au raté des Bleus en Grand Chelem, où plus personne n'a mis les pieds en quarts de finale depuis l'Open d'Australie 2017 et le parcours de Jo-Wilfried Tsonga. Lors du dernier US Open, les Bleus, avaient ainsi complété un Grand Chelem calendaire sans quart de finale, une première peu glorieuse depuis 1980. Le tennis tricolore, c'est aussi deux saisons et demie sans qualification en finale d'un Masters 1000. Bref, sans performances dans les grands rendez-vous, au revoir les hautes sphères du classement. La chute de la maison bleue est le fruit d'une logique comptable implacable.
Français présents dans le Top 20 à la fin de la saison (depuis 2006)
Saison 2017 | Saison 2016 | Saison 2015 | Saison 2014 | Saison 2013 | Saison 2012 |
15 - Jo-Wilfried Tsonga | 7 - Gaël Monfils | 9 - Richard Gasquet | 12 - Jo-Wilfried Tsonga | 9 - Richard Gasquet | 8 - Jo-Wilfried Tsonga |
18 - Lucas Pouille | 12 - Jo-Wilfried Tsonga | 10 - Jo-Wilfried Tsonga | 18 - Gaël Monfils | 10 - Jo-Wilfried Tsonga | 10 - Richard Gasquet |
15 - Lucas Pouille | 15 - Gilles Simon | 19 - Gilles Simon | 16 - Gilles Simon | ||
18 - Richard Gasquet | 19 - Benoît Paire |
Saison 2011 | Saison 2010 | Saison 2009 | Saison 2008 | Saison 2007 | Saison 2006 |
6 - Jo-Wilfried Tsonga | 12 - Gaël Monfils | 10 - Jo-Wilfried Tsonga | 6 - Jo-Wilfried Tsonga | 8 - Richard Gasquet | 18 - Richard Gasquet |
12 - Gilles Simon | 13 - Jo-Wilfried Tsonga | 13 - Gaël Monfils | 7 - Gilles Simon | ||
16 - Gaël Monfils | 15 - Gilles Simon | 14 - Gaël Monfils | |||
19 - Richard Gasquet |
Le pilier Tsonga-Pouille n'est plus en 2018
Il y a une double lecture à ce manqué bleu-blanc-rouge : c'est soit le début d'une période de vaches maigres, soit un simple accident industriel. Il est la conséquence de plusieurs facteurs dont certains sont dus à la fatalité. C'est le cas de la blessure de Jo-Wilfried Tsonga. Auteur d'une belle saison 2017, malgré des ratés à Roland-Garros, Wimbledon et l'US Open, le Manceau a été mis sur le carreau toute la saison à cause d'une opération au genou gauche. Dernier vainqueur d'un Masters 1000 dans le clan tricolore et dernier quart de finaliste en Grand Chelem, Tsonga a laissé un vide non comblé en son absence. Si les grands rendez-vous n'ont pas été son fort depuis deux saisons, son retrait a fait remarquer à quel point il avait été régulier depuis une décennie. Conséquence : JWT a manqué au tennis français.
L'autre explication à ce désert est la saison très moyenne de Lucas Pouille, longtemps n°2 derrière Tsonga et Monfils, puis devenu n°1 au fil du temps. Hormis son excellent mois de février - titré à Montpellier, finale à Marseille et Dubaï - le Nordiste est globalement passé à côté de sa saison sur le plan individuel. L'exact inverse de 2017 où il avait excellé sur les autres tournois (lui et Tsonga avaient fait mainmise sur les cinq titres individuels remportés par la France). Entré dans le Top 20 après son quart de finale à l'US Open 2016, il y est resté un avant d'en sortir sept semaines à l'automne dernier après un bref passage par le Top 10. Cette sortie n'est pas une première pour le joueur de Grande-Synthe, désormais patron du tennis français. Avec 590 points à défendre à Vienne et au Rolex Paris Masters, fort probable qu'il devra s'armer de patience avant d'y revenir.
Une nouvelle génération pointe le bout de son nez
Longtemps encensé pour sa densité et sa régularité au plus haut niveau, le tennis français est aujourd'hui dans le creux de la vague. La relève attendue n'arrive pas ou elle s'est pris le mur du monde professionnel dans le visage. Et le seul Lucas Pouille ne peut pas tenir la boutique à lui tout seul. Sur les dix Français présents dans le Top 100 actuellement, neuf d'entre eux ont dépassé les 27 ans. En 2006, date de la dernière "crise", Gasquet et Monfils, alors 24e et 33e au classement, avaient alors 20 ans et tout l'avenir devant eux. Le classement ATP du 15 octobre 2018 est, lui, plus inquiétant : Gasquet, Simon, Monfils et Chardy ont tous dépassé la trentaine. Gasquet est, lui, passé à deux victoires de revenir le Top 20. A 32 ans, il est le mieux placé pour le réintégrer à court terme.
C'est bien le souci de la continuité et de la performance au plus haut niveau qui peut inquiéter à moyen terme. Le fameux trou noir que beaucoup prédisaient au tennis français pourrait arriver d'ici peu. Les chiffres sont d'ailleurs frappants : avant le lundi 15 octobre, et l'entrée dans le Top 100 d'Ugo Humbert (99e), le dernier Tricolore à avoir intégré le Top 100 pour la première fois était Pierre-Hugues Herbert lors de la saison 2015. Trois années se sont écoulées pour lui trouver un successeur. Il y a eu un raté entretemps que les Bleus payent plein pot.
Le ciel est gris pour les Bleus, mais il n'est pas totalement noir car il y a de la relève, moins en nombre mais assez atypique dans les profils. Avec son jeu de gaucher, Humbert dispose d'une palette technique assez large et intéressante pour continuer à grimper les échelons. Derrière, Corentin Moutet (19 ans), 118e et lui aussi gaucher, a montré des choses prometteuses cette saison, tout comme Antoine Hoang (22 ans), monté à la 166e place. En Argentine, Hugo Gaston, 18 ans, est devenu champion olympique junior la semaine dernière. Rien ne garantit le succès de ces joueurs, le tennis n'étant pas un long fleuve tranquille. Mais la France n'est pas à sec. Elle vit et elle respire, en témoigne son regain de forme en Coupe Davis. Mais avant de revoir des Top 20, elle devra faire preuve de patience.
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