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Indian Wells vintage : Le nouveau rêve américain du phénix Del Potro

Maxime Battistella

Mis à jour 22/03/2020 à 18:21 GMT+1

INDIAN WELLS - Il n'y aura pas de tennis à Indian Wells cette année (merci le coronavirus). Cela nous laisse un peu de temps pour nous replonger dans les grandes heures du tournoi. En ce dimanche, jour de finale, cap sur 2018 et un combat tendu, féroce, magnifique et haletant pour le titre entre Juan Martin Del Potro et Roger Federer qui a consacré la remarquable persévérance de l'Argentin.

Finale Indian Wells 2018 : Juan Martin Del Potro et Roger Federer.

Crédit: Getty Images

Juan Martin Del Potro – Roger Federer

Edition : 2018
Tour : Finale
Vainqueur : Juan Martin Del Potro (Argentine)
Adversaire : Roger Federer (Suisse)
Score : 6-4, 6-7 (8), 7-6 (2)
Il y a deux ans, une anomalie a été corrigée. Jusqu’alors Juan Martin Del Potro, pourtant l’un des rares à avoir triomphé en Grand Chelem à une époque où trois monstres n’ont quasiment rien laissé, ne comptait aucun Masters 1000 à son palmarès. Ce n’était pourtant pas faute d’avoir essayé. Il avait perdu ses trois finales précédentes à Montréal en 2009, Indian Wells et Shanghaï en 2013, à chaque fois en trois sets respectivement contre Andy Murray, Rafael Nadal et Novak Djokovic, trois membres du fameux "Big Four". Face au quatrième, Roger Federer, il est finalement allé chercher une récompense mille fois méritée au terme d’un thriller à couper le souffle.
Un peu moins de neuf ans après son sacre retentissant à Flushing Meadows, la "Tour de Tandil" retrouve le statut qui semblait alors lui être dévolu : celui de facteur X, capable de bousculer la hiérarchie d’un circuit régi quasiment en continu depuis quinze ans par un trio suisso-hispanico-serbe. A la fin de la saison 2009, Federer, himself, avait d’ailleurs cité Del Potro parmi les prétendants à la place de numéro 1 mondial pour l’exercice suivant. Mais colosse aux pieds, ou plutôt au poignet gauche, d’argile (opéré en 2010, 2014 et 2015), celui-ci n’a jamais pu réellement concrétiser cette promesse.
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Juan Martin Del Potro à Indian Wells en 2018

Crédit: Getty Images

La renaissance d'un phénomène de puissance

Une telle poisse aurait vaincu la détermination de n’importe quel athlète, mais pas celle de l’Argentin. A chaque fois qu’il a touché le fond, il a rebondi spectaculairement. Et cette semaine californienne signe son retour en majesté, deux ans tout juste après avoir atteint une crépusculaire 1045e place mondiale. Sa médaille d’argent à Rio en avait été le signe précurseur, sa saison 2017 avait confirmé la tendance, préparant son retour dans le top 10 début 2018. Et en mars, "Delpo" surgit, comme si les galères n’avaient fait que renforcer sa détermination, retrouvant sa brutalité bestiale en coup droit.
Sur la lancée d’un sacre impressionnant à Acapulco où il a balayé trois top 10 – Dominic Thiem, Alexander Zverev et Kevin Anderson –, il engrange victoires et confiance dans le désert d’Indian Wells et réserve son meilleur tennis pour la fin. En demi-finale, Milos Raonic, est réduit au rang de simple sparring-partner, expédié (6-2, 6-3) en à peine de plus d’une heure. Mais le plus dur reste à venir pour la "Tour de Tandil". Car en finale, c’est Roger Federer, le plus vieux numéro 1 mondial de l’histoire du jeu à plus de 36 ans, qui se présente de l’autre côté du filet.
Si Del Potro reste sur dix succès d’affilée sur le circuit, le Suisse fait encore mieux puisqu'il n'a pas perdu le moindre match en ce début de saison (17-0). En défendant son titre à Melbourne en janvier, il a franchi la barre mythique des 20 couronnes en Grand Chelem, avant de s'imposer à Rotterdam pour retrouver "son" trône. Federer semble donc aborder ce duel avec les cartes en main. Mais la puissance de l’Argentin le désarçonne rapidement. Del Potro, qui avait pris l'habitude de slicer en revers pour soulager son poignet depuis son énième retour sur les courts, surprend le Bâlois en recouvrant la plupart de ses coups de ce côté et enlève logiquement la première manche.
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Juan Martin Del Potro à Indian Wells en 2018

Crédit: Getty Images

Quand intensité dramatique et maîtrise tennistique ne font qu'un

Sur un fil, Federer est tout près de céder son service en début de deuxième set. A mesure que la tension monte, la finale gagne en qualité et s’équilibre. Les parpaings succèdent aux demi-volées. Slices, coups droit décroisés, passings, lobs et tweeners, tout y passe. Alors qu’il mène 5-4, le Suisse voit deux balles d’égalisation à un set partout lui filer sous le nez à la relance. Le tie-break est ensuite irrespirable : alors qu’il mène 6 points à 5, il croit encore en avoir fini avec un service gagnant extérieur. Le hawk-eye lui donne tort et le pousse à la double faute. Contraint même de sauver une balle de match sur son service, Federer s’arrache finalement en défense pour s’adjuger l’affaire 10 points à 8 et tout relancer.
Comme face à Nadal cinq ans plus tôt – il menait alors d’un set et d’un break – "Delpo" semble avoir laissé passer sa chance. Car si les deux joueurs se rendent coup pour coup dans un ultime acte endiablé, c’est bien le Suisse qui se montre le plus menaçant à la relance. Et à 4 jeux partout, il porte l’estocade et se retrouve rapidement en position de conclure sur son service dans le jeu suivant à 5-4, 40/15. Et pourtant, poussé par l’énergie du désespoir ou par la conviction que cette fois, il ne cèderait pas, l’Argentin lâche tout.
Sur les talons sur sa première occasion de l’emporter, Federer gâche la deuxième par précipitation : son bras se met à trembler et il expédie une amortie de revers dans le filet. Le Suisse ne se laisse pourtant pas abattre obtient même une troisième opportunité de conclure. Il se retrouve en bonne position dans le court, mais son adversaire lit parfaitement sa nouvelle tentative d’amortie pour le passer le long de la ligne. Et, contre toute attente, la dynamique change de côté, une dernière fois. D’un coup de marteau croisé, Del Potro sort un débreak de nulle part et reprend l’avantage psychologique au meilleur des moments. Quelques minutes plus tard, il lève les bras, incrédule, après un jeu décisif à sens unique bouclé 7 points à 2, après 2h42 d’une finale aussi tendue que sublime.

Comme à Flushing, Federer rate le coche

La pilule est difficile à avaler pour l’homme aux 20 titres du Grand Chelem. Ce premier accroc en 2018 annonce la fin de son emprise un temps retrouvée sur le circuit. Mais l’accolade est chaleureuse au filet, et il ne manquera pas de féliciter un adversaire qu’il respecte beaucoup. "Quand c’est si serré, c’est fou à quel point les choses peuvent vite changer. Même si j’avais manqué plusieurs opportunités avant, pendant la cérémonie de remise des trophées, je pensais que j’aimerais bien rejouer ce dernier tie-break, parce je ne sais pas du tout ce qui s’est passé. Mais ça arrive parfois, bravo à lui !" L’histoire bégaie pour Federer, qui avait eu aussi le match en main en finale de l’US Open en 2009, avant de finalement rendre les armes après cinq sets épiques.
L’Argentin, extatique, semble lui-même ébahi par ce retour inattendu au premier plan. "C’est énorme. Je n’arrive pas à croire que j’ai gagné ce tournoi, en battant Roger après une grande finale de très haut niveau. Je suis numéro 6 mondial, je pense, ce qui est bien pour moi. Il me tarde de continuer à travailler pour aller chercher d’autres titres." Le sort et une fracture de la rotule du genou droit en décideront autrement à Shanghaï quelques mois plus tard, alors même qu’il sortait d’une deuxième finale de Grand Chelem à Flushing (perdue face à Djokovic). Depuis ce sacre californien, il n’a plus soulevé le moindre trophée sur le circuit. De là à qualifier ce dernier épisode glorieux de chant du cygne, il n’y a qu’un pas… que nous ne franchirons pas connaissant l’animal.
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Juan Martin Del Potro et Roger Federer à Indian Wells en 2018

Crédit: Getty Images

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