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Surréaliste Tsonga, prodigieux Federer, miraculeux Becker : Le Top 50 de l'Open d'Australie (20-11)

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 28/01/2021 à 15:58 GMT+1

OPEN D'AUSTRALIE - Nous rentrons parmi les 20 premiers de notre classement des matches les plus marquants de l'histoire de l'Open d'Australie dans l'ère Open. On y retrouve notamment la sidérante performance de Jo-Wilfried Tsonga en 2008 contre Rafael Nadal, éparpillé aux quatre coins de la Rod Laver Arena. Mais aussi la première finale de la nouvelle ère du tournoi, et quelques épiques duels.

Top 50 Australie : Tsonga, Federer, Becker.

Crédit: Eurosport

Par Maxime BATTISTELLA, Rémi BOURRIERES et Laurent VERGNE

11. Mats Wilander - Pat Cash

Edition : 1988
Finale
Vainqueur : Mats Wilander (Suède)
Adversaire : Pat Cash (Australie)
Score : 6-3, 6-7(3), 3-6, 6-1, 8-6
Pour beaucoup, l'édition 1988 marque la véritable date de naissance de l'Open d'Australie. C'est exagéré, mais c'est vrai que c'est cette année-là, celle où il a quitté le "vieux" Kooyong pour prendre ses quartiers dans le stade actuel, que le tournoi a basculé dans une autre dimension.
Et pour ce baptême de feu, l'épreuve s'offre une finale légendaire, la seule dans l'ère Open à s'être prolongée au-delà des 6-6 au 5e set. Ce Wilander-Cash, nous avons, pour être honnêtes, hésité à le mettre dans le top 10. Il a juste été victime d'une concurrence acharnée...
Avant le tournoi, pour l'anecdote, Cash a invité Wilander à venir s'entraîner chez lui. Ingrat, le Suédois le remercie en jouant pendant un set et demi ce qu'il considèrera comme le meilleur tennis de sa vie. Il mène 6-3, 4-1 lorsque le match est interrompu une grosse demi-heure en raison d'une averse. Contrairement à la finale dames la veille, les organisateurs ont choisi de laisser le toit ouvert malgré le temps menaçant.
A la reprise, le vainqueur sortant de Wimbledon est un autre homme. Il remonte, arrache le 2e set au tie break puis se détache 3-0, balle de 4-0 au 3e set lorsqu'une nouvelle interruption pluvieuse de 18 minutes survient. Ce qui ne l'empêche pas de remporter ce 3e set, mais le coupe un peu dans son élan à l'amorce du 4e.
Tout se joue donc dans un 5e set à couper le souffle. Wilander breake d'entrée mais Cash refuse de céder. A 5-4, 40-40, il est à deux points de connaître l'incommensurable bonheur de triompher chez lui. Mais Mats ne flanche pas. A 6-6, au terme d’un jeu irrespirable, c’est lui qui réalise le break décisif après un point extraordinaire qu’il parachève par un de ses célèbres "Vicht". Il conclut derrière après 4h29, ce qui est (à l'époque) le record de la plus longue finale en Australie.
Wilander devient ainsi le premier homme (pas le dernier...) à remporter trois fois le tournoi dans l'ère Open. Quant à Cash, il s'incline pour la deuxième année d'affilée dans une finale en cinq sets contre un Suédois...

12. Boris Becker - Omar Camporese

Edition : 1991
3e tour
Vainqueur : Boris Becker (Allemagne)
Adversaire : Omar Camporese (Italie)
Score : 7-6(4), 7-6(5), 0-6, 4-6, 14-12
Avec sa dégaine de mafioso sicilien tout droit sorti d'un film de Scorsese, Omar Camporese a bien failli réussir ce qui serait peut-être devenu le plus célèbre braquage de l'Open d'Australie. Il a échoué mais son morceau de panache a donné lieu à l'un des matches les plus épiques de l'histoire du tournoi.
Ce match, disputé sur le Court 1 (l'ancêtre de la Margaret Court Arena), a duré 5h11 minutes, un nouveau record de durée à l'époque, devant les 4h59 du Sampras-Mayotte établi un an plus tôt (voir la tranche "31-40" de notre classement). Mais qu'il ait atteint une telle extrémité est un miracle. Car mille fois, durant ce match, on crut bien qu'Omar était cuit...
Non sans démériter, le ténébreux Transalpin, 22 ans, 45e mondial, se retrouve d'abord mené 2 sets à rien. Il profite alors d'un gros coup de mou adverse pour recoller un peu mais dans le 4e set, Becker reprend sa marche en avant. Et c'est là que Camporese passe en mode "survivor". A trois reprises dans ce 4e set, il est mené 0-30 sur son service, et même 0-40 à 4-4, jeu dans lequel il sauve 4 balles de break en tout, chaque fois en décochant des missiles au service ou en coup droit. Avant de réussir le hold-up parfait au jeu suivant.
Dans le 5e set, long de plus de 2h, le Bolonais manque de pousser plus loin encore le niveau d'escroquerie. Il perd son service à 10-10, se retrouve avec trois balles de match à sauver à 11-10, 40-0, service Becker... et aligne alors cinq points dont trois gagnants ! Derrière, re-belote : break Becker, débreak immédiat de Camporese qui revient à 12-12.
Finalement, Boris breake une troisième fois d'affilée et prend soin, cette fois, de sortir l'artillerie lourde en faisant siffler deux aces aux oreilles de son adversaire pour le finir. Reste une crainte : avec ce marathon, Omar ne l'aurait-il pas tuer ? Ces doutes, l'Allemand les balaiera en décrochant le titre, son premier à l'Open d'Australie. Avec en prime, pour la première fois aussi, la place de n°1 mondial. Mais le coup passa si près...

13. Andre Agassi - Pete Sampras

Edition : 2000
Demi-finale
Vainqueur : Andre Agassi (Etats-Unis)
Adversaire : Pete Sampras (Etats-Unis)
Score : 6-4, 3-6, 6-7(0), 7-6(5), 6-1
La rivalité entre Andre Agassi et Pete Sampras a accouché de bien des bijoux qui ont souvent tourné à l’avantage du deuxième. En Grand Chelem, le Californien a ainsi remporté les deux tiers de leurs chocs (6-3). Mais si Dédé n'a jamais battu Pistol Pete ni à Flushing Meadows ni sur le gazon de Wimbledon, l'inverse est aussi vrai en Australie et sur la terre battue de Roland-Garros. Devant les 15 000 spectateurs d’un court central tout juste renommé Rod Laver Arena, les deux Américains s’en donnent à cœur-joie, cette demi-finale a des allures de finale.
Le Russe Yevgeny Kafelnikov lui-même, pourtant tête de série numéro 2 et finaliste de l’épreuve, le reconnaît. "Les réels numéros 1 et 2 mondiaux sont Sampras et Agassi." Dans un grand jour au service (37 aces, son record !), malgré la perte du premier set, Pistol Pete parvient à s’adjuger les deux manches suivantes dans des conditions rendues fraîches par le vent. Mais le match prend une dimension supérieure dans le tie-break du quatrième set, somptueux.
Le roi Pete l'aborde avec un réel avantage psychologique, lui qui n'a pas laissé le moindre point à son adversaire dans la même situation lors de la manche précédente. Il prend même une option sur la victoire lorsqu’il décoche passing de coup droit croisé en bout de course irréel qui lui offre le mini-break à 4-3. Un coup de génie qui ressemble fort à un coup de grâce. Mais Agassi, d'une précision létale au retour et au passing, ne veut pas mourir et refait immédiatement son retard. Sur 12 points, les deux hommes frappent 11 coups gagnants. Et Dédé a le dernier mot. Un tournant crucial dont Pistol Pete, touché à la hanche (une déchirure du muscle fléchisseur dont il ne se servira pas comme excuse), ne se relèvera pas.
"Les meilleures sensations qu'on peut ressentir sur un court, c'est quand quelqu'un vous pousse à toucher vos limites, et que vous parvenez à aller encore un peu plus loin. Ça peut arriver contre n'importe quel joueur, mais il semble que Pete l'exige de vous plus souvent que les autres", glissera Agassi dans un hommage appuyé. Il devient ainsi le premier joueur à atteindre quatre finales consécutives en Grand Chelem depuis un certain Rod Laver en 1969.

14. Rafael Nadal - Grigor Dimitrov

Edition : 2017
Demi-finale
Vainqueur : Rafael Nadal (Espagne)
Adversaire : Grigor Dimitrov (Bulgarie)
Score : 6-3, 5-7, 7-6(5), 6-7(4), 6-4
De cette édition 2017, l'histoire a essentiellement retenu la fabuleuse résurrection de Roger Federer et cette finale si forte en symboles face à son rival Rafael Nadal. C'est normal. Mais c'est faire un peu ombrage à la sensationnelle demi-finale que l'Espagnol avait lui même remportée deux jours plus tôt contre Grigor Dimitrov.
Si l'histoire du tennis est constellée de perdants magnifiques, le Bulgare fut peut-être ce jour-là le plus brillant d'entre eux. Rafa lui rentre pourtant tout de suite dans le lard avec un break rapide et le gain du 1er set. Mais le Bulgare détonne par son attitude exceptionnelle. Jamais sans doute ne l'avait-on vu si constant, dans ses coups comme dans sa tête. Ainsi, il ne pipe mot lorsqu’il laisse filer par deux fois un break d’avance au 2e set, qu’il finit par conclure sur un nouveau break.
C'est à partir du 3e set que ce match devient vraiment légendaire. Nadal le remporte à l'issue d'un jeu décisif dans lequel il se montre solide comme un roc. Mais au 4e set, l'arroseur se retrouve arrosé : cette fois, c'est Grigor qui enlève le tie-break, dans lequel il frappe 5 de ses 79 coups gagnants (contre 45 pour Nadal).
Si c'était possible, le niveau s'élève d'encore un cran au 5e set qui débute alors que la pendule indique quasiment 4h de match. Et 10 minutes de plus après un long premier jeu dans lequel Dimitrov sauve trois balles de break. Cette fois, la balance semble pencher du côté du Bulgare, euphorique, offensif à tout crin, et tout près de faire la différence lorsqu'il obtient, à 4-3 en sa faveur, deux balles de break (15-40).
Mais Rafa, une fois de plus, fait la démonstration de sa grandeur. Il écarte ces deux balles de break avec les tripes, pour ne pas dire autre chose, d’un revers gagnant magistral suivi d’un furieux enchaînement coup droit/volée gagnante. Le tout ponctué d'un cri de rage et d'un regard habité. C'est fini. Le Majorquin enchaîne 6 points (et trois jeux) consécutifs pour plier le match après 4h56. Quant à Dimitrov, il aura au moins gagné une immense ovation. Largement méritée.

15. John Newcombe - Tony Roche

Edition : 1975
Demi-finale
Vainqueur : John Newcombe (Australie)
Adversaire : Tony Roche (Australie)
Score : 6-4, 4-6, 6-4, 2-6, 11-9
Il est toujours délicat d’affronter un compatriote. Alors quand celui-ci est un ami, parfois, c’est une torture. C’est ce qui est arrivé aux partenaires à succès australiens John Newcombe et Tony Roche en demi-finale de l’édition 1975 de l’Open d’Australie. Vingt-quatre heures seulement après avoir gagné côte-à-côte sur le court en quart de finale du tableau de double, les deux hommes se retrouvent face-à-face avec en jeu une place en finale du simple face au nouveau cannibale effronté de la planète tennis, Jimmy Connors.
C’est d’ailleurs Jimbo qui, indirectement, a permis la tenue de cette demi-finale à suspense, puisque Newcombe n’avait pas l’intention de participer au tournoi cette année-là. A ce stade de sa carrière – il a alors 30 ans et 6 titres en Grand Chelem dans la besace –, il compte bien passer les fêtes de fin d’année en famille, d’autant que l’Open d’Australie souffre régulièrement de l’absence des meilleurs joueurs du monde. Mais titillé par la présence de Connors, qui vient de lui chiper la première place mondiale, l'Aussie se laisse finalement convaincre, malgré 4 kilos en trop.
Déjà miraculé au 2e tour et en quart, Newcombe se présente usé face à Roche, ce qui ne l’empêche pas de s’infliger un… troisième marathon en 5 sets. D’abord devant 2 manches à 1, il se retrouve en fâcheuse posture dans l’ultime acte, mené 5-2. Mais le grand moustachu a trop envie de se mesurer à l’insolent Jimbo pour lâcher l’affaire. Il recolle et finit par vaincre son ami 11-9. "Je me sens aussi vieux que Ken Rosewall maintenant", lâchera-t-il, en guise de clin d’œil à son illustre aîné de 10 ans, alors encore en activité.
Lorsqu’ils se retrouvent aux vestiaires après s’être joyeusement étripés sur le gazon de Melbourne, le malheureux Roche, pour la 4e fois arrêté aux portes de la finale devant son public (il n’ira jamais plus loin), n’en prend pas ombrage. Il accède même à la requête de son ami épuisé qui, pour avoir une chance en finale, lui demande de déclarer forfait pour leur demie du double. Cette lutte quasi-fratricide aura été un mal pour un bien : désormais bien réglé contre un gaucher, Newcombe fera fi de la fatigue pour aller chercher le titre face à Jimbo qui, lui, ne remettra plus les pieds en Australie.

16. Stefan Edberg - Pat Cash

Edition : 1987
Finale
Vainqueur : Stefan Edberg (Suède)
Adversaire : Pat Cash (Australie)
Score : 6-3, 6-4, 3-6, 5-7, 6-3
Une somptueuse finale comme symbole de la fin d’une époque. Celle de l’âge d’or des serveurs-volleyeurs. Pour la dernière fois de son histoire, l’Open d’Australie se joue sur le gazon du mythique club de Kooyong avant d’opter l’année suivante pour le dur sur le site actuel de Melbourne Park. Déjà vainqueur en 1985 et donc tenant du titre – il n’y a pas eu d’édition 1986 car la date du tournoi a été changée de décembre à janvier –, Stefan Edberg, qui n’a lâché qu’un set dans avant la finale, remet sa couronne en jeu face au revenant et chouchou du public, Pat Cash.
L’Australien, battu d’un rien en 1984 à seulement 19 ans contre Ivan Lendl en demi-finale de l'US Open, a connu l’enfer ensuite, une blessure récurrente au dos contrariant ses ambitions. Quelques mois avant cette finale, il pointe ainsi à la 418e place mondiale, avant de retrouver le Top 100 après un quart à Wimbledon. Remonté au 24e rang avant le tournoi, il n’a qu’une seule obsession : briller devant son public. Cash se sort du piège tendu par Paul Annacone en huitième, puis se transcende : Yannick Noah, 4e mondial, et surtout Ivan Lendl, numéro 1, en font les frais en quart et en demie.
Onze ans après Mark Edmondson, toute l'Australie rêve du triomphe de l’un des siens. Mais Edberg ne l’entend pas de cette oreille. Il s’adjuge les deux premiers sets rapidement laissant seulement 9 points en route sur son service. Le niveau monte encore, les volées sont tranchantes, l’agilité des deux hommes au filet est un délice pour les yeux. Porté par son public, l’homme au bandeau se rebelle et la dynamique change : Cash gagne le 3e et mène 5-1 dans le 4e, mais laisse Edberg revenir à 5-5, trahi par son service. Si l’Aussie arrachera finalement le droit de jouer une 5e manche décisive, les deux hommes conviendront que la finale s’est jouée là.
"J'étais en roue libre, et j’aurais dû lui maintenir la tête sous l'eau", expliquera le finaliste malheureux. Car Edberg, s’il n’a pas réussi à conclure en 4 sets, a repris pied pour s'imposer… au filet évidemment. L’élégant Suédois tord ainsi le cou aux critiques qui doutent de sa capacité à se battre quand tout ne tourne pas comme il l’entend. Cash, lui, s’est prouvé qu’il pouvait manger à la table des grands et en récoltera les fruits dans un autre jardin, celui du All England Club quelques mois plus tard.

17. Roger Federer - Andy Roddick

Edition : 2007
Demi-finale
Vainqueur : Roger Federer (Suisse)
Adversaire : Andy Roddick (Etats-Unis)
Score : 6-4, 6-0, 6-2
Roger Federer a copieusement martyrisé Andy Roddick tout au long de sa carrière, en le dominant notamment quatre fois en finale de Grand Chelem. Mais jamais l'Américain n'a été humilié comme lors de cette demi-finale de l'Open d'Australie 2007. Pourtant, il y croit, Andy. Quatre mois plus tôt, en finale, à Flushing, il a accroché le Suisse. Puis au Masters, fin 2006, il a obtenu trois balles de match. Et même si c'était une simple exhibition, il a ensuite battu Federer à Kooyong juste avant l'Open d'Australie.
Alors, pourquoi pas ? D'autant que, sur la route des demi-finales, Roddick se montre en verve. Notamment lors de son quart de finale contre Mardy Fish, qu'il expédie 6-2, 6-2, 6-2 en 90 minutes, en ne commettant que deux fautes directes. Pendant ce temps, Federer se montre un peu brouillon contre Tommy Robredo. Il s'impose en trois sets, mais lâche quatre fois son service. Une petite musique se lève à Melbourne. Et si c'était enfin l'heure de Roddick, qui reste sur huit défaites de rang contre sa bête noire ?
Gonflé à bloc par son coach Jimmy Connors, A-Rod y croit. Breaké d'entrée, il remet les compteurs à zéro dans le 4e jeu. A 4-4, Roddick est au service. 30-15. Passing de revers gagnant de Federer. 30 A. Faute de Roddick en revers. 30-40. Les deux joueurs se retrouvent au filet. Plus rapide, plus précis, le Suisse fait le point pour breaker. Personne n'en a encore conscience, mais ce n'est pas seulement ce 1er set qui vient de se jouer. Le match est terminé.
Roger Federer se hisse dans une dimension alors inconnue du commun des mortels. Pendant près d'une heure, il joue un tennis proche de la perfection. Il remporte 11 jeux de suite (dont 24 points sur 27 joués au milieu de ce chef-d'œuvre !) pour mener 6-4, 6-0, 2-0. C'est peut-être, de toute la carrière du Bâlois, son passage le plus prodigieux, le plus merveilleux, avec un point en guise de symbole : sur un coup droit parpaing balancé près du filet avec toute la frustration du monde par Roddick, Federer décoche depuis sa ligne de fond un revers en demi-volée, parfait de maîtrise et de toucher. Presque gêné, il s'excuse, même s'il peine à réprimer un petit sourire. Le ralenti, sur l'écran géant, entraîne un murmure d'admiration dans le public.
Roddick arrache deux jeux d'ici la fin de la demi-finale, mais il ressort détruit, entre écœurement et incompréhension. Federer parle d'un niveau de jeu "irréel". Ce match est peut-être le plus beau symbole de sa période dorée 2004-2007, où, Roland-Garros mis à part, il a marché sur le tennis mondial. Roddick, lui, va finir d'ancrer ce moment dans la légende lors d'une conférence de presse d'anthologie, entre dépression et autodérision :
"C'était frustrant, c'était pathétique, ça craignait, c'était horrible. A part ça, ç'a été."
A 4-4 dans le premier set, il vous a breaké...
A.R. : (il coupe) Oui il m'a breaké, et après encore trois fois, et après encore deux fois et après c'était fini en 24 minutes. C'est ce que vous avez-vu aussi ?
Vous aviez dit avant le match que la marge entre vous deux s'était rétrécie...
A.R: (il coupe) Oui, mais pas ce soir.
Comment évaluez-vous les chances de l'adversaire de Federer en finale ?
A.R.: Minces.
Il aura raison. Fernando Gonzalez, dernière victime, résistera mieux que lui, mais prendra ses trois sets. Pour la première fois depuis Björn Borg à Roland-Garros en 1980, un joueur remporte un Grand Chelem sans avoir perdu une seule manche.

18. Mats Wilander - John McEnroe

Edition : 1983
Demi-finale
Vainqueur : Mats Wilander (Suède)
Adversaire : John McEnroe (Etats-Unis)
Score : 4-6, 6-3, 6-4, 6-3
Vainqueur de Roland-Garros à seulement 17 ans au printemps 1982, Mats Wilander a échoué en finale à Paris un an plus tard. Quart de finaliste à l'US Open, il s'est tout de même globalement ancré parmi le gratin. Il regagnera des Majeurs, et vite. Mais pas dans cette saison 1983. Il reste certes l'Open d'Australie, qui se tient alors au mois de décembre, mais le gazon, ce n'est pas son truc à Mats, même si celui de Kooyong est plus adapté à son jeu que celui, ultra-rapide, de Wimbledon. Mais personne n'y croit.
De toute façon, si Wilander a effectué le déplacement aux Antipodes, c'est pour la finale de Coupe Davis, prévue dans la foulée de "l'Australian", du 26 au 28 décembre. Ce dernier Grand Chelem de l'année, pour le Suédois, c'est donc une "simple" préparation pour la finale de la vénérable Davis. "Honnêtement, je n'ai jamais pensé une seconde que je pouvais gagner le tournoi en arrivant ici", avoue-t-il.
Lorsqu'il se hisse en demi-finales, sa quinzaine est donc déjà réussie. Là, il retrouve John McEnroe, archi-favori, qui a ridiculisé la concurrence à Wimbledon cinq mois plus tôt. Big Mac s'est promené jusque-là, sans perdre un set. Il domine la première manche contre Wilander et l'implacable scénario semble se mettre en place. Sauf que l'Américain commet une erreur stratégique fatale : jugeant le gazon un peu lent à son goût, il décide de jouer majoritairement du fond du court. Complexe de supériorité ? Toujours est-il qu'à ce jeu-là, Wilander, même sur herbe, est le maître.
Peu à peu, il dicte le tempo et McEnroe ne se sortira jamais de cette toile que, paradoxalement, il aura contribué à tisser. Devant un public incrédule mais conquis, Wilander s'impose en quatre sets, presque facilement. Le central de Kooyong lui réserve une standing ovation. En finale, le jeune Scandinave va écraser Ivan Lendl, alors encore en proie à ses démons, pour signer un des plus retentissants exploits de sa carrière. "Jamais je n'aurais pensé que Mats pouvait gagner le tournoi", confie Lendl.
La Suède s'inclinera en finale de la Coupe Davis contre l'Australie, mais Mats, lui, n'avait pas tout perdu. Et l'Open d'Australie a tout gagné : après des années de vaches maigres, cette édition 1983, avec tout le gratin mondial moins Connors, lui a redonné son lustre.

19. Jo-Wilfried Tsonga - Rafael Nadal

Edition : 2008
Demi-finale
Vainqueur : Jo-Wilfried Tsonga (France)
Adversaire : Rafael Nadal (Espagne)
Score : 6-2, 6-3, 6-2
Un ultime ace, son 17e, suivi d'un petit sourire en coin, mi-narquois, mi-incrédule. Et c'est tout. Jo-Wilfried Tsonga n'y croit pas. Il vient de dominer, pardon, de gifler littéralement Rafael Nadal pour devenir le troisième joueur français de l'histoire à atteindre la finale en Australie (après Jean Borotra en 1928 et Arnaud Clément en 2001). Et l'on dirait qu'il vient de conclure une partie de boules sur la place du village. "En fait, je prenais tellement de plaisir que j'aurais voulu que ça dure encore, expliquera le Manceau. C'était de la folie. Je réussissais tout ce que je voulais, même en fermant les yeux. C'était juste magique."
Tu m'étonnes, Jo. Ce soir-là, sous le toit fermé de la Rod Laver Arena, celui qu'il convient plutôt d'appeler désormais Big Jo vient de réussir le match parfait. Le match dont on n'oserait même pas rêver. Trop gros, trop fort, trop puissant... Et ce à 22 ans, pour sa première demi-finale majeure.
Ce n'est même pas que Nadal joue mal, pourtant. Pour preuve, le n°2 mondial ne commet que 12 fautes directes au total. C'est juste qu'il est complètement englouti par le "Tsonga Tsunami" qui lui passe 49 coups gagnants aussi facilement qu'un couteau de cuisine rentre dans du beurre fondu.
Balle de 1er set ? Un bijou de volée amortie réflexe. Balle de break au 2e set ? Un enchaînement service/smash en extension. Deux petites balles de break à écarter au début du 3e set ? Nouvelle volée réflexe amortie, service gagnant. Un léger tremblement à la conclusion, peut-être ? Smash, coup droit assassin, ace. Merci et au revoir, après 1h57.
"Il m'a tout fait, je n'ai rien compris. Seul Federer peut jouer comme il l'a fait", dira Nadal. K.-O., groggy, écœuré. L'Espagnol vient de subir l'une de ses deux plus lourdes défaites en Grand Chelem. Dans toute sa carrière.

20. Mikael Pernfors - John McEnroe

Edition : 1990
Huitième de finale
Vainqueur : Mikael Pernfors (Suède)
Adversaire : John McEnroe (Etats-Unis)
Score : 1-6, 6-4, 5-7, 4-2, disqualification
Avant Novak Djokovic à l'US Open l'an passé, c'était la disqualification la plus célèbre de l'histoire du tennis. Il y a trente ans, le code de conduite n'était pas ce qu'il est aujourd'hui. Le seuil de tolérance vis-à-vis des principales têtes de lard du circuit non plus. Nous parlons d'une époque où Jimmy Connors et John McEnroe pouvaient copieusement insulter les arbitres sans recevoir ne serait-ce qu'une réprimande verbale.
Alors, lorsque McEnroe est éjecté de l'Open d'Australie lors de son huitième contre Mikael Pernfors en 1990, le choc est énorme. Pour lui et pour le tennis en général. Mais cette fois, il va payer son attitude de cumulard jusqu'au-boutiste.
Ses problèmes commencent au début du 3e set, alors que les deux joueurs sont à égalité une manche partout. En regagnant sa chaise à 2-1, il s'arrête devant une juge de ligne qu'il a pris en grippe. Il se pose devant elle, la toise, fait rebondir la balle sur sa raquette. L'arbitre, Gerry Armstrong, lui inflige un avertissement.
L'affaire aurait pu en rester là, mais un peu plus tard, au milieu du 4e set, le New-Yorkais balance sa raquette après une faute en coup droit. Puis après une autre faute, il s'en prend à nouveau à son outil de travail. Nouvel avertissement, point de pénalité. McEnroe s'attaque alors directement à Gerry Armstrong, commence à lui crier dessus, lui balance des insanités et demande l'intervention du juge-arbitre, Ken Farrar. Celui-ci arrive mais Mac ne se calme pas. Au contraire. Il veut le retrait de son point de pénalité. Le superviseur demeure inflexible, confirme la sanction, et lui demande de reprendre le jeu. Furieux, Big Mac balance un énorme "Fuck" bien audible, entre autres amabilités.
Ken Farrar se retourne, le signale à Armstrong qui annonce un dernier avertissement. Celui de trop. "Default, Mister McEnroe. Game set and match", annonce le juge de chaise. Le public, incrédule, se met à siffler et manifeste son soutien au disqualifié. Lui-même ne comprend pas tout. Il reste un long moment interdit, les mains sur les hanches, comme s'il pensait "Comment osent-ils me faire ça ?" Le tort de l'Américain (outre son attitude globale, s'entend) ? Ne pas avoir intégré le changement de règlement au début de l'année 1990. Désormais, il suffit de trois, et non quatre avertissements, pour être disqualifié. Il expliquera en conférence de presse qu'il ignorait cette nouveauté.
A-t-il payé l'ensemble de son œuvre ce jour-là ? Le plus étonnant n'est pas que John McEnroe ait été disqualifié contre Pernfors, mais que pareille mésaventure ne lui soit pas arrivée plus tôt dans sa carrière. Vingt-cinq ans plus tard, il fera (à moitié) amende honorable dans le New York Times en revisionnant les images : "J'ai poussé le bouchon très loin, j'étais à la limite. Je suppose que, même si je ne pense pas que je méritais d'être disqualifié dans ce match-là, je suis certain qu'il y en a un paquet d'autres où ça aurait dû m'arriver."
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