Open d'Australie | Rublev-Thiem, Raducanu-Gauff, Kyrgios-Rune... Les 10 matches qu'on veut voir en 1re semaine

Si Rafael Nadal espérait monter tranquillement en puissance en première semaine, il risque d'être déçu. Car le tirage au sort ne lui a pas fait de cadeaux et le tenant du titre devra vraisemblablement jouer à un certain niveau, sous peine d'être en danger dès le 1er tour. Face à lui, se dressera ainsi le jeune Britannique Jack Draper, au potentiel certain et dont la progression a été remarquable en 2022 : 265e au début de l'année, il l'a terminée dans le Top 50 (42e).

Certes, affronter pour la première fois de sa carrière le "Taureau de Manacor", qui plus est en Grand Chelem, peut rendre nerveux. Mais Draper a des atouts à faire valoir : son envergure (il mesure 1 mètre 93) lui permet d'être redoutable au service et de prendre de la place au filet. Solide du fond, avec une belle frappe de balle en coup droit, il a aussi l'avantage d'être gaucher, ce qui ne permettra pas à Nadal de l'enfermer sur son revers comme celui-ci en a l'habitude face aux droitiers. L'Espagnol, qui a perdu ses deux matches de préparation en United Cup, est prévenu. Sa prestation sera à surveiller.

C'est l'affiche qui a attiré les regards d'entrée. Entre un ancien vainqueur de Grand Chelem qui tente de revenir à son meilleur niveau et un membre solide du Top 10, il pourrait y avoir des étincelles. Certes, Dominic Thiem, de son propre aveu, a encore du mal à jauger son niveau. Sa défaite sèche dès les qualifications à Adélaïde (face à Soonwoo Kwon) en préparation l'a peut-être refroidi. Mais sa fin de saison 2022 a donné des signes positifs quant à sa capacité à retrouver les sommets.

Physiquement, tout va désormais mieux pour l'Autrichien qui a eu tant de mal à se remettre de sa blessure au poignet. A l'entraînement, il impressionne même et à Kooyong, il a dominé Frances Tiafoe, même s'il ne s'agissait que d'une exhibition. Favori logique de ce match, Andrey Rublev devra donc être sur ses gardes, d'autant que le Russe pourrait être plus en confiance : il a été sorti d'entrée à Adélaïde cette semaine. Une chose est certaine : ça va cogner entre deux joueurs connus pour leur engagement dans chaque frappe.

Andy Murray n'a plus été tête de série dans un tournoi du Grand Chelem depuis Wimbledon 2017. Depuis son retour de sa lourde opération à la hanche, l'Ecossais n'a donc jamais été protégé en Majeur. Bien que de retour dans le Top 50 (il est 49e), il était encore exposé avant cet Open d'Australie et le sort ne l'a pas gâté : il sera condamné à une immense performance d'entrée contre Matteo Berrettini.

La tâche s'annonce d'autant plus difficile pour "Sir Andy" que l'Italien est le dernier adversaire qu'il a croisé à ce jour en Grand Chelem, pour une défaite au 3e tour de l'US Open (6-4, 6-4, 6-7, 6-3). Berrettini reste même sur trois victoires contre Murray au cours des deux dernières saisons. Mais s'il abordera probablement ce match avec un léger ascendant psychologique, il n'a pas non plus de quoi se réjouir car il sait qu'un battant au caractère de champion lui fera face. L'Ecossais aura aussi son sens du jeu à opposer à la puissance de Berrettini, de quoi nous faire saliver.

Nous entrons désormais dans le domaine de la projection. Et si le tableau messieurs attirait l'œil d'entrée, celui de ces dames pourrait bien retenir notre attention au 2e tour. Plutôt épargnée par le tirage au sort, Caroline Garcia, si elle se débarrasse d'entrée de la qualifiée canadienne Katherine Sebov, pourrait toutefois avoir un match difficile à gérer face à sa compatriote Alizé Cornet.

Ce choc 100 % français n'a rien d'une évidence néanmoins, car la Niçoise devra se défaire auparavant d'une autre Canadienne plus connue : la finaliste de l'US Open 2021 Leylah Fernandez qui a toutefois du mal à confirmer depuis. Si Garcia et Cornet venaient à croiser le fer, il sera difficile de laisser les émotions de côté. Favorite sur le papier, la Lyonnaise sait que son aînée courra partout, se battra sur toutes les balles, et ce d'autant plus que Cornet a un quart de finale à défendre à Melbourne. Une opposition de styles intéressante et de la tension en perspective…

Le tennis féminin a de beaux jours devant lui si la jeunesse triomphante entrevue ces dernières années s'installe. L'éventuel 2e tour entre Emma Raducanu (20 ans), qui compte déjà un titre en Grand Chelem (US Open 2021), et Coco Gauff (18 printemps), finaliste à Roland-Garros l'an dernier, s'inscrit dans cette logique et pourrait être le premier duel d'une belle rivalité à venir au sommet du tennis féminin.

La Britannique traverse certes une période plus difficile après un sacre aussi exceptionnel que difficile à assumer à Flushing Meadows. La question est aussi de savoir si elle pourra aborder cet Open d'Australie à 100 % de ses moyens après sa blessure à la cheville à Auckland. Si elle se rassure sur ce plan au 1er tour, Raducanu pourrait incarner un danger car elle retrouverait face à Gauff une position d'outsider susceptible de la libérer. Titrée en Nouvelle-Zélande sans perdre le moindre set et beaucoup plus sure de ses forces, l'Américaine partirait toutefois avec une bonne longueur d'avance.

L'un n'en finit plus de progresser, l'autre rêve d'un dernier grand frisson. Voir potentiellement Félix Auger-Aliassime et Stan Wawrinka croiser le fer au 2e tour de cet Open d'Australie serait une petite bénédiction. Outre le choc de générations qu'il mettrait en scène, un superbe spectacle tennistique pourrait en résulter. Car à 37 ans, le Vaudois croit toujours en sa bonne étoile et ce malgré une blessure au pied qui l'a longtemps tenu éloigné des courts. Désormais rétabli, il a refait chauffer la machine ces dernières mois et retrouve peu à peu un niveau très intéressant.

En témoigne une fin de saison 2022 qui a vu Wawrinka réaliser quelques coups face à Daniil Medvedev à Metz ou Casper Ruud à Bâle notamment. En United Cup, le Suisse a battu Alexander Bublik et a cédé en deux sets serrés contre Hubert Hurkacz. De retour en Australie, terre de ses premiers exploits, il pourrait bien être inspiré. Quant à "F2A", il reste sur un quart de finale épique à Melbourne (avec une balle de match manquée) contre Medvedev et une tournée indoor impressionnante à l'automne dernier. Entre ces deux puissants puncheurs, ce serait un duel alléchant.

A ce stade du tournoi, les matches envisagés relèvent de paris plus ou moins avisés. Et sur le papier, on ne serait pas contre un duel entre Iga Swiatek et Bianca Andreescu au 3e tour, deux autres représentantes de la nouvelle génération, titrées en Grand Chelem pour ne rien gâcher. Si la première - qui devra toutefois se méfier de Jule Niemeier au 1er tour - est évidemment attendue en fin de première semaine, la seconde, beaucoup plus imprévisible et irrégulière aura déjà fort à faire d'entrée contre la Tchèque Marie Bouzkova.

Mais si elle est au rendez-vous, Andreescu a indubitablement le tennis pour poser des problèmes à l'incontestable numéro 1 mondiale. Sa remarquable frappe de balle ainsi que sa capacité à varier à l'échange font de la Canadienne une joueuse redoutable quand les jambes suivent. Lors de leur seul duel précédent sur la terre battue de Rome, pourtant pas sa surface, elle avait d'ailleurs tenu la dragée haute à Swiatek pendant un set. La Polonaise aurait évidemment les cartes en main, mais ce genre d'opposition ne peut que faire du bien au tennis féminin.

Nick Kyrgios remplit les stades. Il le revendique et peut en devenir agaçant à force, mais c'est indéniable : il électrise les foules. Et quand il se produit devant les siens, le spectacle, l'émotion voire la qualité de tennis peuvent en être décuplés. Après avoir passé un vrai cap en Grand Chelem en 2022 - finale à Wimbledon, quart à l'US Open -, il est forcément attendu par toute l'Australie. Mais blessé à la cheville, il n'a joué aucun match officiel en préparation. Sera-t-il en état physique de se lancer dans une nouvelle épopée ? C'est la grande question.

Si la réponse est positive, il pourrait donc défier l'autre phénomène du moment (après Carlos Alcaraz) : Holger Rune. Vainqueur à Bercy (en battant cinq membres du Top 10 et surtout Novak Djokovic en finale), le Danois est un jeune homme pressé aux dents longues. Quart-de-finaliste à Roland-Garros, il a déjà l'ambition d'aller chercher un Majeur. Aussi puissant que doué dans le petit jeu, il sait tout faire techniquement. Il ne manque en outre pas de caractère et semble avoir la tête assez solide pour résister à l'éventuel "Kyrgios circus" à Melbourne. Un conseil : préparez déjà les pop-corns au cas où…

Elle a beau être l'Américaine la mieux classée (numéro 3 mondiale), Jessica Pegula ne fait pas de bruit. Et pourtant, elle a de plus en plus de raisons de croire en ses chances. Redoutable en cadence du fond, elle reste notamment sur une performance impressionnante en United Cup où elle a étouffé Iga Swiatek (6-2, 6-2) en préparation. De quoi en faire une des candidates au titre assurément, mais auparavant, elle pourrait bien croiser sa compatriote Amanda Anisimova.

Cette dernière est le second joyau de la nouvelle génération du tennis féminin US (après Coco Gauff). A ceci près qu'Anisimova, demi-finaliste à 18 ans à Roland-Garros en 2019, n'a pas vraiment progressé ces dernières années. Dotée d'une qualité de frappe phénoménale, surtout en revers, elle végète pour ainsi dire entre la 20e et la 30e places mondiales. Mais elle aime les grandes scènes et a atteint trois fois sur quatre la seconde semaine en Majeur l'an dernier. Si cette affiche se concrétise, Pegula est donc prévenue et les missiles devraient pleuvoir.

Et pour finir, vous prendrez bien un petit derby italien ? Ce potentiel choc de la génération émergente entre Lorenzo Musetti et Jannik Sinner nous fait en tout cas saliver, et ce d'abord en raison de l'opposition de styles annoncée. Au revers à une main et au toucher de balle soyeux du premier, le second oppose une puissance sans forcer des deux côtés et une solidité mentale déjà très affirmée au plus haut niveau.

S'ils venaient à croiser le fer, Sinner partirait avec une claire longueur d'avance. Son expérience et sa régularité en Grand Chelem - il compte déjà quatre quarts de finale dont trois en 2022 - lui donnent plus de garanties, y compris sur le plan physique au meilleur des cinq sets. Cela dit, la dynamique de Musetti est impressionnante : très en verve fin 2022 en indoor, il a gagné ses quatre matches en United Cup et intégré le Top 20 mondial. Musetti - Sinner, c'est un peu le feu contre la glace. Et une belle assurance de spectacle.