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Roland-Garros : Avant de défier Carlos Alcaraz, où en est Denis Shapovalov ?

Cyril Morin

Mis à jour 02/06/2023 à 11:47 GMT+2

Arrivé à Paris sans certitude après une blessure au genou, Denis Shapovalov s'est presque surpris à arriver jusqu'au 3e tour où il défiera ce vendredi Carlos Alcaraz en night session. Une affiche alléchante entre deux joueurs au jeu souvent spectaculaire. Mais là où l'Espagnol a franchi rapidement tous les paliers, le Canadien tarde à confirmer les espoirs placés en lui. Où en est-il ?

Alcaraz et le parcours du combattant : "Attention à Musetti plus qu'à Shapovalov"

Emballant. Excitant. Intrigant. Rafraîchissant. Ce 10 août 2017, le monde du tennis assiste à l'acte de naissance d'un prodige. En cette année où le circuit est retombé sous le joug des tyrans trentenaires Roger Federer et Rafael Nadal, Denis Shapovalov offre une bouffée d'oxygène et un motif d'espoir : la relève est là, prête à prendre sa part. A Montréal, Nadal termine groggy sous les coups de boutoir répétés du gamin canadien de 18 ans. Coup droit supersonique, revers sauté à une main, explosivité au service, attitude de champion : les germes d'un phénomène sont là, tout sera une question de temps.
Cet été-là, Jo-Wilfried Tsonga est aussi emporté par la tempête Shapovalov. A New York, il lui prédit une sacrée évolution. "Il fera partie des très bons dans le futur", pronostique-t-il. Rafael Nadal, lui, va plus loin : "Quand j'avais perdu contre lui, j'avais dit qu'il gagnerait plusieurs titres du Grand Chelem". "Je me souviens très bien de 2017, sourit notre consultant Mats Wilander à l'évocation de cet été précis. A l'époque, j'avais dit qu'il était la combinaison parfaite de Nadal et Federer, ce que je n'aurais jamais dit d'aucun joueur et que je n'ai pas redit depuis, sauf pour Carlos Alcaraz".
Six ans plus tard, pourtant, le palmarès de Shapovalov ne dit rien de toutes ces promesses. Un petit titre, l'ATP 250 de Stockholm en 2019. Cinq finales, dont une en Masters 1000 à Bercy le même automne. Une demi-finale en Grand Chelem, à Wimbledon en 2021. Une entrée furtive dans le Top 10 aussi. Mais c'est à d'autres amplitudes qu'il était attendu. "Les attentes étaient très fortes autour de lui et, jusqu'à présent, il n'y a pas répondu", reconnait notre consultant.
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Denis Shapovalov, après sa victoire sur Rafael Nadal, au Masters 1000 de Montréal.

Crédit: Getty Images

All-in et parfois all-out

Sur le circuit, pourtant, on croit encore à sa bonne étoile. "Denis Shapovalov va gagner des Grands Chelems, estimait encore ainsi Patrick Mouratoglou en 2022. Quand vous le voyez jouer, vous voyez qu'il ne veut que ça". Nadal, encore : "Il reste un des joueurs avec le plus gros potentiel sur le circuit. Je pense toujours que, s'il continue de progresser, il deviendra un multiple vainqueur en Grand Chelem. Il y a beaucoup de choses incroyables dans son jeu et ses résultats commencent à le montrer. Quand il joue bien, libéré, c'est très difficile de le stopper".
La nuance est d'importance : Denis Shapovalov est un joueur all-in. Libéré, effectivement, il peut faire plier à peu près n'importe qui à la force de ses coups de boutoir. Plus tendu, c'est une autre affaire. Parce que le Canadien ne connait pas la marge. Il est à la recherche constante du point parfait, de la trajectoire idéale, du point qui fera se lever les foules. Mais, dans les moments chauds, forcément…
"Il devrait se retenir un peu plus, regrette Wilander. Dans toutes les interviews qu'il donne, il explique que c'est son style de jeu, que c'est un 'shotmaker', qu'il prend des risques. Mais je crois qu'on peut faire les deux : être un ‘shotmaker’ tout en gardant la balle dans le court. Tous les joueurs de tennis à ce niveau sont capables de mettre des points gagnants mais ils font moins d'erreurs. Peut-être que j'aimerais le voir moins viser les lignes, plus faire jouer parfois, instaurer un duel physique parce qu'il est super fort dans ce domaine, aussi."

Maturité tardive

A 24 ans, le 32e mondial a été mis dans le rétro par une nouvelle génération déjà armée sur ce plan-là. Mais, à écouter les spécialistes, son jeu réclame une maturation plus lente. "Je crois que son style demande plus de temps, estimait ainsi Mouratoglou l'an passé. Un peu comme Stefanos Tsitsipas : ces joueurs sont tellement agressifs, puissants et prennent tellement de risques que ça demande du temps. Mais sa marge de progression est encore absolument incroyable".
Face à cette nécessaire évolution, le Canadien avoue encore être un peu perdu. "C'est un peu compliqué pour moi car, en soit, je peux jouer différents styles de tennis, je pourrais jouer différemment, a-t-il reconnu en conférence de presse. En réalité, c'est plus simple pour les joueurs 'uni-dimensionnels' ou qui ont des forces très identifiées. Vous avez un gros service, un gros coup droit, vous vous appuyez dessus. Moi, parfois je retourne bien, parfois je sers bien, parfois le revers est meilleur que le coup droit. Donc, c'est perturbant. Je dois à chaque fois retrouver mon identité et la façon de jouer qui a été la meilleure. Et, pour l'instant, je ne maîtrise pas ça".
Est-il fait pour figurer au sommet du tennis ? Peut-être pas. Mais, sur un tournoi, tout est possible à écouter Wilander : "Je crois que Shapovalov sera un grand joueur un jour. Est-ce que ça sera sur deux semaines, deux mois ou deux ans ? Je ne sais pas. Mais je crois qu'il a tout pour faire un gros résultat en Grand Chelem un jour".
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Denis Shapovalov

Crédit: Getty Images

Ce n'est pas un bon tirage pour Alcaraz
Qu'il se rassure, ce vendredi, c'est justement le rôle du joueur all-in qui ne pose pas de questions qu'il devra camper. Le Canadien, blessé au genou et absent pendant plusieurs semaines avant Roland-Garros, est le premier surpris de s'offrir un tel duel en night session face au numéro un mondial. C'est ce qui rend ce match si réjouissant entre deux des joueurs les plus doués techniquement du circuit.
"C'est presque le match idéal pour lui, estime ainsi Wilander. Si vous jouez Alcaraz ici, vous devez prendre des risques, jouer vite. Sinon, vous serez son jouet. Pour moi, ce n'est pas un bon tirage pour Alcaraz. Je peux vous assurer que Shapovalov est un joueur que personne ne veut jouer parce que vous ne savez jamais ce qu'il va se passer et peut-être que Denis ne le sait pas lui-même". Emballant. Excitant. Intrigant. Rafraichissant. Mais toujours pas gagnant. Jusqu'à quand ?
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