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De Barty à Serena, en passant par les Françaises : ce qu'on a aimé (ou pas) en 2019

Rémi Bourrières

Mis à jour 02/12/2019 à 14:23 GMT+1

WTA - Deux nouvelles gagnantes en Grand Chelem, une n°1 mondiale inattendue, les déboires de Serena, le "happy end" des Françaises… Il s'en est passé des choses, en 2019, sur le circuit WTA. Des choses qu'on a bien aimées, d'autres moins….

Ashleigh Barty

Crédit: Getty Images

Ce qu'on a aimé

  • Le tennis "total" de Barty et Andreescu
Le tennis féminin a suffisamment été fustigé pour son caractère unidimensionnel, monolithique, pour ne pas se réjouir du jeu au contraire très varié pratiqué par les deux grandes révélations de l'année : l'Australienne Ashleigh Barty, 23 ans, victorieuse à Roland-Garros, et la Canadienne Bianca Andreescu, qui a triomphé à l'US Open à 19 ans.
Même si elle est particulièrement efficace au service pour sa "petite" taille d'1,66 m (elle a fini la saison à la 3e place au classement des aces), la n°1 mondiale, gagnante au total de 4 titres en 2019 dont également Miami et le Masters, n'a pas vraiment le choix que de cuisiner ses adversaires pour gagner. Elle le fait à la perfection, servie par un QI tennistique et une "main" hors normes qui lui permettent de maîtriser toutes les subtilités du tennis, notamment le "chip" et l'amortie.
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Quatre petits jeux pour une leçon en mondovision : Barty a puni Vondrousova

Plus puissante, plus athlétique, Bianca, elle aussi victorieuse de 4 titres dont Indian Wells et Toronto en plus de l'US Open, peut compter sur une force de frappe plus dévastatrice, notamment côté coup droit. Mais elle l'utilise également avec beaucoup d'intelligence et de nuances, n'hésitant pas à jouer des angles et des trajectoires. Et elle aussi maîtrise le "chip" de revers. Si elle parvient à solidifier son corps et améliorer sa 2e balle, la Canadienne a toutes les armes pour dominer durablement.
Quoi qu'il en soit, ces deux joueuses ont emmené le tennis féminin vers une dimension nouvelle. Et l'on veut croire que cela présage une heureuse évolution quand on voit d'autres filles, très en vue cette saison aussi, miser également (chacune avec ses atouts) sur la variété, comme Vondrousova, la finaliste de Roland-Garros, Svitolina, Bencic, Bertens, Konta ou encore Martic.
  • La quête obsessionnelle de Serena Williams
A 38 ans et avec un enfant à charge, la légendaire Américaine aux 23 titres du Grand Chelem ne s'en cache plus vraiment : c'est le record absolu de Margaret Court (24 titres majeurs) qui la pousse encore à jouer. Pis, ou mieux : c'en est devenu une obsession.
Il y a quelque chose de beau de voir l'une des plus grandes championnes de tous les temps courir aussi éperdument après un record qui ne rajouterait peut-être pas tant que ça à sa gloire. Quelque part, cela montre, contrairement à la posture désinvolte - voire détachée - qu'elle affiche parfois, sa passion inconditionnelle pour son sport et son histoire. On ne peut courir aussi longtemps après un record par pur narcissisme : le risque de s'exposer à l'échec est trop grand.
Justement, il y a aussi quelque chose d'émouvant de la voir se cogner la tête sur ce cap, victime à la fois d'un physique de plus en plus fragile et indéniablement d'une certaine nervosité. Comme l'an dernier, Serena a donc perdu les finales de Wimbledon et de l'US Open, soit quatre défaites de rang en finales de Grand Chelem, une série noire inédite pour elle qui n'en avait jamais perdu deux d'affilée auparavant. Et ce, face à quatre joueuses différentes (Halep et Andreescu cette année).
Chacun souhaite bien sûr à Serena de toucher un jour à son Graal. Mais en attendant, voir cette "winneuse" née, cette tueuse des courts, montrer un autre visage, plus fragile, plus humain, c'est quelque part rassurant. La preuve aussi que le tennis est encore plus grand que ses plus grands champions, ce qu'on a parfois un peu tendance à oublier aujourd'hui.
  • L'arrivée massive de la jeunesse
Cette saison 2019 a été marquée par le recul – ne parlons pas encore de déclin – d'un certain nombre de valeurs sûres, on pense à des Kerber, Stephens, Muguruza, Wozniacki, Ostapenko ou encore, mais c'est sans doute plus "normal", Azarenka et Venus Williams.
Il y avait donc des places à prendre et la jeune génération a allègrement sauté dessus, avec fougue et talent. Bianca Andreescu en tête de liste, bien sûr, mais n'oublions pas les deux autres grandes révélations de cette saison : les Américaines Cori Gauff et Amanda Anisimova. La première est devenue, à 15 ans et 122 jours, la plus jeune joueuse de l'ère Open à sortir des qualifications de Wimbledon, dont elle a ensuite atteint les huitièmes, avant de décrocher son premier titre à Linz.
La seconde, d'origine russe, a elle aussi décroché son premier titre à Bogota, à 17 ans, avant de faire sensation à Roland-Garros en atteignant les demies. On tient là, sauf accident, deux futurs très grands noms…
Un peu moins jeunes, mais prometteuses aussi, des joueuses comme l'Ukrainienne Dayana Yastremska (19 ans, 2 titres en 2019), l'Américaine Sofia Kenin (21 ans, 3 titres) ou encore la Tchèque Karolina Muchova (23 ans, 1 titre et un quart à Wimbledon) ont également fait une progression remarquée. C'est sympa, cette jeunesse éclatante, surtout que toutes les joueuses citées ont un jeu et un caractère plutôt bien marqués.
  • La victoire française en Fed Cup
Peut-être que cette victoire des Bleues en Australie n'a pas eu un grand retentissement hors de nos frontières. Elle n'en restera pas moins une superbe histoire. D'abord parce que c'était la dernière édition de la Fed Cup "traditionnelle" avant le basculement vers un nouveau format similaire à celui de la Coupe Davis.
Et puis, parce qu'elle aura permis de réconcilier les deux "sœurs ennemies", Kristina Mladenovic – l'héroïne de la finale avec son succès capital sur la n°1 mondiale Ashleigh Barty - et Caroline Garcia – de retour dans l'équipe après deux saisons blanches -, tout autant que de les consoler après une saison bien délicate (voir par ailleurs). Enfin, parce qu'il y a eu ce scénario magnifique, cette victoire au bout du monde qui a évoqué tant de souvenirs...
Un succès qui doit aussi beaucoup à Julien Benneteau, devenu le second capitaine tricolore après Yannick Noah à remporter l'une des deux grandes compétitions internationales dès sa première année de capitanat. Bref, une vraie belle histoire de France comme on les aime, pleine de rebondissements et d'émotion… et avec, cette fois, la victoire au bout !

Ce qu'on n'a pas aimé

  • L'absence, encore et toujours, de rivalité au sommet
On entend souvent que le tennis féminin pâtit de l'absence d'une patronne. Plus exactement, il souffre probablement d'une rivalité forte et durable au sommet, à l'image des Evert-Navratilova ou Graf-Seles d'antan.
Pour la troisième année consécutive, les quatre Grands Chelems ont titré quatre joueuses différentes et donné lieu à des finales aussi diverses qu'imprévisibles. Bien pour les amateurs de suspense, moins pour la fidélisation du public, qui n'a pas vraiment le temps de s'attacher à une joueuse en particulier.
Les raisons, on les connaît : une inconstance chronique chez la majorité des actrices principales, à l'image notamment cette année de Naomi Osaka. On pensait la Japonaise partie pour occuper durablement le haut de l'affiche après avoir enchaîné à l'Open d'Australie un deuxième titre majeur consécutif, dans la foulée de l'US Open 2018. Mais elle a peu perdu son allant après s'être séparée de son coach Sascha Bajin. Même Simona Halep, dont le jeu est pourtant basé sur la régularité, a nettement chuté après son formidable titre à Wimbledon, tandis que Bianca Andreescu a été blessée une bonne partie de l'année, et que Petra Kvitova reste fragile.
Inversement, Karolina Pliskova a connu une certaine régularité qui lui vaut d'achever l'année à la 2e place, sans avoir encore atteint les sommets qu'on lui a longtemps promis, à l'instar d'une Madison Keys.
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Epoustouflante en cadence, Bencic a multiplié les coups d'éclat pour sortir Osaka

  • L'absence de matchs référence
Petit test : quels sont, de tête, les matches féminins qui vous ont vraiment marqué cette année ? Pas évident, n'est-ce pas… En Grand Chelem, allez, on se souvient de deux duels pleins de dramaturgie à l'Open d'Australie, le quart de finale entre Serena Williams et Karolina Pliskova, puis la finale entre Naomi Osaka et Petra Kvitova. Mais sinon…
La WTA a semble-t-il un peu "ramé" aussi pour boucler son top 5 des plus beaux matchs de l'année (sur le Tour uniquement, donc hors Grand Chelem et Fed Cup). Aucun grand rendez-vous ne figure dans son classement. La palme revient finalement à un duel Osaka-Andreescu à Pékin qui était certes très intense, mais ça n'était qu'un quart de finale. Derrière, on retrouve un 8e Sabalenka-Wozniacki à Eastbourne (on n'a pas trop compris…), le quart de finale Bencic-Osaka à Madrid, un autre quart Barty-Kvitova à Miami et un match de round-robin au Masters entre Halep et Andreescu. Bien, mais pas non plus des "must" absolus.
En étendant cette liste à la Fed Cup, il nous semble que la victoire de Mladenovic sur Barty en finale, ou la défaite très serrée de Garcia sur Halep, contre la Roumanie, ne dépareillent pas. Mais c'est peut-être notre côté franco-français… Il nous semble surtout que les saisons précédentes avaient été plus riches en la matière.
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Festival de coups gagnants et duel haletant : ce Osaka-Pliskova était un régal

  • La saison des Françaises
On l'a dit, la victoire en Fed Cup a été magnifique mais, au-delà de la belle histoire générée, il faut aussi relativiser - sans pour autant la négliger - la valeur sportive de la compétition. Dans une interview qu'elle nous avait accordée avant la finale, Caroline Garcia le reconnaissait d'ailleurs sans fard : "si on gagne la Fed Cup, ce sera magnifique mais ça ne suffira pas à sauver ma saison."
La Lyonnaise qui achève cette saison à la 46e place mondiale après avoir été 4e un an plus tôt, aucune Française dans le top 30 (la n°1, Kristina Mladenovic, est 38e), aucune Française non plus en deuxième semaine d'un Grand Chelem… Soyons honnête, l'on s'attendait à beaucoup mieux, surtout de la part de ce duo.
Un rayon de soleil est toutefois venu de la belle progression de Fiona Ferro, désormais très solidement installée dans le top 100 (61e) après avoir remporté son premier titre cet été à Lausanne face à… Alizé Cornet, toujours bien présente elle aussi.
  • L'agencement du calendrier
On est un peu dubitatif sur l'évolution actuelle du circuit WTA, dont l'épicentre semble basculer progressivement vers l'Asie, qui concentre désormais près d'un quart des tournois du calendrier. Avec un agencement particulier : on y ouvre et on y ferme la saison à Shenzen, en Chine, pour un International chichement doté et pour le Masters. Un Masters désormais organisé la même semaine que le Bercy, avec pour conséquence un manque à gagner assez désastreux en termes d'exposition médiatique. Surtout pour une épreuve marquée par un prize-money historique, avec 4,42 millions de dollars remportés par la gagnante, Ashleigh Barty.
Bien sûr, on comprend que le circuit puisse être attiré par les endroits où les sponsors sont les plus généreux, à défaut d'y trouver les stades les plus remplis. Attention tout de même à ne pas tout céder au chant des sirènes et ne pas rompre pour de bon l'équilibre "géopolitique" du circuit, sous peine d'y perdre définitivement son âme…
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