Le Top 30 des Mondiaux: Bolt plus fort que Bolt

Ce moment-là, ou plutôt ces deux moments-là, tout le monde s'en souvient, même les plus jeunes d'entre nous. Ils appartiennent à la fois à l'Histoire et au présent, parce que leur auteur n'a pas encore fini d'écrire sa propre histoire. Mais, jusqu'à preuve du contraire, ils constituent toujours un sommet pour le dit auteur. Usain Bolt, puisqu'il s'agit de lui, ira peut-être encore plus vite, encore plus loin, encore plus haut. En attendant, dans sa prodigieuse carrière, le Jamaïcain reste attaché aux Mondiaux de Berlin en 2009. Comme à Pékin l'année précédente, il y bat successivement les records du monde du 100m et du 200m.

Mais si Berlin reste si extraordinaire, c'est précisément parce qu'il y eut Pékin un an plus tôt. Bolt plus fort que Bolt, repoussant ses propres limites, voilà le "pitch" de ce deuxième opus de la saga Bolt. Depuis, malgré de nouveaux titres, il n'a plus touché à ses records. Le temps passant, il n'est pas impossible que ces deux nuits magiques berlinoises se figent durablement sur les tablettes. Elles demeurent en tout cas une référence depuis quatre ans. Sur le tartan bleu de la capitale allemande, le champion olympique en titre commence d'abord par ringardiser son 100m pékinois.

Ses 9"89 en demi-finales, malgré un état de contrôle évident, augurait de l'explosion finale. Cette finale, Bolt la gagne, évidemment. Mais surtout, Bolt va beaucoup plus vite que Bolt un an plus tôt. En Chine, il avait abattu le mur des 9"70 (9"69). Cette fois, il brise celui des 9"60 en s'imposant en 9"58. Bolt devient le premier homme à battre trois fois le record du monde du 100m. Il améliore sa propre marque de 11 centièmes, soit la plus forte amélioration d'un record du 100 depuis l'apparition du chronométrage électronique quatre décennies plus tôt. Il n'y a plus de mots, plus de superlatifs assez forts pour qualifier les performances du Jamaïcain.

Et pourtant… Quatre jours plus tard, le 20 août 2009, il va sortir une course peut-être plus extraordinaire encore en finale du 200 mètres. Son virage, notamment, reste probablement un des plus grands moments de l'histoire de l'athlétisme. L'impression visuelle est fabuleuse. Jamais on n'a vu un sprinter sortir avec une telle marge. Le chrono le confirme: Bolt est flashé en 8"84 sur 100 mètres entre les 50 et les 150 mètres. Du jamais vu. Quand il coupe la ligne, le record du monde est une évidence: 19"19.

Là encore, une amélioration de 11 centièmes par rapport à son précédent temps de référence. Comme sur 100m. Ce doublé-là, il faudra du temps pour le revoir. Usain Bolt a banalisé l'exceptionnel en l'espace de quatre jours et deux courses. Ces deux courses berlinoises, plus encore que son doublé de Pékin, ont contribué à lui conférer ce statut de légende dont il s'affuble lui-même. En revoyant ce 100m et ce 200m, encore et encore, il n'est pas évident de lui contester cette légitimité.