Gilbert, favori malgré lui

C'est la rançon du succès. La rançon des 18 succès. Ceux acquis tout au long de cette incroyable année 2011, qui a fait de Philippe Gilbert l'incontestable numéro un du cyclisme mondial. Gilbert gagne si souvent, et de façon si impressionnante, qu'il semble contraint d'endosser le statut de favori à chaque course. Quitte à ne pas tenir pleinement compte du contexte. A Copenhague, son nom revient souvent à l'heure d'évoquer les principaux prétendants au maillot arc-en-ciel. Pourtant, le parcours est loin de lui convenir.

Il y a quelques mois, chacun s'accordait pourtant à voir un sprinter triompher au Danemark. Les as de la vitesse ont toujours la cote, mais beaucoup estiment aujourd'hui que Gilbert a les moyens de leur damer le pion dans le final. Le dernier kilomètre offre il est vrai une jolie petite bosse, avec notamment un passage d'environ 200 mètres à 10%. C'est peu pour lâcher tous les sprinters, mais le Belge est si fort que tout le monde le redoute. Peu importe les circonstances, l'opposition et le parcours. Parce qu'il a remporté pratiquement toutes les courses d'un jour auxquelles il a pris part cette année, Gilbert devient automatiquement, presque malgré lui, l'homme à battre.

En débarquant à Copenhague jeudi, le Liégeois a refusé d'être considéré comme la plaque tournante de la course. "Non, je ne suis pas le grand favori, a-t-il assuré. Je suis un des favoris, mais il y en a d’autres, Sagan, Cavendish, Bennati, Greipel, Kittel. Et j’en oublie beaucoup." En 2010, à Melbourne, il était déjà particulièrement surveillé. Ce sera pire dimanche, et les occasions de sortir seront moindres. Dans ces conditions, il sera difficile pour lui de réussir à imposer son éventuelle supériorité. Fin avril, lorsqu'il a découvert le parcours de Rudersdal, Gilbert en est d'ailleurs reparti avec la conviction que ce n'était pas pour lui.

Plus qu'un favori, il serait donc plus juste de considérer Philippe Gilbert comme un joker. Dans cette course promise aux sprinters, il est le facteur X. Le seul, peut-être, à pouvoir contrecarrer leurs ambitions légitimes. Si un puncheur est capable de faire la différence, c'est Gilbert et probablement seulement lui. Mais il ne pourra sans doute frapper qu'une seule fois, au dernier moment. Sa marge de manoeuvre apparait plus faible que jamais. L'équipe belge devra certainement utiliser d'autres cartouches au préalable. "Ce serait stupide de me considérer comme le leader unique de l'équipe au Championnat du monde", a ainsi prévenu le champion de Belgique.

En attendant, peu importe le tracé, Gilbert s'est imposé une préparation minutieuse et studieuse, sur les hauteurs de Monaco. Mentalement, après une période délicate à gérer fin août pour finaliser son transfert chez BMC, il a retrouvé une certaine fraicheur. Il n'en sera que plus dangereux, même si le grand objectif de sa fin de saison reste le Tour de Lombardie, une course taillée pour lui, beaucoup plus que le Mondial danois. "Je suis double tenant du titre là-bas et je me dois de faire honneur à ce statut", explique-t-il. Reste à savoir s'il se rendra en Italie avec son maillot tricolore de champion de Belgique, où s'il aura davantage de couleurs sur le dos...

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