Lukaku, le joyau

Le football est une tradition qui se transmet de père en fils dans la famille Lukaku. Sous les couleurs du Germinal Ekeren notamment, Roger avait tracé la voie dans les années 90. Le fiston, Romelu, a su suivre le chemin. Mais le sien est pavé d'or. Face à Lokeren, le nouvel international belge a marqué pour la 15e fois de la saison lors de la démonstration d'Anderlecht (0-4). Une réalisation qui lui a permis de sceller définitivement sa première place au classement des buteurs de la Jupiler Pro League au terme de la saison régulière. A 16 ans, 10 mois et 8 jours, Lukaku a fait tomber un record qui datait de près d'un siècle, celui détenu par Maurice Bunyan (17 ans et 7 mois, en 1912), pour devenir le plus jeune joueur à avoir été sacré meilleur buteur de l'histoire du championnat belge.

Ceux qui ne connaissaient pas le phénomène ont découvert un adolescent au gabarit incroyable (1,90m, 94 kg) pour son âge. Mais c'est sur le terrain qu'il impressionne le plus. Extrêmement prolifique en équipes de jeunes (130 buts en 68 matches au SK Lierse, 121 en 87 matches à Anderlecht), le joyau d'Anderlecht est un attaquant déjà très complet. Puissant, il est aussi très rapide et doué techniquement, ce qui lui donne un style qui n'est pas sans rappeler celui de Didier Drogba. Mais sa marge de progression reste importante. Compte tenu de son morphologie, il peut être encore plus redoutable de la tête et faire de meilleurs choix dans le jeu. Déjà au sommet de la Jupiler Pro League, Lukaku est capable d'aller encore bien plus haut et tous les plus grands clubs l'ont déjà compris depuis longtemps. L'an passé, Chelsea avait déjà tenté d'arracher la pépite d'Anderlecht. D'autres ténors ont rejoint les Blues sur les rangs. Manchester United, Manchester City, Arsenal, Tottenham, le Bayern Munich, Hambourg, le PSV et Bordeaux avaient ainsi envoyé des émissaires pour l'observer lors du seizième de finale retour de la Ligue Europa, où il avait lancé son équipe sur la voie d'un large succès en ouvrant la marque (4-0). Ceux du Milan AC, de Barcelone et du Real Madrid n'étaient pas là, mais ils n'en suivent pas moins l'évolution du prodige avec attention.

Lukaku ne quittera vraisemblablement pas Anderlecht à la fin de la saison pour autant. Sous contrat jusqu'en juin 2012, il devrait rester une année supplémentaire en Jupiler Pro League avant de s'envoler vers un plus grand championnat. Et le club bruxellois prend bien soin de ne pas trop exposer son joyau aux feux des projecteurs. "Les règles sont claires. Conjointement avec sa famille, on a décidé de ne pas donner d'interviews individuelles", reconnait David Steegen, le responsable de la communication du club bruxellois. "Il a 16 ans et il est encore un peu enfant. On veut qu'il se concentre sur ses études et sur l'aspect sportif. La deuxième raison, c'est que si on lui laisse accepter des interviews, il ne fait plus que cela. Le joueur est également conscient des risques", souligne-t-il.

"On essaye de le protéger", renchérit Roger, son papa, dans le Vif/L'Express. "Cela ne veut pas dire qu'on le coupe de tout. On lit les journaux ou le télétexte et on le met devant le fait accompli. Quand on parle de lui dans les journaux, on en rigole ou on en parle sérieusement mais on ne le lui cache pas. Sinon, le jour où les barrières vont tomber, il va être perturbé, explique-t-il. Protégé, le jeune attaquant d'origine congolaise peut aussi se réjouir de pouvoir compter sur l'expérience de son père dans le milieu du football. Un atout non négligeable. Car si le chemin sur lequel Lukaku s'est engagé est pavé d'or, il n'en reste pas moins semé d'embuches. Le cas de Nii Lamptey, prodige d'Anderlecht dans les années 90 tombé dans l'oubli, est là pour le rappeler.