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Au Bayern, Guardiola a une main de fer, mais l'institution lui résiste encore

David Lortholary

Mis à jour 27/07/2015 à 17:22 GMT+2

BUNDESLIGA - Le départ de la légende Schweinsteiger est un indice supplémentaire de la prise de pouvoir de plus en plus ferme de Josep Guardiola sur le Bayern. Il en faudrait davantage, cependant, pour mettre en danger l'âme du club bavarois.

Pep Guardiola, l'entraîneur du Bayern Munich, le 19 juillet 2015, à Shanghai.

Crédit: AFP

L'émoi est profond. L'incompréhension, même, chez certains comme Ottmar Hitzfeld. Rarement transfert n'aura suscité telle réaction en Allemagne, tant dans la presse que chez les amateurs de football. Bastian Schweinsteiger, dix-sept ans de Bayern Munich, s'est envolé vers Manchester United. Après le "boss" Uli Hoeness, au club depuis 1970 et contraint de quitter la présidence en raison de ses soucis fiscaux, après l'icône Müller-Wohlfahrt, l'emblématique docteur parti du club la saison dernière après 38 ans de loyaux services, c'est le "dieu du football" munichois qui quitte la Bavière cet été. Le Bayern perd ses tauliers les uns après les autres. De là à considérer qu'il perdrait son identité sous les coups de boutoir de son entraîneur Josep Guardiola, il y a un pas.
Ce reproche embrase les forums et autres réseaux sociaux. Guardiola, c'est un fait, n'était pas chaud pour prolonger un contrat qui courait jusqu'en 2016 et vient ainsi de laisser partir une légende locale, octuple champion d'Allemagne, vice-capitaine, âme du vestiaire, l'homme qui s'est saigné – au sens propre – pour offrir à son pays un quatrième titre de champion du monde il y a un an. Du coup, le technicien catalan s'est mis lui-même un surcroît de pression : trouver une nouvelle hiérarchie parmi ses joueurs et gagner sans Schweini. Gagner sans délai. Pour le premier match de l'ère post-Schweinsteiger, le Bayern s'est incliné à Gladbach, en amical, contre Augsbourg (1-2). Anecdotique, sans doute ; symbolique, surtout.

Dante : "Il manque quelque chose"

Le samedi 11 juillet, jour de la présentation de l'équipe 2015-2016 à l'Allianz-Arena, l'ambiance était pesante lorsque les joueurs se sont rassemblés dans le vestiaire. C'est par médias interposés que ceux-ci avaient appris le départ de leur vice-capitaine. "Ne plus avoir Bastian à nos côtés dans le vestiaire est un sentiment curieux, a lâché Dante de but en blanc. Il manque quelque chose." Schweini organisait les soirées entre joueurs. C'est lui qui prenait les problèmes à bras le corps. "A Thomas Müller et Jérôme Boateng d'endosser le rôle", a immédiatement réagi le directeur sportif Matthias Sammer. Sans oublier Philipp Lahm et Manuel Neuer, les autres leaders.
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Bastian Schweinsteiger et Pep Guardiola, lors de la saison 2014-2015.

Crédit: AFP

Telle qu'elle évolue actuellement, y compris dans les transferts en cours, l'équipe répond aux souhaits de Guardiola, bien que ses dirigeants affirment garder le dernier mot. Le profil de joueur fiable mais lent de Schweini n'entrait guère dans les plans du Catalan. Ce dernier, au moins, s'épargne des débats sans fin qui n'auraient pas manqué de survenir s'il avait régulièrement envoyé l'idole des supporters sur le banc. Mais le risque est important à plusieurs niveaux. Une fracture avec le public est-elle possible ? Le discours de Rummenigge à propos du départ de Schweini, à l'Allianz-Arena, a été accueilli par des sifflets. L'entrée de Guardiola aussi. L'ancien Barcelonais peut désormais confier les clefs du jeu à ses compatriotes Xabi Alonso et Thiago, mais aussi, pourquoi pas, à la recrue allemande Joshua Kimmich, sur laquelle il compte beaucoup.

Opération séduction

"Pep" a étendu son emprise, au-delà du rectangle vert, aux secteurs du médical et de la performance, au cœur desquels il a initié des réformes structurelles. Au sein même du club, des voix s'élèvent - parmi lesquelles, dit-on, Uli Hoeness, revenu s'occuper des jeunes - pour mettre en garde contre un pouvoir trop envahissant confié à un seul homme. Et ce même si l'avenir du Catalan au-delà de 2016 n'est pas encore fixé. Guardiola se retrouve, de fait, face à un défi schizophrène : gagner tout de suite pour ne pas prêter le flanc à une critique trop large en début de saison, et gagner à la fin pour réussir ce fameux triplé C1-Coupe-championnat, qui est sa mission.
Il s'est, du coup, lancé dans une opération séduction consistant à s'ouvrir davantage à ses cadres. A venir leur serrer chaleureusement la main tous les matins. A blaguer et rire un peu plus. Et qui sait si le départ de Schweinsteiger n'est pas l'occasion, pour ceux qui restent, de prendre leurs aises ? Dans l'effectif, le profil le plus proche de celui du célèbre n°31 est Sebastian Rode. Mario Götze, la saison dernière, était à l'étroit sur le côté gauche. David Alaba, lui aussi, pourrait en profiter pour étendre encore ses immenses facultés. Pierre-Emile Höjbjerg est revenu plus fort de son année de prêt à Augsbourg. Gianluca Gaudino, du haut de ses 18 ans, aura bien du mal à glaner du temps de jeu. D'autant que la recrue Arturo Vidal, elle, ne devrait pas être sujet de discorde entre l'entraîneur et ses dirigeants, puisque le Chilien était convoité par le Bayern depuis 2011 et son départ de Leverkusen.
Conformément à ses principes de jeu, Guardiola empile les milieux de terrain. Il jouit, autour de lui, de relais hispaniques en nombre, sur le terrain et en dehors. Il n'en continue pas moins à préserver les équilibres culturels. Et donc, tant bien que mal, à se fondre dans la tradition. Diriger le Bayern est à ce prix.
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