Bundesliga : Tuchel ne s'inscrit pas dans la lignée de Klopp, mais dans celle de Guardiola

Ces deux-là, sur le plan footballistique, n'ont pratiquement rien en commun. Rarement l'expression "diamétralement opposés" n'aura été plus pertinente que pour comparer l'ancien (Jürgen Klopp) et l'actuel (Thomas Tuchel) entraîneur du Borussia Dortmund. La différence de méthode, de conception et de système des deux hommes est flagrante. Le déplacement de pré-saison de six jours en Asie (Japon, Malaisie et Singapour) a confirmé à quel point le style Tuchel, à mille lieux du l'ébouriffé "Kloppo", se rapprochait de celui d'un certain... Josep Guardiola.

Les succès récents du BVB étaient fondés, en particulier en Ligue des champions, sur un jeu de pressing et de contre saignant. Tuchel, lui, s'est appuyé lors des matches de préparation sur une forte possession de balle. Comme le Bayern. Sur une circulation rapide et précise. Comme le Bayern. Avec tous les joueurs en mouvement en permanence. Comme le Bayern. Avec des orientations tactiques variables. Comme le Bayern. "Le système n'est pas si important, estime-t-il. Nous voulons évoluer ensemble, comme un orchestre. Cela ne mène à rien si chacun joue sa petite musique personnelle." Des propos que ne renierait pas Guardiola, qui a du reste déjà qualifié son confrère de "grand entraîneur".

Comme Guardiola, l'ancien coach de Mayence gesticule abondamment en bord de touche. Hèle ses joueurs, les encourage et leur prodigue moult conseils, leur indiquant dans le détail ce qu'il attend d'eux. Pendant son année sabbatique, Tuchel (41 ans) a pris soin d'observer le technicien catalan. Il l'a même rencontré autour d'un repas, en décembre 2014 à Munich, pour évoquer les années Barça et échanger sur les aspects tactiques. Dès 2009, lorsqu'il avait été propulsé des moins de 19 ans à l'équipe première de Mayence, le Souabe faisait référence, avec déférence, au pressing pratiqué par le FC Barcelone. "Il y a tout à apprendre de cette équipe", avait-il alors soufflé.

Apprendre, analyser, y compris pendant un match, tel est le propre des entraîneurs "scientifiques", comme Guardiola, Tuchel ou Rangnick – qui avait fait des étincelles avec Hoffenheim à l'automne 2008 et renaît ces temps-ci avec Leipzig. "Thomas a un énorme talent d'entraîneur, a déclaré le dernier cité au quotidien Die Welt. Il a un fort quotient intellectuel, est très ambitieux, passe bien avec les joueurs et avec les médias, est éloquent..." La biographie de Guardiola commence par sa rencontre avec le champion d'échecs Garry Kasparov. Tuchel, au cours de son année de pause, est allé rencontrer un mathématicien de renom à Londres. Flagrant parallèle, y compris dans l'année sabbatique elle-même. À l'écart des médias, dans une logique un peu secrète, voire mystique. Pour Tuchel, Guardiola est un modèle, presque un idéal.

Excellent théoricien, travailleur assidu comme le Catalan, le nouveau boss du BVB est constamment à la recherche de nouveaux horizons. Et, bien sûr, du réglage qui puisse améliorer le rendement de son équipe. Au cours de la tournée asiatique, il a ainsi testé Marco Reus en "faux 9", comme Guardiola l'avait fait avec Mario Götze ou Thomas Müller. Le jeu sans avant-centre rappellera forcément quelque chose aux familiers du Barça. Le football de Klopp, peu économe en énergie et donc favorable aux blessures – principal traumatisme du Borussia 2014-2015 – n'est pas pour Tuchel, qui a en outre constaté à quel point de nombreux adversaires s'y étaient adapté. "Avec cet entraîneur, les séances sont si compliquées qu'il faut le bac pour suivre", a lâché un jour l'ex-Mayençais Eugen Polanski. Une citation que pourrait s’approprier Franck Ribéry à propos de Guardiola...