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Villarreal-Real Madrid : Perbet, ce goleador que la France ignore

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 14/09/2013 à 13:10 GMT+2

Méconnu en France, Jérémy Perbet a explosé en Belgique avant de faire les beaux jours de Villarreal, qui reçoit le Real Madrid samedi (22h00). A 28 ans, le buteur français issu du monde amateur va connaître le point culminant d'une carrière atypique.

FOOTBALL - 2013/2014 - Villarreal - Perbet

Crédit: AFP

Jérémy Perbet ne s'attendait pas à ça. En rejoignant Villarreal, alors 10e de Liga Adelante, dans les derniers jours du mercato hivernal, l'attaquant français n'imaginait probablement pas se retrouver en face de Cristiano Ronaldo, Karim Benzema, Gareth Bale ou Luka Modric un peu plus de sept mois plus tard. Ce sera pourtant bel et bien le cas. Fort d'un excellent début de saison pour son retour au sein de l'élite, Villarreal va s'offrir un véritable match de gala samedi soir au Madrigal face au Real Madrid (22h00). Comme son prestigieux adversaire, le sous-marin jaune a signé le départ idéal en Liga avec trois victoires en trois matches pour s'installer sur le podium, et même devancer le club merengue à la différence de buts. Le club de la banlieue de Valence a effectué un retour tonitruant au premier plan. Et il le doit en partie à son goleador tricolore.
Perbet est un buteur-né. L'Auvergnat reconnaît volontiers qu'il n'est pas l'attaquant le plus rapide. Il n'a pas non plus un gabarit des plus imposants (1,84 m). Mais son instinct pour le but en fait un atout redoutable dans une équipe. Il a commencé à le développer à Polignac, charmante petite commune de Haute-Loire où ce fils de footballeur amateur a commencé à taper la balle à l'âge de 5 ans. Le virus du football, il l'a attrapé en allant voir jouer son père tous les dimanches. Cela l'a poussé à s'inscrire dans le club de son petit village, avec ses copains. "On était une bande de potes, on jouait tout le temps", se souvient le joueur âgé de 28 ans aujourd'hui. Il plantait déjà pas mal de buts à l'époque. Suffisamment pour attirer l'attention du grand club voisin, Le Puy-en-Velay. Mais aussi celle du CREPS de Vichy, où il aurait bien aimé faire sa formation. "Mes parents ont dit non, ils ont privilégié l'aspect scolaire", explique-t-il sans tant de regrets que ça.
Recruté pour jouer en CFA2, il perce en Ligue 2
Cela aurait ôté le côté authentique de son parcours. Et rejoindre Le Puy-en-Velay n'était pas non plus une mauvaise option pour Perbet. Cela lui permettait notamment de rester à proximité de sa famille et de ses amis. Mais aussi de se faire connaître. Clermont a commencé à suivre avec attention ce jeune buteur. Et quand il s'est mis à briller avec les 18 ans Nationaux, inscrivant une quinzaine de buts en seulement 8-9 matches, le club auvergnat a décidé de le recruter pour son équipe de CFA2. Mais du haut de ses 18 ans, Perbet avait déjà un niveau supérieur. Clermont a lui a donné sa chance au sein de l'équipe première, en Ligue 2, et lui a fait signer un contrat de deux ans. Dès sa première saison au club, il a disputé 26 matches dans l'antichambre de l'élite et inscrit quatre buts. "C'était exceptionnel, raconte-t-il. J'ai été surpris de m'adapter aussi vite, car ça me paraissait quand même un peu grand. Je me suis aussi rendu compte que c'était ma chance."
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FOOTBALL - 2003/2004 - Clermont - Perbet

Crédit: Panoramic

C'était la découverte du monde professionnel pour ce joueur sorti tout droit du milieu amateur. Un univers auquel il n'était pas préparé. Passer de deux entraînements par semaine à deux entraînements par jour demande une préparation physique et une hygiène de vie à laquelle il a dû s'adapter. Il lui a aussi fallu prendre conscience des réalités du métier. "Pour moi le foot, c'était jouer avec les potes. En professionnel, c'est chacun pour soi. Ce ne sont pas les valeurs que je défends, mais j'ai dû me rendre à l'évidence", reconnaît-il.  En deux saisons, Perbet a disputé une soixantaine de matches avec Clermont. Puis un nouveau coach est arrivé, avec ses propres joueurs. Le jeune attaquant a dû faire ses valises pour Moulins, en National, sous forme de prêt. "Le club venait d'être repêché et n'avait pas le droit de recruter. Les joueurs travaillaient en majorité, et les entraînements n'étaient qu'à 19h00. Les journées étaient longues. C'est un pari que je ne retenterais plus", affirme-t-il. Cela ne l'a pas empêché de terminer meilleur buteur du championnat avec 23 buts.
La Belgique en terre d'accueil
Malgré son éclosion en National, Clermont n'a pas renouvelé le contrat de Perbet. C'est Strasbourg, tout juste relégué de Ligue 1, qui lui a offert l'opportunité de poursuivre sa progression. "Le frère du président était venu me voir jouer une vingtaine de fois, se rappelle-t-il. J'ai senti un projet. A 21 ans, je me suis dit que c'était une aubaine. Et puis c'était Jean-Pierre Papin le coach. Je suis fan de l'OM et j'avais toutes ses cassettes." Mais l'expérience a tourné court. "Comme on venait de descendre, il y avait 35 joueurs sous contrat, explique-t-il. J'ai joué les 7-8 premiers matches, après j'ai eu un trou physiquement. On avait eu une préparation à l'italienne avec Papin. Et puis la L2 est un championnat très fermé, comme le foot français en général. Ce n'est pas mon style de jeu. Quand c'est devenu un peu difficile, j'ai décroché mentalement. Strasbourg, c'est l'expérience qui me donne le plus de regrets." Mais aussi celle qui lui a ouvert les portes de la Belgique. Six mois après son arrivée en Alsace, Perbet a été prêté à Charleroi. Il a contribué à la quatrième place de son équipe en inscrivant six buts en treize matches.
Le club belge voulait le garder. Mais Perbet, lui, souhaitait enfin s'imposer en France. Toujours sous contrat avec Strasbourg, remonté en L1, il a rejoint Angers sous forme de prêt, en Ligue 2, à l'été 2007. Une nouvelle expérience délicate. Une première grosse blessure à un genou ne lui autorise qu’onze matches au cours d'une saison quasiment blanche, où il reste muet. Et le fait de ne pas avoir sa famille à ses côtés lui pèse. C'est encore la Belgique qui lui a offert une porte de sortie dans laquelle il a su s'engouffrer. A l'AFC Tubize, Perbet a retrouvé l'ambiance d'un club familial. Et un entraîneur français, Albert Cartier, qui a su le remettre sur les bons rails. Après avoir inscrit 35 buts en un an et demi, il a convaincu les dirigeants de Lokeren de le recruter. Mais une nouvelle blessure, à l'autre genou, est venue couper sa progression. Alors âgé de 25 ans, l'Auvergnat a dû se contenter de huit petites apparitions en une saison et demie. En échec, il a fait ce pari qu'il s'était promis de ne plus retenter : redescendre d'un cran, en D2 belge, à Mons. Ce n'est jamais facile de passer à l'échelon inférieur pour un footballeur. Mais le parcours de Perbet montre que ça peut avoir du bon.
Après Mons, il conduit Villarreal à la montée
Mons, c'est le club où il a explosé. Il y est arrivé le couteau entre les dents. "En redescendant en D2, j'étais piqué dans mon orgueil, reconnaît-il. Je me disais que c'était l'année ou jamais." En l'espace d'une demi-saison, il a inscrit quatorze buts en autant de matches pour devenir le principal artisan de la remontée du club au sein de l'élite. Le promu a pris une très bonne septième place en D1 belge la saison suivante. Sous l'influence, toujours plus forte, de son buteur français. Avec 25 buts en 29 matches, Perbet a décroché à la fois le titre de meilleur buteur et de meilleur joueur du championnat belge. Au passage, il a fait tomber le record de Jean-Pierre Papin, son ancien coach à Strasbourg, jusqu'alors meilleur buteur tricolore en Belgique avec 20 buts pour le FC Bruges en 1985-86, avant de disputer la Coupe du monde au Mexique et de signer à Marseille dans la foulée. Mais la Belgique n'avait plus le même attrait pour les recruteurs français 25 ans plus tard, même si Laurent Blanc, alors sélectionneur des Bleus, avait mentionné son nom comme surprise possible pour sa liste à l'Euro 2012. Sans suite. "Après ce titre de meilleur joueur, j'ai reçu des offres des quatre grands clubs belges, de Parme, du Chievo… mais aucune offre d'un club français", déplore-t-il.
Aucun de ces clubs intéressés n'a cependant mis les 3,5 millions d'euros exigés par le président de Mons. Et Perbet a dû se résoudre à rester, malgré sa volonté de partir pour un plus grand club. "Cette frustration, je la ressentais aussi sur le terrain, se souvient-il. Je me suis retrouvé sur le banc les six premiers matches. Et puis je me suis remis au travail." A marquer aussi. Une douzaine de buts qui maintiennent l'intérêt des recruteurs à son égard. "En janvier dernier, pas mal de clubs me voulaient en prêt, explique-t-il. Le président voulait me vendre. Quand Villarreal est venu à la fin du mercato, je n'y croyais pas trop. J'ai été surpris quand on m'a dit que ça se faisait. Mon agent m'avait dit que le club jouait la montée. Je suis allé voir le classement, et j'ai vu qu'il n'était que 10e de Liga Adelante, à 12 points de la 2e place et d'une montée automatique en Liga…" Mais comme à Mons, Perbet a fait des miracles. Il a marqué onze buts en 18 matches, soit le meilleur ratio en Liga Adelante, et délivré quatre passes décisives en cinq mois. Et Villarreal a arraché son billet pour l'élite.
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FOOTBALL - 2011/2012 - Mons - Perbet

Crédit: Imago

L’artilleur du sous-marin jaune
En fait, le sous-marin jaune n'a toujours pas perdu en championnat depuis que son buteur français y a posé ses valises. Son adaptation n'a pourtant pas été si facile. "La D2 espagnole, c'est aussi fort voire plus fort que le championnat belge, affirme-t-il. On a fait un énorme travail physique, et j'ai eu un peu de mal au début. Je joue aussi davantage pour l'équipe que je ne le faisais à Mons, où on me demandait de rester devant le but. J'ai dû m'adapter, et je manque parfois un peu de lucidité avec tous ces efforts. Mais il y a une super mentalité, beaucoup de bons techniciens. Ils avaient besoin d'un tueur." Dans la foulée de la montée, Villarreal a réussi un début de saison tonitruant en Liga. Perbet y a apporté sa contribution, inscrivant au passage son premier but dans le championnat espagnol en ouvrant le score à Osasuna (0-3), juste avant la trêve internationale. Pour autant, sa place de titulaire n'est pas garantie, surtout depuis l'arrivée de Giovani Dos Santos. "Il lui est aussi arrivé d'être sur le banc, souligne le buteur français. Nous sommes trois pour un poste, mais la concurrence est saine."
Perbet s'est pris au jeu du professionnalisme. Et à 28 ans, il va connaître le point culminant d'une carrière qui l'a vu emprunter un chemin particulier, de Polignac à Villarreal, de ce football familial qui caractérise l'amateurisme au monde pro et toutes ses embûches et ses sacrifices. Au Madrigal, la venue du Real Madrid va braquer les regards sur le sous-marin jaune et son goleador tricolore. Beaucoup de Français vont découvrir un joueur qu'ils n'ont quasiment jamais eu l'occasion de voir jouer devant leur petit écran. Perbet a fini par s'accommoder de ce relatif anonymat que ses statistiques en carrière (147 buts en 303 matches pros) auraient déjà dû interdire. "Le sentiment d'être ignoré dans mon pays, je l'ai, mais pas plus que ça, assure-t-il. J'ai juste fait une carrière différente, j'ai pas mal bourlingué." La Liga lui offre enfin cette exposition qu'il n'a jamais eue jusqu'ici. Il lui appartient désormais d'y marquer son territoire. C'est ce qu'il sait faire de mieux justement.
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