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L’Islande, l’usine à buteurs perdue dans le froid

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 01/08/2013 à 23:36 GMT+2

Ce week-end, quatre buteurs islandais ont brillé en Coupe des Pays-Bas. Loin d’être un hasard, c’est le fruit d’un travail de fond qui pourrait envoyer l’Islande au Brésil en 2014.

2012 islande suisse Gylfi Sigurdsson Emil Hallfredsson Inler

Crédit: Panoramic

Il est à peine 22h30 samedi lorsque l'Ajax remporte la Supercoupe des Pays-Bas en s'imposant à domicile contre l'AZ, sur le score de 2-3 (dans l'intitulé, Alkmaar reçoit mais le match s'est disputé à l'Arena) après la prolongation. Sur les écrans géants du stade Amstellodamois, les noms des buteurs du match sont bien en évidence. Parmi eux, quatre noms familiers pour les amateurs de foot scandinave (au sens large) : Eriksen, Gudmundsson, Johansson et Sigthorsson. Les trois derniers sont Islandais et font partie de la nouvelle génération montante de cette petite île de 320.000 habitants. Une génération qui, outre les pays scandinaves, s'éclate entre Angleterre, Italie et surtout Pays-Bas où l'Eredivisie est devenu un véritable refuge pour têtes blondes.
Particularité de la nouvelle génération islandaise, elle brille surtout dans le secteur offensif. Outre "l'ancien" Eidur Gudjohnsen, l'Islande peut compter sur Alfred Finnbogason (Heerenveen), Kolbeinn Sigthorsson (Ajax), Johann Berg Gudmundsson (AZ), Gylfi Sigurdsson (Tottenham), Björn Bergmann Sigurdarson (Wolverhampton) tandis qu'Aron Johannsson a annoncé ce lundi qu'il donnait sa préférence à la sélection nationale des Etats-Unis, malgré un parcours prometteur avec les espoirs islandais. Un choix rendu possible par sa double nationalité islandaise-américaine. Un choix peut-être dicté par l'abondance de joueurs au poste d'attaquant dans la sélection de Lars Lagerbäck puisque Gudjohnsen, Finnbogason et Sigthorsson ont tous une longueur d'avance sur l'actuel avant-centre d'Alkmaar. Un club où il est amené à remplacer... l'américain Jozy Altidore parti rejoindre la Premier League.
L'Islande se penche sur ses installations
Cette nouvelle génération, l'Islande est allée se la chercher à la force du poignet et en ouvrant son portefeuille pour se moderniser. Consciente que ses installations et sa situation géographique lui posaient des problèmes dans la formation de ses jeunes footballeurs, la petite île a pris le problème très à coeur et s'est employée à faire évoluer ses infrastructures dans le bon sens. Pour contrer les conditions climatiques difficiles, obligeant la fédération à organiser le championnat de début mai à fin septembre, l'Islande s'est offert plusieurs centres indoor avec pelouses synthétiques. Le but de la manoeuvre ? Que les clubs professionnels, les jeunes des centres de formation et tout simplement les jeunes Islandais fans de foot puissent jouer de janvier à décembre au football dans de bonnes conditions. Une évolution profitable pour Hördur Snaevar Jonsson, journaliste à 4-3-3.is : "L'explication du renouveau islandais se trouve en grande partie dans ces terrains couverts construits il y a quinze ans, explique Jonsson. Avant, les joueurs de première division comme les jeunes jouaient l'hiver sur des terrains extérieurs où se mêlaient joyeusement sable et graviers."
Magnus Mar Einarsson, journaliste à fotbolti.net explique que depuis l'ouverture du premier indoor en 2000, de nombreux autres terrains couverts ont été construits : "Six autres centres ont ouvert après 2000 et de nombreux autres l'ont été pour les jeunes islandais, la plupart étant des demi-terrains synthétiques, précise le journaliste. Cela permet à tout le monde de jouer dans de bonnes conditions toute l'année et de développer les qualités techniques importantes pour les joueurs offensifs."
Ces nouvelles facilités n'ont pas vraiment augmenté le nombre de licenciés puisque les Islandais ont toujours pratiqué le football en nombre. Ils sont 20.000 aujourd'hui sur 320.000 habitants selon Einarsson. A titre de comparaison, il faudrait 4 150 000 licenciés en France (contre 2 035 000 aujourd'hui) pour atteindre le taux de licenciés islandais.
Une crise économique bénéfique
Il y a un autre facteur déterminant expliquant l'émergence de la nouvelle génération islandaise. La crise de 2008 qui a lourdement touché l'île n'a pas été sans répercussion pour les clubs islandais, tous semi-professionnels : restrictions budgétaires obligent, les clubs ont arrêté brutalement le recrutement de joueurs étrangers. Comme le Danemark et la Suède au même moment, et maintenant la Norvège, l'Islande faisait confiance à des Sud-Américains et des africains leur permettant d'élever le niveau technique et physique de l'Úrvalsdeild, le championnat national. Mais tout cela se faisait aussi au détriment des jeunes Islandais, en nombre dans les centres de formation et les effectifs des clubs de D1. La crise a donc permis - ou plutôt contraint - les clubs à revoir leur politique de recrutement, pour tout miser désormais sur la formation.
Parmi les meilleurs clubs formateurs de l'Islande se trouve Breidabliks, petit club de Kopavogur, ville située sur la côte ouest entre Reykjavik et Garðabær, où se trouve le club qui monte, le Stjarnan FC. Hördur Jonsson souligne le remarquable travail de Breidabliks : "Finnbogason, Gudmundsson, Johansson et Gylfi Sigurdsson sont tous passés par les équipes de jeunes de ce club, se réjouit le journaliste islandais. C'est le meilleur centre de formation de l'île, avec Stjarnan et FH. Ils investissent dans leur centre de formation, ils ont les meilleurs éducateurs mais aussi le plus grand nombre de jeunes pratiquant le football."
Tout pour l'attaque
Comme le dit le proverbe : "Abondance de biens ne nuit pas", et pour l'actuel sélectionneur Lars Lägerback, qui avait qualifié la Suède à cinq tournois consécutifs majeurs entre 2000 et 2008, la composition de son attaque ne lui pose aucun problème, alors qu'en défense, les choses sont plus compliquées. Avec Finnbogason (24 buts aux Pays-Bas la saison passée), Sigthorsson (cinq buts dans les huit dernières journées avec l'Ajax, après deux grosses blessures) et l'éternel Gudjohnsen, le sélectionneur de l'Islande possède trois buteurs très intéressants. Surtout, les bonnes performances des deux joueurs d'Eredivisie permettent d'effacer la Gudjohnsen-dépendance existant depuis dix ans en Islande. Rarement un pays n'a été aussi dépendant de la forme d'un seul joueur au niveau international. A bientôt 35 ans, l'actuel joueur de Bruges voit avec plaisir une excellente relève arriver et déjà évoluer dans des championnats compétitifs.
Pour alimenter ces bons attaquants, plusieurs milieux de terrain offensifs sont en pleine progression comme les moins connus Johann Berg Gudmundsson (AZ) et Emil Hallfredsson (Hellas Verona, promu en Série A), tandis que la star actuelle de l'équipe Gylfi Sigurdsson a un temps d'avance sur tout le monde dans l'enchaînement des matches de haut niveau avec Tottenham. Pour compléter le milieu de terrain, des profils plus défensifs avec le capitaine Gunnarsson (titulaire à Cardiff, promu en Premier League), Gislason (Copenhague) et Bjarnason (Pescara) sans oublier le jeune Victor Palsson, qui a grossi un peu plus le contingent d'Islandais aux Pays-Bas cet été. Exceptés le vétéran Gudjohnsen et l'expérimenté Hallfredsson, tous ces joueurs offensifs ont moins de 25 ans et sont tous de la première génération à avoir pu profiter des nouvelles structures sportives (centres indoor, pelouses synthétiques) de l'Islande, tout au long de l'année.
Et 2014 ?
Cette bonne tenue sportive se confirme du côté de la sélection nationale. Aujourd'hui 73e au classement FIFA (elle était même 61e en juin dernier) devant la Pologne, la Biélorussie et la Lituanie, et juste derrière Israël et la Finlande, l'Islande est aussi toujours en course dans les qualifications pour la Coupe du Monde 2014, du rarement vu ! La petite île scandinave est troisième du classement du Groupe E, à un point de la place de barragiste, actuellement "propriété" de l'Albanie, mais est surtout placée devant la Norvège, la Slovénie et Chypre. L'Islande s'est notamment imposée en Slovénie et en Albanie. Le match décisif se jouera le 10 septembre puisque l'Islande recevra l'Albanie, deuxième du groupe.
Tandis que le Danemark est avant-dernier de son groupe, que la Norvège cumule les contre-performances, que la Finlande est désormais à quatre points de la France et que la Suède est dans un duel serré avec l'Autriche pour la deuxième place, l'Islande pourrait bien être la seule nation de l’Europe nordique représentée en barrages de la Coupe du monde 2014. Cela marquerait définitivement la progression de cette petite île qui a su se restructurer pour avancer. Du point de vue footballistique comme économique, l'Islande aime montrer qu'elle a un temps d'avance...
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