Euro 2016 : Buteur atypique, Paco Alcacer s'est déjà mis Valence et l'Espagne dans la poche

La sensation Paco Alcacer ne retombe pas. Ça n'a pas suffi à la Roja, mais le buteur de Valence s'est une nouvelle fois distingué jeudi, avec un but en Slovaquie qui traduit toutes ses qualités dans la zone de vérité. A 21 ans, le jeune avant-centre du club Ché s'est imposé comme la révélation de cette entame de Liga, au point de faire ses débuts avec la sélection de Vicente del Bosque lors de la défaite face à la France en amical, début septembre (1-0). Une ascension qui peut paraître fulgurante. Mais elle était attendue.

Ceux qui suivent les tournois internationaux de jeunes connaissent déjà Paco Alcacer. Le buteur de Valence avait explosé à l'Euro U17 en 2010, terminant meilleur buteur avec six buts. En 2011, il a inscrit un doublé dans la prolongation face à la République tchèque en finale pour donner un titre de champion d'Europe U19 à l'Espagne (3-2 a.p.).  Un an plus tard, il a mis la France de Paul Pogba à genoux avec un doublé en demi-finale de l'Euro U19 (3-3, 4-2 t.a.b.) avant d'être sacré quelques jours plus tard face à la Grèce (1-0). Chez les jeunes, il a collectionné les titres et les statistiques flatteuses.

La question concernant Alcacer était de savoir si un joueur aussi prolifique et décisif au sein des sélections de jeunes serait capable d'afficher le même niveau en club. Son éclosion chez les professionnels était particulièrement attendue à Valence, où Alcacer a fait toute sa formation après avoir débuté le football à Torrent, sa ville natale. Unai Emery a été le premier à lancer le jeune avant-centre du VCF dans le grand bain lors d'un match de Copa del Rey face à Logroñes, en novembre 2011 (4-1). Mais Alcacer n'a réellement intégré l'équipe première du club Ché que l'été suivant. Après avoir brillé à l'Euro U19, il a été invité à faire la préparation de la saison avec les pros.

L'été 2011 devait ainsi être celui de tous les plaisirs pour le jeune Espagnol. Mais il restera celui du plus grand drame de sa vie. Le 12 août, Alcacer a marqué en amical pour ses débuts à Mestalla, lors du Trofeo Naranja face à la Roma, sur une passe de Jérémy Mathieu (3-0). En rentrant du stade avec ses parents, venus assister à la première de leur fils, il a vu son père, victime d'un arrêt cardiaque, s'écrouler à côté de lui. Arrivés en urgence, les médecins du club ont tenté de le réanimer durant une demi-heure. En vain. Son père est décédé ce jour-là, à 44 ans. Depuis, "Paquito" lui dédie chacun de ses buts.

Cet événement tragique a endurci Alcacer, alors âgé de 17 ans. "Mon père m'a mis au football et je lui dois beaucoup, confiait-il le mois dernier, lors de son premier rassemblement avec l'équipe d'Espagne. Avec un coup aussi dur, on grandit beaucoup plus vit. En ce sens, c'est positif. On mûrit, et on apprend ce qu'est la vie." Alcacer a su poursuivre sa progression. Il a fait ses débuts en Liga en janvier 2012 face à la Real Sociedad et participé à trois matches de championnat sur l'ensemble de la saison. Tout en réussissant de bonnes performances en réserve avec 12 buts en 24 matches.

C'est en 2012/2013 que Paco Alcacer a pu vraiment commencer à se confronter au niveau de l'élite. Mais pas à Valence. Barré par Roberto Soldado, il a été prêté par Getafe pour avoir plus de temps de jeu et commencer à s'aguerrir. Au sein du club de la banlieue de Madrid, il a ainsi participé à 21 matches de championnat, avec un bilan de 3 buts et 1 passe décisive. Une étape nécessaire avant de revenir à Valence avec un rôle plus important, suite au départ de Soldado à Tottenham. La saison dernière, Alcacer était ainsi en concurrence avec Jonas pour le poste d'attaquant de pointe.

Le gamin de Torrent a su tirer son épingle du jeu. Peu utilisé dans la première moitié de la saison, il s'est imposé comme l'avant-centre titulaire du VCF après la trêve. Avec, en point d'orgue, un costume de héros endossé lors du quart de finale de la Ligue Europa face à Bâle. Lourdement battu en Suisse (3-0), Valence a signé un renversement de situation mémorable au retour en s'imposant 5-0. Grâce à Alcacer, auteur d'un triplé dont deux buts somptueux, d'abord pour ouvrir le score, puis pour envoyer son équipe en prolongation.  Il s'est révélé lors de cette première saison pleine, avec un bilan encourageant de 14 buts en 37 matches toutes compétitions confondues.

Le public espagnol a découvert un joueur dont les qualités ne correspondent pas forcément à celles de l'avant-centre moderne. Il n'est pas impressionnant de puissance, de vitesse ou par sa capacité d'élimination. Mais Alcacer a un instinct rare pour le but. Il sait comme peu de joueurs être au bon endroit, au bon moment et réaliser le geste juste, pour lui ou pour un coéquipier. Cela fait de lui un buteur remarquable. Mais surtout une arme redoutable à la pointe d'un collectif. Il l'a encore prouvé récemment avec une remise parfaitement sentie pour Carles Gil face à la Real Sociedad (1-1).

C'est ce qui a contribué à la propulser aussi rapidement en équipe d'Espagne. Pour une Seleccion en quête de renouveau après le fiasco du Mondial brésilien, et au sein de laquelle la question de l'attaquant de pointe a souvent fait débat, la solution Alcacer s'est vite imposée aux yeux de Vicente del Bosque. Elle lui offre une alternative intéressante à Diego Costa, dont le style de jeu ne colle pas forcément à celui de la Roja. L'attaquant de Valence, lui, a prouvé depuis longtemps sa faculté à s'intégrer dans le collectif espagnol, quasiment similaire des U15 jusqu'à l'équipe A. Et sa capacité à en être un leader.

Alcacer l'a confirmé en septembre. Après avoir fait ses débuts en équipe d'Espagne lors de la défaite face à la France (1-0), il a brillé contre la Macédoine avec un but et une passe décisive (5-1). Sorti sous les acclamations d'un public qui était quasiment le sien l'Estadio Ciudad de Valencia, où évolue Levante, Alcacer a ainsi connu le point d'orgue d'un début de saison réussi en club. Avec déjà quatre buts et trois passes décisives en sept matches de Liga, la jeune pousse du club Ché est bien partie pour confirmer son éclosion au plus haut niveau. Pour le plus grand bonheur de Valence. Et de l'Espagne.