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Juventus - Zeman, faits pour se détester

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 29/11/2012 à 21:01 GMT+1

Un match entre la Juve et la Roma est toujours bouillant. Mais ce qui a décuplé la haine entre les deux entités, remonte à 1998 et est l’œuvre de Zeman.

Zdenek Zeman (Reuters)

Crédit: Reuters

Samedi soir, la Juve accueille la Roma dans le choc de la 6e journée de Serie A. Cette affiche annonce les retrouvailles entre Zdenek Zeman et le club turinois, deux figures qui se haïssent depuis longtemps et ne ratent jamais une occasion de le faire savoir. Retour sur les contours de cette animosité qui persiste et sera l’objet de toutes les attentions au Juventus Stadium.
Un match entre la Juve et la Roma est toujours bouillant. La rivalité entre les deux clubs est totale et remonte loin en arrière. Elle est géographique (combat nord/sud), économique et sociale (pendant longtemps, la haute société contre les campagnards) mais aussi sportive. En 1981 par exemple, le but valable, mais refusé, de Turone (Roma) avait favorisé la Juve dans la course au scudetto, et reste l’un des plus vieux débats dans le foot italien. Mais ce qui a décuplé la haine entre les deux entités, remonte à 1998 et est l’œuvre de Zdenek Zeman, adulé par les Romanisti, détestés et raillés par les Juventini.
"La Serie A risque de devenir le Tour de France"
Le 6 août 1998, Zdenek Zeman lâche une bombe à fragmentation dans le quotidien L’Espresso. Dans une longue interview, il explique comme le foot italien est en train de se transformer en usine pharmaceutique : "Je vois que de nombreux médecins sont passés du cyclisme au football. Les seuls qui se font attraper sont ceux qui prennent des pilules coupe-faim (Peruzzi) ou de la cocaïne (Maradona, Caniggia). Les clubs reçoivent des dizaines de dépliants de l’industrie pharmaceutique leur proposant des produits pour que les joueurs récupèrent mieux et courent plus longtemps". Puis, il lance son attaque sur la Juventus : "Je ne peux pas nier que j’ai été surpris, à plusieurs reprises, par le développement musculaire de plusieurs joueurs de la Juve comme Vialli et Del Piero. J’ai pratiqué de nombreux sports et ce genre de croissance musculaire me semble réservé aux culturistes."
Cette interview sera le point de départ de l’un des plus gros scandales du foot italien, le seul concernant le dopage. La justice se saisit de l’affaire et commence à convoquer des joueurs de la Juventus. Les entourages des joueurs sont entendus et plusieurs joueurs sont suspectés de dopage. Interrogé par le procureur en charge de l’affaire, le médecin de l’équipe de France, Jean-Michel Ferret, avoue que Didier Deschamps, entre autres, possédait en 1998 un taux d’hématocrite beaucoup plus élevé que la normale, et explique que l’EPO pourrait en être la cause. Pendant plusieurs mois, l’enquête se poursuit et le grand public découvre que deux "médecins" plus que louches sont employés par la Juventus : un préparateur néerlandais et un physiologue spagnolo-argentin dont les CV regorgent des mots stéroïdes, anabolisants, hormones de croissance…
Le procès débute en 2002 et débouche plusieurs années plus tard sur la relaxation des accusés dont le médecin de la Juventus, le Dr Agricola. En fait, à la barre, tous les joueurs de la Juve reconnaissent avoir pris de la créatine, substance à l’époque non interdite et ayant deux conséquences : la mise en danger de la santé des athlètes et l’effet masquant de la créatine sur d’éventuels autres produits dopants. Le témoignage de Del Piero est l’un des plus intéressants : il raconte comment les doses de créatine augmentaient ainsi que la prise de pilules de toutes les couleurs, un mois avant la finale de la Ligue des Champions 1998, sans que les joueurs ne soient mis au courant du produit contenu dans ces pilules.
Zeman, ennemi public numéro 1
À partir du 6 août 1998, Zdenek Zeman devient l’ennemi public numéro 1 de la Juventus. Gianluca Vialli, Ciro Ferrara, Marcello Lippi, Luciano Moggi, tous appellent à la suspension de l’entraîneur de la Roma. Le ton est parfois menaçant. Lippi explique ainsi que "celui qui donne les noms de Vialli et Del Piero doit faire bien attention à lui" tandis que Vialli parle de "terrorisme". La fédération italienne ne les suivra pas et ne condamnera pas Zeman.
Il Boemo devient persona non grata. L’influence des dirigeants de la Juve est telle que son nom est blacklisté partout. Il s’exile une première fois à Fenerbahce, puis revient à Naples mais est rapidement licencié. Il passe ensuite plusieurs saisons dans des clubs de Serie B, là où les portes sont restées ouvertes. En 2004-2005, il revient en Série A, à Lecce (encore un club du Sud, tout sauf un hasard tant les rapports entre les "Sudistes" et le clan de la Juve sont mauvais), sauve le club de la relégation et termine deuxième meilleure attaque derrière la Juve, championne d’Italie.
Il est à ce moment là, un des premiers à dénoncer ce qui deviendra l’affaire Calciopoli. Là encore, Zeman initie la manœuvre et la Juventus finit dans les bureaux des procureurs. L’entraîneur parle alors de triche, matchs truqués, arbitres complaisants avec les plus forts, etc. Cette nouvelle attaque lui vaudra un exil forcé et aboutira à la rétrogradation de la Juve (entre autres) et les condamnations du duo Moggi-Giraudo. En quatre ans, il n’entraînera que quelques mois l’Etoile Rouge de Belgrade, avant de rentrer en Italie, à Foggia (D3) puis Pescara (Serie B) et enfin la Roma cette saison.
La haine reste vivace
Le problème de Zeman est qu’il a une sorte de TOC. Dès qu’un micro est tendu, il ne peut s’empêcher de parler de la Juve. Ou plus exactement, de répondre aux questions des journalistes, qui espèrent une nouvelle bataille de mots à mettre en bonne place dans le journal du lendemain. Et ça marche à chaque coup. Depuis le début de la saison, pas une conférence de presse de Zdenek Zeman n’a pu se conclure sans une question ou une référence à la Juve. Résultat, des réponses franches de l’intéressé où l’on ressent la haine qu’il a envers Moggi, la Juve et un système qui a fait beaucoup de mal au foot italien. Le problème, c’est que la répétition de ces mots devient lassante, comme un vieux disque passant en boucle pendant des heures.
À chaque question d’un journaliste, il y a d’abord la réponse de Zeman, puis la surenchère des intéressés. Depuis quelques semaines, Gianluca Vialli, Antonio Conte et Ciro Ferrara, tous accusés par Zeman dans l’affaire du "football des pharmacies des années 90", s’en donnent à cœur joie pour dézinguer l’entraîneur de la Roma. Après tout, ils sont attaqués, ils répondent. Leur réponse préférée ? Le manque de titre de Zeman. À raison. Car l’entraîneur de la Roma n’a rien gagné et lorsque l’on a la culture de la gagne à tout prix, comme l’ont les anciens de la Juve, un palmarès vierge est vu comme une honte, là où Zeman préfère insister sur la joie qu’il donne aux tifosi, son football spectaculaire et une certaine idée de l’éthique dans le football.
Avant les retrouvailles avec la Juve samedi, Zeman a recroisé la route de Ciro Ferrara mercredi soir lors de la venue de la Sampdoria à l’Olimpico. Si l’ancien joueur de la Juventus a expliqué que les deux hommes n’avaient pas eu l’occasion de se serrer la main, personne n’est dupe en Italie, en témoignent les déclarations fracassantes des deux côtés avant le match. Avec un résultat final de 1-1, les deux hommes ne se sont pas départagés mais tandis que le promu effectue un bon début de saison, la Roma, elle, déçoit.
La Roma est en retard
L’enthousiasme de l’arrivée de Zeman à la Roma a provoqué une onde d’optimisme incroyable en Italie. La Roma allait être le concurrent numéro 1 de la Juventus dans la course au titre. Après cinq petites journées, et même si rien n’est perdu, la Roma est déjà en retard sur son rival, aussi bien au classement que dans le jeu.
Les Romains n’ont toujours pas gagné à domicile et peuvent remercier le patron de Cagliari pour son erreur ayant offert le match dimanche dernier sur un tapis (vert) à la Roma. Car sans ces trois points au classement, la situation serait nettement plus délicate. On arrive à apercevoir de temps à autre le jeu de Zeman, quelques bribes très intéressantes où le ballon circule vite et où la profondeur est recherchée très rapidement. Mais c’est trop peu. Face à la Sampdoria, comme face à Bologne, la Roma a joué 45 minutes d’un très bon football, a gâché beaucoup d’occasions avant de perdre des points en seconde période. Cet écroulement mental et physique est difficile à expliquer et Zeman préfère rester optimiste.
Pourtant, l’Italo-Tchèque a de quoi s’inquiéter : Stekelenburg (ou Stekelenbourde, Stekelenbug) empile les mauvaises performances tout comme le latéral droit Piris, tandis que Mattia Destro n’arrive pas à marquer, que Lamela se révèle toujours aussi irrégulier et que les blessés s’accumulent. Seule satisfaction, Francesco Totti. Il vient de fêter ses 36 ans mais rayonne encore sur le terrain. Leader technique et créatif, il retrouve ses jambes d’adolescent et a très bien digéré la très lourde préparation physique de Zeman.
Il faudra un très grand Totti, un très grand Zeman (pas comme face à la Sampdoria où son seul remplacement, sur trois disponibles, a fait beaucoup parler en Italie) et une très grosse Roma pour venir à bout de la Juventus samedi soir. Cela fait beaucoup de conditions à réunir en trois petits jours, alors que la Juve disputera ce match pour garder son invincibilité qui court encore. 44 matchs que la Vieille Dame n’a pas perdu. Inutile de vous dire que Zeman a bien envie de jouer un mauvais tour aux turinois. Après tout, on dit bien jamais deux sans trois, non ?
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