Detroit, la ligne rouge

Qui aurait cru lorsqu'il fut drafté en 210e position en 1999 qu'Henrik Zetterberg deviendrait une des plus féroces machines à scorer de la NHL? Auteur d'une énorme saison régulière où il a flirté avec les 100 points (43 buts et 49 passes en 75 rencontres), meilleur réalisateur des playoffs à égalité avec Sidney Crosby avec 21 points (mais en ayant disputé deux rencontres de moins), Zetterberg est le véritable moteur de l'attaque des Red Wings, plus encore que Pavel Datsyuk. Le Suédois a tout fait depuis un mois et demi. Il marque en power play, à 5 contre 5 et même en infériorité numérique. Mieux, il monte en puissance tour après tour. Son efficacité sur les faceoffs pèse également sur la faculté de Detroit à monopoliser le palet. Sa complicité avec Pavel Datsyuk et Thomas Holmstrom a permis à Detroit de concevoir la ligne d'attaque la plus redoutée et la plus complète de la Ligue.

Succédant à Serguei Fedorov, il incarne la perpétuation de l'âme russe au sein du collectif de Detroit. Pavel Datsyuk n'était encore qu'une étoile montante lors du dernier sacre des Wings, en 2002, son année de rookie en NHL. Depuis, il s'est affirmé comme la star de l'escouade offensive, avec Zetterberg. Intrinsèquement, il est sas doute le joueur le plus doué du groupe. Longtemps, il fut le roi de la saison régulière, avant de plonger systématiquement lors des playoffs, qui semblaient l'inhiber. Ce n'est plus le cas et il y donne aujourd'hui sa pleine mesure, comme en témoignent ses 19 points. Curieusement, Dasyuk brille surtout à l'extérieur, où il a inscrit ses neuf buts! Moins buteur que son compère Zetterberg, il demeure en revanche le véritable playmaker de cette équipe.

Chris Chelios, du haut de ses 46 ans, dit de lui qu'il est le "meilleur coéquipier" qu'il n'ait jamais eu. Drafté en 1989 par… Detroit, Nicklas Lidstrom a remporté trois titres avec les Wings, en 1997, 1998 et 2002. Depuis la retraite de Steve Yzerman en 2006, il est même devenu le capitaine de la franchise du Michigan. La perspective de devenir le premier capitaine européen à brandir la Coupe Stanley le fait rêver. Le temps ne semble pas avoir de prise sur le Suédois de 38 ans, considéré comme le meilleur défenseur du monde depuis une décennie. Offensivement redoutable, précieux en équipe spéciale, aussi bien en supériorité qu'en infériorité numérique, Lidstrom est surtout doté d'une intelligence de jeu très au-dessus de la moyenne. Finalement, c'est peut-être Mike Modano, le capitaine de Dallas, qui a le mieux résumé l'animal: "Le secret de Lidstrom? Il n'a aucune faiblesse." Tout est dit.

Voilà peut-être le véritable homme clé de ces Finales. Johan Franzen a tout cassé lors des deux premiers tours, en inscrivant 12 buts en 10 matchs (dont deux hat-tricks dans la série face à Colorado), nouveau record de la franchise. Il était devenu le véritable go-to-guy. Au total, il venait de marquer 26 buts lors de ses 26 dernières rencontres avant de disparaître de la circulation au début de la finale de conférence face à Dallas. La raison? Franzen a subi les effets d'une commotion. Maux de tête, vertiges, l'attaquant scandinave doit prendre son mal en patience. Son retour demeure incertain mais la bonne nouvelle est tombée ce jeudi: il a été autorisé à reprendre l'entraînement. Sans Franzen, l'attaque de Detroit a davantage patiné contre Dallas, étant limité trois fois sur six à un seul but. Si Franzen revient, l'équation pourrait devenir insoluble pour Pittsburgh.

Au début de ces playoffs, Chris Osgood n'était pas le gardien titulaire des Wings. Mais les errements de Dominik Hasek face à Nashville, au premier tour, ont convaincu Mike Babcock de donner sa chance à Ozzie. Il n'a pas eu à le regretter. Detroit a remporté dix de ses douze matchs depuis, et les stats d'Osgood sont exceptionnelles: 1,6 but encaissé en moyenne par rencontre et 93,1% d'arrêts. Bien aidé, il est vrai, par sa défense, qui le protège remarquablement, il a su répondre présent quand il le fallait, comme lors de la dernière période du 6e match contre Dallas. Au point que son nom circule pour un possible titre de MVP des playoffs. Reste que certains demeurent sceptiques, estimant que le vétéran du Michigan (déjà lauréat de deux Coupes Stanley avec Detroit) n'a pas encore été véritablement testé. La formidable attaque de Pittsburgh constitue il est vrai un challenge inédit pour Osgood dans ce printemps 2008 qui, pour le moment, lui réussit.

Défenseur et Suédois comme son glorieux aîné Nicklas Lidstrom, Kronvall réalise des playoffs remarquables. Plus de 22 minutes de temps de glace par match. Longtemps freiné par des blessures, il peut enfin s'exprimer pleinement.

Moins flashy que Datsyuk, moins punchy que Zetterberg, Holmstrom est pourtant lui aussi indispensable dans la première ligne d'attaque de Detroit. Enorme travailleur, le vétéran scandinave est un poison pour les gardiens adverses, qu'il ne cesse de harceler.

Un phénomène de longévité. Le défenseur américain goûte à sa 24e saison NHL. Recordman des matchs joués en playoffs (260 à ce jour). Il a déjà affronté Pittsburgh en finale. C'était en 1992, avec Chicago !

Encore un vieux de la vieille, qui a débuté Winnipeg, une franchise qui n'existe plus depuis près de 15 ans. Draper est un des derniers vestiges de l'équipe sacrée en 1997 et 1998. Travailleur acharné qui accomplit les besognes dans l'ombre. Précieux, assurément.